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LIV. V.

faut de légalisation ne peut être qu'un obsta- ¡ que nous attribuerions aux juges non pas cle momentané. (Voy. la question suivante.) le devoir, mais seulement la faculté de surTel est l'avis de Boitard, sur l'art. 547. seoir, en pareil cas, à l'exécution, selon qu'ils auraient ou non de vrais motifs de soupçon.

Néanmoins, en vertu des dispositions spéciales et exceptionnelles de l'art. 7 de l'arrêté du 8 vent. an XII, et de celui du 8 janv. 1815, la cour de cassation a décidé, le 10 mai 1825, que les actes provenant de France, ou des pays étrangers doivent être légalisés à la Gua- | deloupe par l'autorité compétente, avant qu'on puisse en faire un usage public quelconque dans cette colonie.

Au reste, la formalité de la légalisation, telle qu'elle se pratique en France, n'est, dans tous les cas, applicable qu'aux actes des notaires. Quant aux jugements, la cour de Turin, dans ses observations sur le Code de procédure, avait demandé que, pour être exécutés hors du ressort du tribunal qui les aurait rendus, ils fussent légalisés par le président. Cette demande n'a pas été accueillie.

Voy. notre Quest. 2198, § 4, no 2.] 1903. Mais si l'exécution n'est pas nulle, le tribunal ne doit-il pas du moins la suspendre jusqu'à ce que la formalité de la légalisation soit remplie ?

On ne pourrait donc pas opposer le défaut de légalisation, sous prétexte que cette formalité n'aurait été remplie que depuis le commencement des poursuites; car, n'étant pas destinée à donner l'authenticité, mais seulement à certifier une authenticité préexistante, la légalisation n'est point nécessaire à l'instant où on commence à faire usage de l'acte; elle ne le devient que lorsque la contestation sur la vérité de la signature est soulevée.] 1904. Y aurait-il nullité de l'exécution faite sur une grosse qui ne serait pas revêtue du sceau du notaire, ainsi que le prescrit l'art. 27 de la loi du 25 ventôse?

Non, parce que cet article ne prononce encore aucune peine contre l'omission de cette formalité. (Toullier, ubi suprà.)

[Cependant deux arrêts, l'un de la cour de Rouen, 4 fév. 1819 (Sirey, t. 19, p. 223), l'autre de la cour d'Amiens, 21 nov. 1821, ont déclaré nulles des poursuites d'exécution, sur le fondement que le jugement en vertu duquel on les exerçait, n'était pas revêtu du sceau du tri

Ces arrêts se fondent sur la loi du 21 pluv. an XII, qui, dans la formule qu'elle indiquait pour l'intitulé et la clôture des jugements, mentionnait l'apposition du sceau. Mais l'article 141 de la loi du 28 flor. an XII ayant tracé une formule destinée à remplacer celle-là, et dans laquelle la formalité du sceau est supprimée, il est clair que la disposition d'où on voudrait en faire résulter la nécessité se trouve abrogée.

C'est l'avis bien prononcé de Toullier: « Le » tribunal, dit-il, devrait suspendre et ordon»ner, avant faire droit, et toutes choses de-bunal qui l'avait rendu. meurant en état, que le saisissant rapportât » un acte légalisé, faute de quoi la saisie serait » rejetée. » Nous ne voyons pas que l'arrêt cidessus rapporté s'oppose à ce que l'on admette ce tempérament, parce que, dans l'espèce, la partie n'avait conclu qu'à la nullité, sans demander subsidiairement la suspension des poursuites; mais nous distinguerons, entre le cas où la partie qui demanderait le sursis aurait figuré dans l'acte et n'en contesterait ni la | réalité ni la sincérité, et celui où il s'agirait Si donc la loi du 6 pluv. an XIII, postéd'exécuter contre un tiers, par exemple dans rieure aux deux autres, détermine la forme du l'espèce de l'art. 2138, C. civ. Dans le premier sceau de l'État et de ceux des diverses autoricas, nous pensons qu'il ne serait pas juste d'ac- tés publiques, et si d'autres dispositions ont corder un sursis à une personne qui ne peut été successivement rendues pour changer ou raisonnablement contester la signature du no- modifier cette forme, il ne s'ensuit pas que taire; dans le second, au contraire, le tiers, l'emploi du sceau soit essentiel à l'authenticité qui n'est pas obligé de la connaître, doit ob- ou à la force exécutoire des actes. C'est seuletenir la suspension jusqu'à ce qu'il lui soitment une mesure d'utilité publique destinée à certifié par la légalisation que l'acte est vérita- augmenter la sécurité, mais dont l'omission, blement l'ouvrage d'un notaire compétent; au- tout en pouvant rendre suspect l'acte qui en trement la disposition de l'art. 28 de la loi du est entaché, ne le vicie pas nécessairement. 23 ventôse deviendrait absolument inutile.

