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» Il n'y a aucun changement au premier paragraphe, sur lequel cependant nous adoptons comme éclaircissement, quant à la troisième disposition, la demande de M. Buzot relative au droit de faire grâce ou de commuer les peines prononcées. Il nous a paru que ce ne serait pas là le lieu d'employer cette disposition, mais au titre du pouvoir judiciaire, où l'on traite du mode d'exercer la justice criminelle, après avoir dit qu'en matière criminelle on ne peut être accusé que par jurés, qu'on ne peut être jugé que par jurés, etc. Si I'Assemblée se détermine à rétablir cette proposition, ce serait là où il faudrait ajouter l'abnégation du droit de faire grâce; ainsi rien n'est préjugé, et cela n'empêche pas que l'Assemblée ne puisse décréter le titre tel qu'il est, comme ne contenant que les principes généraux.

(M. Thouret fait lecture du titre Ier amendé.)

» Dans la première disposition du second paragraphe nous avons retiré le mot accusé, parce qu'il aurait fallu aussi ajouter le mot jugé; mais comme il n'est question là que de la liberté matérielle et physique d'aller, et d'anéantir les obstacles également physiques et matériels qui pourraient nuire à cette liberté-là; comme l'ordre des accusations et des jugemens est une autre série d'idées qui se rattache nécessairement au pouvoir judiciaire, c'est là que nous nous proposonsd'ajouter le mode d'accusation. Ensuite, au commencement du dernier alinéa de ce paragraphe, nous vous proposons, messieurs, cette rédaction :

<< Le pouvoir législatif ne pourra faire aucunes lois qui » portent atteinte et mettent obstacle à l'exercice des droits >> naturels et civils consignés dans le présent titre et garantis par la constitution; mais comme la liberté ne consiste, etc. » (La suite comme au projet; voyez plus haut, page 22.)

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» Par là il est parfaitement clair que le pouvoir législatif ne peut jamais empêcher l'acte d'imprimer; par conséquent la liberté de la presse reste tout entière, en ce sens que nul ne peut être en aucun cas empêché par aucune loi de livrer son manuscrit à la presse.

C'est sur ces paragraphes que je prie M. le président d'ouvrir la délibération. »

M. Thouret avait répondu et satisfait aux principales objections de MM. Buzot et Pétion; on remit aux voix le titre Ier, article par article. Aux amendemens présentés par les comités et accueillis par l'Assemblée la discussion en fit joindre quelques autres non moins nécessaires, et qu'on adopta sans opposition: un de ces amendemens, très important puisqu'il avait pour objet de fortifier le crédit national, est dû à M. Liancourt. Le projet portait:

« Les biens qui ont été ci-devant destinés à des services d'utilité publique appartiennent à la nation; ceux qui étaient affectés aux dépenses du culte sont à sà disposition.

D

M. Larochefoucault-Liancourt. « Il m'a paru dans la rédaction de cet article qu'on faisait entre les services d'utilité publiquè et les services du culte une différence qui me semble he devoir pas exister. On dit que les biens ci-devant destinés à des services d'utilité publique appartiennent à la nation; que ceux qui avaient été destinés au culte sont à sa disposition... (1) Je ne vois aucune raison de cette différence : tous appartiennent à la nation, et tous sont également à sa disposition. (Applaudissemens.) D'ailleurs je pense que la disposition de cet article ne doit pas être circonscrite au passé; sans doute vous ne consacrerez plus à l'avenir l'usage des fondations perpétuelles; vous penserez qu'il n'appartient à aucun homme de prescrire à la société un usage perpétuel tel établissement excellent aujourd'hui peut devenir en cent ans beaucoup moins utile ou même nuisible; ainsi, toutes les fois que des biens quelconques sont destinés à l'utilité publique, la société doit se réserver le droit d'en diriger l'usage pour la plus grande utilité publique. En conséquence voici la rédaction que je propose':

<< Les biens destinés aux dépenses du culte et à tous services d'utilité publique appartiennent à la nation, et sont dans tous les temps à sa disposition. » (Applaudissemens.)

(1) Foyez, tome jer, la discussion dont le résultat fut de mettre les biens ecclésiastiques à la disposition de la nation. (Decret du novembre 1789. )

M. Thouret lui-même applaudit à cette rédaction en avouant qu'elle exprimait parfaitement l'opinion des comités, au nom desquels il proposa d'ajouter :

« La Constitution garantit les aliénations qui ont été ou qui seront faites suivant les formes établies par la loi..

L'Assemblée adopta ces dispositions, et le titre des garanties, paraissant être enfin aussi complet que possible, fut décrété le même jour, 9 août 1791, tel qu'il existe dans la Constitution. (Elle est imprimée dans ce volume.)

SUR LE TITRE II.

De la division du royaume et de l'état des citoyens.

