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vives, applicable dans ce cas, prouve que la vitesse que la lumière a acquise par l'effet de la réfraction est indépendante de la direction initiale du rayon, et que le rapport de cette vitesse à celle de la lumière incidente est égal au rapport du sinus d'incidence au sinus de réfraction.

Le même principe des forces vives donne pour mesure de l'action totale du corps sur la lumière l'accroissement du carré de la vitesse du rayon; accroissement que pour cette raison on désigne sous le nom de puissance réfractive. Cette quantité doit évidemment dépendre de la nature du corps; mais, dans une même substance, elle doit rester proportionnelle à la densité, car il est naturel de penser qu'une attraction s'exerce toujours proportionnellement à la masse, quelle que soit d'ailleurs la fonction de la distance suivant laquelle elle varie. Dans cette SUPPOSITION, le pouvoir réfringent, c'est-àdire le rapport de la puissance réfractive à la densité, ne doit plus dépendre que de la constitution chimique du corps, et rester constant quand la densité seule change.

Cette conséquence de la théorie de l'attraction n'a jamais été vérifiée, excepté dans les gaz. Mais si l'on fait attention que leur puissance réfractive est extrêmement faible, et que par conséquent l'accroissement de vitesse qu'ils impriment à la lumière est très-petit, on s'assurera, à l'aide d'un calcul fort simple, que l'expression que la théorie newtonienne donne pour la puissance réfractive n'est pas la seule qui, dans les gaz, reste proportionnelle à la densité, mais qu'il existe une infinité d'expressions différentes de celle-là, qui toutes satisferaient à la même condition. Il en résulte donc que, bien que les gaz paraissent avoir un pouvoir réfringent indépendant de

leur densité, on n'est nullement en droit d'en conclure solides et liquides jouissent de la même

que

les corps propriété.

Nous avons pensé que le meilleur moyen de décider complètement cette question serait de comparer le pouvoir réfringent de différens liquides à celui des vapeurs que ces liquides forment. Dans ce cas, le changement de densité est très-considérable, et l'un des corps au moins conserve une forte action sur la lumière. Nous avons donc fait choix des liquides qui, aux températures ordinaires de l'air, fournissent les vapeurs les plus abondantes. Nous avons mesuré la puissance réfractive de chacun de ces liquides et celle des vapeurs qui en dérivent; en comparant ces puissances réfractives aux densités connues des liquides et des vapeurs, il a été facile de voir si, dans chacun de ces corps, le pouvoir réfringent, c'est-à-dire l'expression analytique, était indépendante de la densité.

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Le résultat de nos expériences prouve rigoureusement le contraire. Elles s'accordent toutes à donner pour les vapeurs un pouvoir réfringent sensiblement moindre que celui des liquides qui les ont formées. Ainsi, pour ne citer qu'un seul exemple, le pouvoir réfringent du soufre carburé liquide rapporté à l'air, est un peu plus grand que 3, tandis que celui de la même substance à l'état de vapeur, rapporté également à l'air, ne surpasse pas 2. Si l'on compare maintenant ce résultat à la théorie, on se trouve obligé, en admettant l'explication newtonienne de la réfraction, de supposer, ce qui du moins est une conclusion assez singulière, que l'attraction D'UN MÊME CORPS pour la lumière ne s'exerce pas proportionnelle

ment à la densité. Malheureusement, le nombre des substances sur lesquelles on peut opérer avec précision à l'état de vapeur est trop petit pour qu'on puisse espérer de conclure des résultats de nos expériences aucune loi relative à la variation que le changement de densité fait subir à l'affinité des corps pour la lumière. Les liquides que nous avons essayés sont le soufre carburé, l'éther sulfurique et l'éther muriatique.

A défaut de ce moyen direct, il nous avait semblé que cette loi pourrait se déduire de la comparaison du pouvoir réfringent des gaz et de celui des corps solides ou liquides qu'ils forment en s'unissant. En effet, si dans les combinaisons de gaz qui conservent l'état gazeux, le pouvoir réfringent du composé était, comme on l'a cru jusqu'à présent, égal à la somme des pouvoirs réfringens de ses élémens, il en résulterait que l'acte de la combinaison ne modifierait en rien l'action des corps sur la lumière, d'où l'on pourrait conclure avec vraisemblance que le pouvoir réfringent d'un composé solide ou liquide ne diffère de la somme des pouvoirs réfringens de ses principes gazeux, qu'à raison de l'augmentation que ces derniers éprouvent par l'effet de la condensation.