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C'est l'opinion de Thomine, no 601, sanctionnée par un arrêt de la cour de Lyon, 7 mai 1825 (Sirey, t. 25, p. 500), qui contient une décision diamétralement opposée à celle des cours de Rouen et d'Amiens.

[Et comme il ne faudrait pas que cette prétendue ignorance de la signature du notaire devint la source de moyens dilatoires et peu sérieux, nous pensons que c'est au tribunal saisi de la difficulté à examiner s'il y a réellement lieu de douter de la sincérité de cette signature, et si, indépendamment de la légalisation, elle n'est pas suffisamment démontrée ou connue par d'autres circonstances. En sorteront une mainlevée, une radiation d'in

Comme pour la Quest. 1905, le tribunal aura le droit d'ordonner un sursis.]

ART. 548. Les jugements qui prononce

scription hypothécaire, un payement ou quelque autre chose à faire par un tiers ou à sa charge, ne seront exécutoires par les tiers ou contre eux, même après les délais de l'opposition ou de l'appel, que sur le certificat de l'avoué de la partie poursuivante, contenant la date de la signification du jugement faite au domicile de la partie condamnée, et sur l'attestation du greffier constatant qu'il n'existe contre le jugement ni opposition ni appel.

ART. 549. A cet effet, l'avoué de l'appelant fera mention de l'appel, dans la forme et sur le registre prescrit par l'art. 163.

ART. 550. Sur le certificat qu'il n'existe aucune opposition ni appel sur ce registre, les séquestres, conservateurs, et tous autres, seront tenus de satisfaire au jugement.

Tarif, 90.[Tar. rais., nos 92, 93, 94 et 95.] Ord. de 1667, tit. XXXV, art. 5.-C. proc., art. 90, 163, 164. [Locré, t. 10, p. 60, 89, 109, no 15; p. 189, no 18; p. 208, no 13, et p. 260 (1).] — (Voy. FORMULES 444, 445 et 446.)

CCCCXXXIX. La loi présente ici une heureuse innovation, par l'établissement du registre qui se tient au greffe de chaque tribunal, pour l'inscription des oppositions et des appels. Elle offre aux tiers qui doivent exécuter des jugements un moyen régulier et légal de reconnaître s'ils peuvent avec sécurité effectuer cette exécution.

Autrefois, et lorsque les délais pour l'appel et l'opposition étaient si vaguement prolongés, un procureur, et depuis un avoué, n'ayant à cet égard aucun caractère légal, concourait cependant à l'exécution par un certificat constatant qu'il n'était parvenu à sa connaissance aucune opposition ou aucun appel. Ce certificat pouvait être donné par erreur; il pouvait être donné par la mauvaise foi; et, dans tous les cas, il laissait souvent le tiers obligé d'exécuter le jugement dans une grave inquiétude.

Dans notre Code actuel, cette partie de l'exécution, organisée avec simplicité, offre au tiers, comme à l'avoué, une garantie contre l'erreur ou la mauvaise foi. Nous avons vu, t. 2, p. 142, que l'art. 165 ordonne qu'il soit

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tenu au greffe un registre, sur lequel l'avoué de l'opposant fait mention sommaire de l'opposition; et, d'après l'art. 164, aucun jugement par défaut ne peut être exécuté, à l'égard d'un tiers, que sur le certificat du greffier constatant qu'il n'y a aucune opposition portée sur le registre. Cette théorie reçoit, par l'art. 548, la même application pour l'appel. En vérifiant le registre d'inscription dont il ordonne la tenue, chacun peut y apprendre si le jugement qu'il veut exécuter ou faire exécuter a été ou non attaqué. Il ne pourra plus y avoir d'incertitude sur un point de fait, dont la connaissance pouvait autrefois être dérobée au tiers, par la malversation de l'officier ministériel.

