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garde et qui sont naturellement venus s'installer momentanément dans ses domaines;

Attendu qu'il est, à la vérité, de jurisprudence constante que le propriétaire est responsable des dégâts occasionnés par les lapins qui se trouvent sur sa propriété, et que celui qui veut se décharger de cette responsabilité, quand il n'a rien fait pour conserver et multiplier ces animaux, doit accorder à la personne qui a éprouvé le dommage et à la charge de laquelle, dans ce cas, est la destruction, le droit de pénétrer dans cette propriété et d'en user, pour arriver à cette destruction, de tous les moyens en usage; Que cela se conçoit; le lapin, en effet, est un animal très-casanier, qui multiplie considérablement, qui fait élection de domicile sur un point donné, dont la présence est constamment signalée, le plus souvent par des terriers ouverts dans un cercle restreint, qui lui servent d'habitation, et par des dévastations continuelles (car il est très-malfaisant et nuisible, et il est classé comme tel), et la chasse dirigée contre lui ne peut offrir de grands inconvénients pour la propriété sur laquelle il s'est retiré. puisqu'elle ne demande guère d'autre soin que celui du furetage ou du défoncement des terriers, ou bien celui d'une poursuite à travers quelques buissons, si ce sont des buissons qu'il a choisis de préférence; mais peut-il en être ainsi quand il s'agit d'autres animaux sauvages, tels que des cerfs, des biches et des chevreuils? - Nous ne le pensons pas : Les cerfs, les biches et les chevreuils sont des animaux nomades; ils viennent aujourd'hui sur un point, ils le quittent demain pour n'y plus reparaitre, et déjà ils sont loin depuis longtemps quelquefois, quand on s'aperçoit du dommage qu'ils ont pu causer en passant, de sorte que le propriétaire des lieux qu'ils ont parcourus n'a pu prévoir ni empêcher ce dommage. Pourquoi en serait-il responsable?

Et doit-on le contraindre à laisser son voisin venir chasser sur sa propriété, la parcourir, la fouiller dans toutes ses parties avec des chasseurs, des rabatteurs à son choix et en telle quantité qu'il lui plaise? Quelque respectables que soient les intérêts de l'agriculture, on ne peut leur sacrifier à ce point ceux de la propriété boisée; ce serait, croyons-nous, exposer les propriétaires de bois à des tracasseries continuelles, ouvrir la porte à bien des abus, exciter la cupidité, donner naissance à bien des haines, à des rancunes dangereuses, peut-être même favoriser en quelque sorte le braconnage, qui conduit assez ordinairement à des habitudes d'oisiveté et de désordre, quelquefois même plus loin, et par suite mener à la destruction complète du gibier, que notre dernière loi sur la police de la chasse a voulu au contraire protéger, en même temps que la propriété et l'agriculture;

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Que le propriétaire de bois doit bien, ce nous semble, mais à titre de bon voisinage seulement, et sans que rien puisse l'y contraindre, user, dans un cas de dommage réel, de tous les moyens en son pouvoir pour en éloigner ou détruire la cause et venir ainsi en aide au voisin lésé, qui a incontestablement, de son côté, le droit de détruire en tout temps, sur sa propriété, avec. des armes à feu, les bêtes fauves qui portent dommage à sa propriété; Que c'est ce qu'a fait M. Baillon; - Qu'en effet, avant celle de M. de Sennecourt, aucune plainte ne s'était produite jusqu'à ce jour; depuis, M. Baillon a fait faire des battues qui ont eu pour résultat la destruction d'un cerf et d'une biche; qu'en agissant ainsi, M. Baillon a évidemment donné des preuves de bon vouloir, et que si, comme l'a dit M. de Sennecourt, quelques chasseurs ont, dans ces battues, négligé de tirer sur les biches et leurs faons, cette négligence ne peut raisonnablement être reprochée à M. Baillon, qui était absent et avait organisé ces battues pour détruire;