Cependant, comme la loi relative à la force réfringente des gaz composés n'avait été établie que sur un petit nombre d'expériences, il était indispensable de s'assurer d'abord de son exactitude: or, les mesures que nous avons faites de la réfraction d'un grand nombre de gaz, nous ont prouvé que cette loi ne s'accordait pas toujours avec les résultats de l'observation.

On voit donc que le pouvoir réfringent d'un corps,

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loin d'être constant comme la théorie newtonienne semblerait le prouver, dans l'hypothèse la plus NATURELLE qu'on puisse faire sur l'attraction, subit.au contraire des variations, soit par l'effet du changement de densité, soit

l'état de combinaison dans lequel le corps se trouve. par Pour déterminer l'influence de chacune de ces causes en particulier, il est nécessaire de mesurer avec exactitude les pouvoirs réfringens d'un grand nombre de substances, et ceux des combinaisons auxquelles elles donnent lieu. Quoique le travail que nous avons entrepris à cet égard embrasse déjà un nombre assez considérable de corps " nous avons senti la nécessité de l'étendre encore plus avant de chercher à lier par quelque loi générale les divers résultats auxquels nous sommes parvenus.

Les faits que nous venons d'établir nous ont paru d'une telle importance, relativement à la théorie de la lumière, que nous avons cru qu'il serait utile d'en suivre les conséquences dans les divers phénomènes qui, par leur nature, ont une liaison plus ou moins directe avec celui de la réfraction.

Les rayons diversement colorés dont se compose la lumière blanche, sont, comme on le sait, inégalement séparés les uns des autres par leur réfraction dans des corps de nature différente, et c'est en cela que consiste la différence de force dispersive des corps. Ce qu'il y a de plus naturel à prendre pour mesure du pouvoir dispersif, c'est la différence des pouvoirs réfringens relatifs aux couleurs extrêmes du spectre; et, dans la théorie newtonienne, cette différence devrait être constante pour un même corps, aussi-bien que le pouvoir réfringent des rayons moyens.

L'expérience nous ayant appris que ce dernier pouvoir diminuait avec la densité, il était facile de prévoir que la force dispersive diminuerait aussi; mais il était important d'examiner si ces variations suivraient la même loi. Pour y parvenir, il fallait déterminer le pouvoir dispersif des liquides et des vapeurs dont nous avions précédemment mesuré le pouvoir réfringent. La force dispersive des liquides pouvait s'obtenir aisément ; mais il n'en était pas de même de celle des vapeurs. La réfraction qu'elles occasionnent dans un prisme étant très-faible, la dispersion, qui n'est qu'une partie très-petite de cette réfraction, est à peine sensible. Aussi, malgré l'importance d'une pareille détermination, soit dans les gaz, soit dans les vapeurs, les physiciens paraissent avoir renoncé à la déduire de l'observation. Mais comme l'objet que nous nous proposions exigeait une mesure directe, nous nous sommes efforcés d'atteindre ce but à l'aide d'un procédé dont nous donnerons une description détaillée. On verra de plus, par les résultats que nous apporterons, que les expériences faites sur une même vapeur, dans des circonstances différentes, s'accordent assez bien entre elles pour qu'on puisse regarder nos déterminations comme approchant beaucoup de la vérité:

En comparant les forces dispersives des vapeurs ainsi mesurées à celles des liquides dont ces vapeurs dérivent, nous nous sommes assurés que le pouvoir dispersif diminuait effectivement avec la densité; mais ce que l'observation nous a appris d'une manière non moins certaine, c'est que le pouvoir dispersif diminue dans un plus grand rapport que le pouvoir réfringent, ou, en d'autres termes, qu'en appelant i le rapport du sinus d'incidence au sinus

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