1905. Qu'est-ce que l'on entend par TIERS

dans l'art. 548?

On entend toutes les personnes autres que celles qui sont intéressées dans l'instance sur laquelle le jugement aurait été rendu, et qui, cependant, à raison de leur qualité ou de leurs fonctions, sont tenues de concourir à son exécution.

[Cela est évident.]

1906. Est-il nécessaire, dans le cas de l'article 548, d'attendre l'expiration du délai de l'appel, pour mettre à exécution un jugement contradictoire non encore passé en force de chose jugée ? [Quid du délai d'opposition?]

L'art. 548 porte que les jugements qui prononcent une mainlevée, une radiation d'inscription hypothécaire, un payement ou quelque autre chose à faire par un tiers ou à sa charge, ne sont exécutoires par le tiers ou contre eux, même après le délai de l'opposition ou de l'appel, que sur le certificat de l'avoué de la partie poursuivante, contenant la date de la signification du jugement faite au domicile de la partie condamnée, et sur l'attestation du greffier, constatant qu'il n'existe contre le jugement ni opposition ni appel.

C'est sur ces mots, même après les délais de l'opposition ou de l'appel, que s'est élevée la question que nous avons à examiner, et sur la solution de laquelle les jurisconsultes sont partagés,

Suivant les auteurs du Praticien, t. 4, p. 76, il semblerait que le jugement, pour être

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JURISPRUDENCE.

[1o Les jugements qui ordonnent les remboursements d'une consignation judiciaire doivent être rendus avec les parties qui peuvent y avoir intérêt; ceux qui ne l'auraient été que sur simple requête n'obligent point les préposés de la caisse d'amortissement à les exécuter; et il faut, d'ailleurs, que toutes les formalités prescrites par l'art. 548 soient observées (circul. du ministre de la justice, du 1er sept. 1812);

2o Le fait de prendre, en vertu d'un jugement par défaut, une inscription hypothécaire contre celui à la charge de qui on l'a obtenu, ne peut être considéré comme une exécution à l'égard d'un tiers (Bruxelles, 14 juin 1828);

50 li ne peut être fait aucun payement par le trésor, en exécution d'un jugement attaqué par la voie de cassation, sans une caution préalable. (D&c. du 16 juill. 1793.)]

exécutoire à l'égard d'un tiers, devrait avoir acquis l'autorité de la chose jugée contre la partie; que ce serait une conséquence nécessaire de ce que la loi exige un certificat délivré par l'avoué.

On trouve dans la Biblioth. du barreau, 1re part., t. 3, p. 29, la même question traitée par Mailher, et ce jurisconsulte la résout comme les auteurs du Praticien.

Enfin Hautefeuille, p. 514, maintient que tant que les délais pour se pourvoir contre le jugement ne sont pas expirés, le tiers ne peut être contraint à l'exécution, parce que l'exécution est suspendue, ou plutôt, parce que le jugement n'est pas encore exécutoire; en sorte que ce n'est qu'après l'expiration de ces délais, et sur la signification des deux actes dont parle l'art. 548, que l'exécution devient forcée. Sans cela, ajoute cet auteur, tout ce que le tiers aurait fait serait frappé de nullité, si le jugement par lui exécuté prématurément venait à être réformé en définitive.

Pigeau, Proc. civ., vo Hypoth., § 11, no 6; Demiau, p. 377; Coffinières, J. Av., t. 12, p. 527, estiment au contraire que ces mots, même après les délais de l'opposition ou de l'appel, prouvent que les jugements sont exécutoires, même avant que les délais de l'opposition ou de l'appel soient expirés. Nous ne répéterons point les autres raisons sur les quelles Pigeau et Coffinières établissent leur opinion. Ce qui nous détermine à l'adopter, c'est qu'elle est conforme à la disposition de l'art. 5 du titre XXVII de l'ord., et que Pigeau, l'un des rédacteurs du Code de procédure, certifie que c'est dans le sens de cet article que l'on a entendu rédiger l'art. 548.