Que si M. de Sennecourt avance qu'on ne chasse sur les domaines de M. Baillon que des cerfs et des chevreuils, à l'exclusion des biches, qui seraient souvent épargnées; qu'on n'en tue tout au plus qu'un ou deux par année; qu'en 1859 notamment il n'y a pas eu de châsses, et tire de ces faits

ces conclusions que toutes ces précautions ont augmenté le nombre des animaux sauvages qui peuplent les bois de M. Baillon; nous pensons, au contraire, que cela porte au moins à croire, si cela ne le prouve, que ces hôtes des bois sont assez rares sur lesdits domaines, ou qu'il n'y en a pas toujours, et que la présence des derniers venus n'a été réellement qu'un pur effet du hasard, qu'un cas fortuit non imputable à M. Baillon, puisque malgré toutes ces précautions, tous ces ménagements pris, au sens de M. de Sennecourt, en vue de leur conservation et de leur multiplication, il n'avait paint encore fait de réclamation, non plus que personne, dans le pays, qui est très-boisé; -Et s'il fallait une preuve à l'appui de ce que nous venons de dire sur la présence fortuite de ces animaux et leur habitude de ne pas rester en place, nous la trouverions dans un fait cité par M. Baillon, et qui n'a point été contesté, qu'un de ses amis, venu il y a deux ans pour chasser dans ses bois avec quatre-vingts chiens, n'a pu tuer un seul animal;

Attendu que si M. de Sennecourt se plaint de ce que, tout récemment et après une première assignation, M. Baillon qui s'était entendu avec lui à l'effet de nommer des experts chargés d'estimer le dommage éprouvé et lui avait donné le droit de tuer au fusil les cerfs qu'il pourrait atteindre, de manière á en diminuer le nombre, n'a pas tenu ses engagements, il ne nous semble point qu'il soit en droit de le faire, car il aurait lui-même, après l'expertise qui a réellement eu lieu, refusé l'indemnité fixée, dont il ne trouvait pas le chiffre assez élevé, et, par suite, considéré comme non avenu un arrangement qui n'avait été arrêté de la part de M. Baillon qu'en vue d'éviter des divisions entre voisins, et par esprit de conciliation;

Attendu enfin qu'il résulte, pensons-nous, de tout ce qui précède, que, si M. de Sennecourt a éprouvé un dommage, ce dommage n'est ni le fait de M. Baillon, ni le résultat de sa négligence; qu'il ne peut, par suite, lui en denrander la réparation;

Par ces motifs, faisant droit et jugeant en premier ressort, nous déclarons M. de Sennecourt mal fondé dans sa demande, l'en déboutons et le condamnons aux dépens.

Du 11 janvier 1861.—(M. Rossignol, jugé de paix.)

No 168.

TRIBUNAL CIVIil de Tours. 17 décembre 1861.

Forêts, animaux nomades, cerfs, chevreuils, sangliers, loups,
dégâts, propriétaire, responsabilité.

S'il est de jurisprudence que le propriétaire ou le fermier de la chasse d'une forêt est responsable des dommages causés par le gibier aux héritages riverains, cette doctrine ne saurait s'appliquer aux dégâts commis par les cerfs, biches, chevreuils, loups, sangliers et autres animaux nomades (1).

La responsabilité des propriétaires ou fermiers ne serait encourue qu'autant qu'ils auraient attiré ces animaux dans la forêt et qu'ils auraient cherché à les y fixer et multiplier pour le plaisir de la chasse (2).

(Archdeacon c. Chrétien.)

Par sentence du juge de paix d'Amboise, M. Archdeacon, adjudicataire du droit de chasse dans la forêt domaniale de ce nom, a été condamné à indemniser le sieur Chrétien des dégâts causés à ses récoltes par les cerfs, biches, che

(1-2) Voir, en ce sens, le jugement qui précède et la note.

vreuils, loups et sangliers sortis de ladite forêt. M. Archdeacon a interjetė appel de ce jugement, en se fondant sur ce qu'il ne pouvait être considéré comme responsable de dommages occasionnés par des animaux nomades, qu'il n'avait point attirés et dont il n'avait même pu empêcher l'invasion.