Ce titre fut presque entièrement adopté selon la rédaction du projet; voici les seuls amendemens : L'article er était ainsi conçu :

La France est divisée en quatre-vingt-trois départemens, chaque département en districts, chaque district en cantons. »

royaume vous

M. Rabaut-Saint-Etienne. (Séance du 9.) « Dans les décrets constitutionnels relatifs à la division du avez tout rapporté au principe d'unité qui doit assurer la stabilité d'un empire; le royaume y est toujours représenté comme une chose une. Afin qu'on ne puisse jamais trouver dans la Constitution d'argument en faveur d'une subdivision en république fédérative, je demande que cet article soit rédigé en ces termes :

Le royaume est un et indivisible; son territoire est distribué en quatre-vingt-trois départemens, etc. » (Adopté.)

Sur la demande de supprimer l'énonciation du nombre des départemens M. Thouret répondit :

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Vous avez décrété que le royaume était distribué en quatre-vingt-trois départemens; il faut que cette division soit constitutionnelle, bien entendu qu'elle est relative à l'état actuel du royaume.

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Les comités avaient pensé que le nombre de quatre

vingt-trois départemens pourrait être augmenté ou réduit dans le cas où le territoire du royaume serait lui-même accru ou diminué; mais après des réflexions plus profondes les comités se sont convaincus que cette disposition manquait de convenance d'une part elle avait l'air d'annoncer des conquêtes, auxquelles par la Constitution même la nation a renoncé; d'un autre côté elle semblait prévoir d'une manière peu agréable la possibilité de la diminution du territoire français. On doit sentir suffisamment que c'est l'état actuel du territoire qui a déterminé le nombre des départemens: si par des événemens possibles, mais peu probables pourtant, le territoire français venait à augmenter de manière qu'il y eût occasion de faire plus de départemens, ou à souffrir par la perte du territoire actuel une diminution sensible, cela est suffisamment sous-entendu. >>

des

L'article 6 exprime les circonstances par lesquelles se perd la qualité de citoyen français; le dernier paragraphe de cet article portait :

4o. Par l'affiliation à tout ordre ou corps étranger qui supposerait preuves

de noblesse.»

M. Ræderer. (Séance du 10.) « Je demande qu'aux mots qui supposerait des preuves de noblesse on ajoute ceux-ci : ou des distinctions de naissance ou des vœux religieux. Il ne suffit pas d'interdire les preuves de noblesse, et voici pourquoi il faut toujours employer les mots distinction de naissance; c'est qu'on peut introduire une noblesse sans lui en donner le nom, et que par conséquent il faut un mot qui nous préserve de ce danger-là. Je ferai d'ailleurs observer que c'est le mot employé dans le décret relatif à la noblesse, et qui a été consacré hier par mon amendement. » (Voyez plus haut, page 21.):

Ce quatrième paragraphe de l'article 6 fut ainsi rédigé et adopté :

‹ 4°. Par l'affiliation à tout ordre de chevalerie étranger ou à toute corporation étrangère qui supposerait soit des preuves de noblesse, soit des distinctions de naissance, ou qui exigerait des vœux religieux.

A l'article 2 M. Tronchet avait proposé et fait adopter un amendement qui fut presque aussitôt retiré, sur les observations de MM. Duport et Thouret. Voici cet amendement :

« Les enfans nés en France de parens inconnus auront droit de cité. »

M. Duport.« L'Assemblée veut que quand un homme est né en France de parens étrangers cet homme y ait fixé sa résidence pour jouir des droits de citoyen français; cependant, d'après l'amendement qui vient d'être adopté, si deux étrangers passaient un moment en France, qu'ils y abandonnassent un enfant, et que cet enfant, né de parens inconnus, passât en pays étranger, au terme de cet amendement, quoiqu'il ne fût pas résidant dans le royaume, mais parce qu'il y serait né, et que ses parens seraient inconnus, il y aurait droit de cité! L'Assemblée ne peut pas avoir voulu décréter des dispositions contradictoires. »

M. Thouret. « Il est impossible d'accorder au fils d'une femme mariée le droit de cité par sa mère, car alors il aurait deux cités. Par exemple, si son père était Anglais, en vertu du droit qu'il tiendrait de sa mère française il viendrait dans les assemblées politiques de France, et s'il n'obtenait pas l'élection il retournerait en Angleterre pour y jouir des droits de son père. Si sa mère n'est pas mariée l'homme qui voudra exercer les droits de citoyen, quels que soient son père et sa mère, se présentera avec son extrait baptistaire et la preuve de sa résidence; il dira : je suis né en France; j'y réside.... Peu importe que son père soit étranger ou Français, car il est l'un ou l'autre, Je conclus à ce que l'amendement soit retiré »

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M. Prieur. « Hé bien, si vous retirez l'amendement de M. Tronchet vous verrez que dans les assemblées on opposera votre procès-verbal aux bâtards. »

M. Thouret. « Hé bien, votre procès-verbal dira que les bâtards ne peuvent souffrir aucune difficulté sur leur état, fils sont nés et domiciliés en France. »:

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