Nous ne devons pas dissimuler, néanmoins, qu'il existe un arrêt de la cour de Paris, du 14 mai 1808 (Sirey, t. 8, p. 227; Dalloz, t. 17, p. 529), contraire à l'opinion de Pigeau; mais aussi Coffinières, dans la Jurispr. des cours, au mot Référé, en rapporte un de la cour de Turin, du 16 juill. 1809 qui paraît avoir prononcé dans un autre sens.

[En principe, le délai d'appel n'est point suspensif de l'exécution, ainsi que nous l'avons fait observer sous l'art. 257, Quest. 1005 et suiv. Faut-il en conclure que, pendant ce délai, et jusqu'à l'émission de l'appel, le jugement puisse être exécuté contre les tiers, sauf les conditions exigées par notre article, de même qu'il pourrait l'être contre la partie condamnée elle-même?

Après avoir longtemps réfléchi sur cette question controversée, nous croyons devoir la résoudre négativement, sauf quelques exceptions résultant de la force des choses, sans que néanmoins il faille voir, dans cette solution, une dérogation à la règle générale que nous venons de rappeler.

Ces expressions de l'art. 548, même après

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Mais les raisons qui s'élèvent contre le résultat de cette interprétation nous paraissent si fortes que, ne pouvant nous refuser à voir, dans ces paroles prises à la lettre, le sens qu'on leur attribue, nous sommes forcé de les regarder comme un vice de rédaction.

Voici les quatre principaux motifs que l'on peut invoquer à l'appui de la doctrine que nous embrassons. Les deux premiers, si l'on veut, ne seraient pas déterminants, puisqu'ils sont susceptibles de quelque réfutation; mais nous ne trouvons rien à répondre aux deux autres.

1o L'art. 2157, C. civ., traitant une question analogue, dispose que le conservateur pourra se refuser à rayer une inscription, à moins que le jugement qui l'ordonne ne soit en dernier ressort, ou passé en force de chose jugée.

Ce second membre de phrase, mis en opposition avec le premier, nous semble évidem| ment avoir trait à un jugement qui ne serait plus exposé à être réformé par aucune voie de

recours.

On répond, il est vrai, que cette disposition est spéciale à la radiation d'une inscription; qu'elle ne saurait, par conséquent, être étendue aux autres cas d'exécution par les tiers dont l'art. 548, C. proc. civ., donne l'énumération d'une façon énonciative; qu'au nombre des jugements passés en force de chose jugée, l'art. 5 du titre XXVII de l'ordonnance de 1667, en vigueur lors de la promulgation du Code civil, comprenait ceux dont il n'y a appel; que les délais d'appel et d'opposition étant, sous l'empire de cette ordonnance, d'une longueur démesurée (quelquefois trente ans), on ne peut admettre que l'art. 2157, C. civ., ait voulu qu'ils se fussent entièrement écoulés avant que l'exécution contre les tiers put avoir lieu.

On réfute ces objections, en disant que, toute spéciale qu'elle est au cas d'une radiation d'inscription, la disposition de l'art. 2157 n'en est pas moins propre à nous révéler l'esprit véritable du législateur; qu'en attribuant la force de la chose jugée aux jugements susceptibles d'appel, mais dont il n'y a appel, l'art. 5 du titre XXVII de l'ordonnance de 1667 n'a pu préjuger la question actuelle, puisqu'il

3o L'intention du législateur, lorsqu'il a écrit les art. 163, 164, 548, 549 et 350, a été, sans contredit, d'empêcher qu'aucune exécution de jugements ait lieu, vis-à-vis des tiers, au mépris d'une opposition ou d'un appel qu'ils n'auraient pas pu connaître. Or, il se pourrait que ce but ne fût pas atteint, si l'exécution avait lieu avant l'expiration des délais, moyennant les seules conditions de l'art. 548.

ne s'occupe nullement de l'exécution contre les tiers, mais seulement contre les parties, à l'égard desquelles il est hors de doute, comme le fait observer Rodier dans sa Quest. 1re sur ledit article, que, même pendant les délais de l'appel, les jugements contre lesquels cette voie n'a pas encore été employée ont réellement force de chose jugée, dans ce sens qu'ils sont susceptibles d'exécution; qu'enfin le Code civil devant être suivi, à peu d'intervalle, d'un Code de procédure, il est probable que ses ré-tificat négatif du greffier, il n'existe sur son dacteurs ne se sont point préoccupés d'en concilier les dispositions avec les anciens principes de procédure.