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu qu'il est de principe que, pour être responsable d'un dommage, il faut l'avoir causé par sa fante, sa negligence et son imprudence (art. 1382 et 1383 du C. Nap.), et qu'il ne s'agit ici en aucune façon du dommage causé par un animal placé dans les conditions dont parle l'article 1385;

Attendu que l'habitation soit accidentelle, soit habituelle d'une forêt, par des animaux sauvages qui y sont attirés par le seul effet de leur instinct, sans que le propriétaire ait rien fait pour les attirer, les y retenir, les y multiplier, est un cas fortuit, un fléau naturel tout à fait indépendant de la volonté et du fait de l'homme;

Attendu que, dans de telles circonstances, le propriétaire ou fermier n'étant pas la cause immédiate, ni même occasionnelle de la retraite de ces animaux dans la forêt, en principe, il ne saurait être, par le seul fait de cette retraite, responsable des dégâts que ces animaux font aux récoltes des propriétés voisines;

Attendu qu'aucune loi, ni aucun règlement n'oblige le propriétaire ou fermier d'un bois à détruire les animaux sauvages qui y sont venus et y sont retenus par leur seul instinct, et que par conséquent la seule omission de les détuire ne le rend pas responsable du dommage qu'ils causent aux champs d'autrui ;

Attendu que s'il est insinué, il n'est pas démontré par Chrétien à qui incombait la preuve de ce fait, que Archdeacon; adjudicataire du droit de chasse, ait, par son fait, attiré dans la forêt d'Amboise les animaux qui ont causé dommage à ses récoltes, ni qu'il ait cherché à les y fixer ou multiplier pour le plaisir de la chasse;

Attendu que ces animaux ne sont en aucune façon sous sa garde (art. 1385 du C. Nap.), et qu'ils sont naturellement venus s'installer dans la forêt d'Amboise;

Attendu que, s'il est de jurisprudence que le propriétaire est responsable des dégâts occasionnés par les lapins, par la raison que le lapin est un animal très-casanier, cette doctrine ne saurait s'appliquer aux cerfs, biches, chevreuil, loups et sangliers, tous animaux nomades et seuls animaux auxquels Chrétien attribue les dommages dont il aurait à souffrir;

Attendu que de tout ce qui précède, il résulte que Archdeacon ne saurait ètre responsable du dommage causé aux récoltes de Chrétien, par les biches, cerfs, loups, sangliers ou chevreuils qui peuvent se trouver dans la forêt d'Amboise, Chrétien n'ayant en aucune façon établi que Archdeacon aurait pratiqué des mancœuvres quelconques pour fixer ou multiplier dans cette forêt ces animaux qui auraient pu s'y réfugier accidentellement ou par leur seul instinct;

Dit qu'il a été mal jugé et décharge Archdeacon des condamnations contre lui prononcées.

Du 17 décembre 1861.

LÉGISLATION ET JURISPRUdence.

No 169. CIRCULaire de l'admin. des forêts, no 833.- 8 mai 1863.

Produits forestiers domaniaux, prix, encaissement, receveurs
des domaines.

Nouvelle nomenclature des produits forestiers domaniaux dont le prix
doit être versé à la caisse des receveurs des domaines.

Monsieur le conservateur, d'après les règlements en vigueur, le recouvrement des produits forestiers domaniaux a lieu ainsi qu'il suit :

Les receveurs généraux perçoivent le prix de vente: 1° des coupes ordinaires ou extraordinaires vendues sur pied; 2° des bois vendus après façonnage ou provenant d'élagages, essartements, chablis, lorsque l'estimation de chaque lot est égale ou supérieure à 500 francs.

Lorsque l'estimation des produits de cette seconde catégorie est inférieure à 500 francs, le recouvrement du prix de vente est effectué par les receveurs des domaines chargés, en outre, d'encaisser toutes les autres recettes attribuées au Trésor à raison de la gestion des forêts et comprises sous la dénomination générale de menus produits. (Voir circ. du 1er juin 1840, no 477.) L'intervention des receveurs généraux, nécessaire dans les ventes auxquelles le grand commerce prend regulierement part, n'a pas paru utile lorsqu'il s'agit de ventes de bois façonnés, chablis et autres produits accidentels. la semblé préférable de faire verser le produit de ces dernières ventes à la caisse des receveurs des domaines, quel que soit le montant de l'estimation des lots, excepté, toutefois, dans le cas où une exploitation accidentelle serait de nature à modifier l'assiette des coupes annuelles.

Dans ce cas, le prix devrait être recouvré par le receveur général.

Ces dispositions nouvelles ont fait l'objet d'un arrêté rendu sur ma proposition, par S. Exc. M. le ministre des finances (le 31 mars 1863) et dont je vous adresse ci-joint copie.