2o L'art. 548, ajoutant en cela aux conditions exigées par les art. 163 et 164 pour l'exécution contre les tiers des jugements par défaut, demande non-seulement un certificat du greffier constatant qu'il n'y a ni opposition ni appel, mais encore un certificat de l'avoué du poursuivant indiquant la DATE de la signification du jugement faite AU DOMICILE de la partie condamnée.

Peut-on attribuer à cette précaution d'autre but que celui de faire connaître au tiers le point de départ du délai, soit de l'opposition, soit de l'appel? Et qu'aurait-il besoin de le connaitre s'il pouvait, sans aucun risque, se soumettre à l'exécution avant l'expiration de ce délai, sous la seule condition que le certificat négatif du greffier lui fût représenté?

On objecte que la connaissance du jour de la signification peut être utile au tiers sous un autre point de vue. L'exécution d'un jugement par défaut n'est pas permise (art. 155), dans la huitaine de sa signification à avoué, s'il y a eu constitution d'avoué; de la signification à partie, dans le cas contraire. Il faut justifier visà-vis du tiers à qui on demande l'exécution de l'expiration de cette huitaine; c'est pour cela qu'il faut lui faire connaître la date de la signification.

Mais, entendue de cette manière, la condition relative au certificat de l'avoué ne serait applicable qu'aux jugements susceptibles d'opposition, et non à ceux qui sont susceptibles d'appel. Dès lors, elle aurait dû être insérée dans l'art. 164, qui s'occupe spécialement des premiers, et non dans l'art. 548, qui s'occupe cumulativement des uns et des autres. D'ailleurs, la huitaine pendant laquelle l'exécution des jugements par défaut est interdite, ayant pour point de départ, tantôt la signification à avoué, tantôt la signification à partie, si le certificat de l'avoué avait eu le but que lui prête l'objection, la loi n'aurait pas exigé qu'il contint précisément et toujours la date de la signification faite au domicile de la partie.

En effet, s'il est vrai qu'au moment du cerregistre aucune mention, soit d'opposition, soit d'appel, et si l'on ne doit pas avoir égard à la négligence de la partie, qui, ayant fait faire ces actes, a oublié d'en porter la mention au greffe, ne se peut-il pas aussi que l'opposition et l'appel aient précédé de si peu d'instants l'obtention du certificat que le temps ait manqué pour les faire transcrire dans l'intervalle? Ne se peut-il pas qu'ils soient exactement contemporains du certificat, ou même que, lui étant postérieurs, ils précèdent néanmoins le moment de sa représentation au tiers qui doit procéder à l'exécution? Dès lors, on n'aura aucun reproche à faire à la partie à qui on n'aura pas laissé le temps utile pour faire ses diligences (1), ni au greffier dont le certificat aura été sincère, au moment de sa délivrance. Mais il n'en sera pas moins vrai qu'un appel ou une opposition existe avant que l'exécution soit commencée; que, peut-être, si l'on requérait un second ou un troisième certificat du greffier, celui-ci les mentionnerait, et qu'enfin si on procède à l'exécution sur les premiers renseignements, seuls exigés par la loi, on s'exposera à le faire au mépris de l'effet sus pensif d'une opposition ou d'un appel déjà interjetés régulièrement.

Il n'y a pas d'autre moyen, pour le tiers, d'éviter cet inconvénient, de se soustraire à cette chance, que d'attendre, avant d'exécuter, l'expiration des délais; car le certificat du greffier donné avant l'expiration des délais ne peut répondre que du passé, et laisse dans l'incertitude l'intervalle qui s'écoule entre sa délivrance et l'exécution; donné, au contraire, après l'expiration, il répondra tout à la fois et du passé et de l'avenir, puisqu'il n'aura derrière lui qu'un temps pendant lequel l'appel et l'opposition seront devenus pour jamais impossibles.