Les termes de cet arrêté sont assez explicites pour qu'il paraisse inutile d'en interpréter le sens. S'il arrivait toutefois que dans la pratique quelque doute s'élevât à cet égard, vous auriez à m'en référer immédiatement. cevez, etc.

Du 8 mai 1863.

Signé: H. VICAIRE.

Arrêté ministériel du 31 mars 1863.

Re

Au nom de l'Empereur, le Ministre secrétaire d'Etat au département des finances, arrèle:

ART. 1er. - A partir du 1er juillet 1863, seront versés directement à la caisse des receveurs des domaines, quel que soit le montant de l'estimation des

lots :

1o Le produit des coupes vendues dans les forêts domaniales par unité de marchandises ou aprés façonnage;

2o Le prix de vente des bois provenant des exploitations accidentelles ; 3° Le prix de tous les menus produits spécifiés dans l'article 1er de l'arrêté du 22 juin 1838 (1).

ART. 2. Lorsqu'une exploitation accidentelle sera, par son importance, de nature à modifier l'assiette des coupes annuelles, elle sera portée sur l'état d'assiette ordinaire ou sur un état supplémentaire, et le prix en sera recouvré par le receveur général.

(1) A partir du 1er juillet 1863, le prix des produits accessoires, vendus par adjudication, sera payé au bureau des domaines du lieu de l'adjudication. (Decis. min. du 26 juin 1863.)

RÉPERT. De législ. forest.

JUILLET 1863.

T. 1.-21

ART. 3. - Il n'est rien innové quant au recouvrement des produits des coupes ordinaires ou extraordinaires vendues sur pied.

ART. 4. Le présent arrêté sera déposé au secrétariat général, pour être notifié à qui de droit.

Paris, le 31 mars 1863.

Signé : ACHILLE FOULD.

N° 170. CIRCULAIRE DE L'ADMIN. DES FORÊTS, no 94.-18 mai 1863.

Brigadiers forestiers communaux, avancement, conditions. Conditions dans lesquelles les brigadiers forestiers communaux sont admissibles à concourir pour le grade de garde général adjoint (1).

Monsieur le conservateur, aux termes des règlements, le grade de brigadier domanial dans le service actif ne peut être conféré qu'aux gardes de ce service ayant au moins deux ans d'exercice, ou aux brigadiers sédentaires après quatre ans passés dans les bureaux.

Ces dispositions sont applicables aux préposés du service communal.

S'il en était autrement, ce dernier service donnerait accès au grade de garde général adjoint plus facilement que le service domanial, ce qui serait contraire à la fois à l'équité et aux exigences d'un bon recrutement.

Je vous préviens, en conséquence, qu'à l'avenir je n'admettrai à concourir pour le grade de garde général adjoint que ceux des brigadiers communaux qui auraient été nommés à ce grade dans les conditions imposées aux préposés du service domanial.

Je vous invite à porter les dispositions qui précèdent à la connaissance des agents et préposés sous vos ordres et à en assurer l'exécution en ce qui vous concerne. Recevez, etc.

Du 18 mai 1863.

Signé H. VICAIRE.

N° 171. CIRCULAIRE DE L'ADMIN. DES FORÊTS, no 834.. - 19 mai 1863.

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Etat d'assiette, rédaction, nouvelles formules.

Envoi de nouvelles formules pour la rédaction des états d'assiette.

Monsieur le conservateur, la rédaction, la préparation et l'envoi des états d'assiette m'ont paru susceptibles de quelques simplifications indiquées par l'expérience, et qui auront pour résultat de diminuer les écritures que comportent ces documents.

Les intitulés des colonnes et les annotations consignées sur les nouvelles formules que je vous adresse, et qui sont destinées à remplacer les formules prescrites par la circulaire no 641 bis, indiquent les changements adoptés par I'Administration. Toutefois, il m'a paru utile d'accompaguer de quelques explications l'envoi de ces nouvelles formules.

BOIS DOMANIAUX.

Les colonnes 1 à 12 de l'ancienne formule n'ont subi aucune modification, si ce n'est la colonne 6, où l'on a introduit le mot massif, daus le but de permettre la réunion, sous une seule dénomination, des cantons formant une

(1) Voir la circulaire du 21 décembre 1858, no 774, portant que les brigadiers forestiers communaux sont admis à concourir, avec les brigadiers domaniaus, pour le grade de garde général adjoint.

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