C'est donc en appliquant à la question actuelle ce principe que l'opposition et l'appel sont suspensifs, que nous en venons à établir qu'à l'égard du tiers, ce sont en réalité, quoique indirectement, les délais, soit de l'opposition, soit de l'appel, qui produisent la suspension et en règlent l'étendue, parce que tant

(1) [Par exemple, si le certificat a été requis du gref- | l'appel ait été relevé le second jour, et le certificat refer le jour même de la signification du jugement, que présenté au tiers le troisième jour.]

LIV. V.

qu'ils durent, il peut survenir, à l'insu du tiers, un appel ou une opposition suspensifs, dont il doit respecter l'effet éventuel ou possible.

Il nous paraît donc que le droit du tiers consiste non-seulement à attendre l'expiration des délais, quoiqu'on lui fasse les justifications prescrites par l'art. 548, mais encore à ne regarder le certificat du greffier comme suffisant, que lorsqu'il porte une date postérieure à cette même expiration (1).

4o Au reste, voici une observation qui nous semble ne pas laisser le moindre doute sur la question.

Le projet primitif du Code ne contenait point les dispositions que nous y lisons aujourd'hui, sous les art. 548, 549 et 550. (Voy. la séance du conseil d'Etat du 5 prair. an XIII; Locré, t. 10, p. 60.) Elles y furent insérées dans la séance du 10 messidor an XIII (Locré, t. 10, p. 89), sous les art. 575, 576, 577, qui correspondent, sauf quelques légères modifications subies depuis, aux articles actuels 548, 549, 550. Ce fut en cet état que le projet fut soumis à la section du tribunat. Voici les observations que fit celte section. (Locré, t. 10, p. 109 et 110.)

« L'art. 575 (548 du Code actuel) (2), veut que l'exécution ne puisse avoir lieu à l'égard des tiers, pendant la durée du délai fixé | pour l'appel. La section ne saurait partager | cet avis. La loi donne un délai pour appeler, c'est-à-dire qu'on n'est non recevable à appeler que lorsque le délai entier est écoulé. Mais celui qui a obtenu le jugement n'est pas obligé, pour l'exécuter, d'attendre que le délai entier soit expiré; si donc celui qui a obtenu le jugement est autorisé à l'exécuter directement contre la partie condamnée, même par voie d'emprisonnement de sa personne, pourquoi lui serait-il interdit de l'exécuter sous le rapport du tiers?

» Un exemple éclairera la question.

» Pierre a formé une saisie-arrêt dans les mains de Jacques au préjudice de Jean; Jean a obtenu contre Pierre un jugement qui le déboute de sa saisie-arrèt, avec dépens, dommages et intérêts. Après la huitaine, à dater du jugement, Jean peut exécuter contre Pierre,

(1) [Si le tiers exécutait sans exiger les garanties de l'art. 548, et que le jugement fût plus tard réformé, il serait responsable vis-à-vis de la partie qui aurait obLenu la réformation.

Mais si, après cette exécution imprudente, le jugement était confirmé ou acquiescé, etc., on ne pourrait arguer l'exécution de nullité et exercer un recours contre le tiers. Il lui était libre de s'exposer, d'exécuter à ses risques et périls : l'événement a justifié sa démarche. (Brux., cass., 27 juin 1836.)]

(2) [Voici comment il était conçu :

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pour les dépens et les dommages et intérêts: a la vérité, Pierre peut faire appel; mais il se tait, l'exécution aura son cours. Serait-il done possible que si Pierre garde le silence, Jean ne pût se présenter à Jacques pour recevoir avant que le délai de l'appel fût expiré?

» C'est à Pierre, qui a la faculté de faire appel, à pourvoir par lui-même à ce que Jacques ne se dessaisisse pas; et pour cela il faut deux choses: 1° que Pierre soit appelant, 2o qu'il ait dénoncé son appel à Jacques.

» La section pense que, de droit, le tiers ne peut être responsable de l'exécution qu'autant que l'appelant iui aurait dénoncé son appel avant cette même exécution, néanmoins, pour trancher toute difficulté, la section propose de le dire expressément; de cette manière, les parties condamnées seront averties de ce qu'elles ont à faire pour empêcher l'exécution.

» Mais la section croit que toutes les vues seront remplies si l'on ajoute à l'art. 157 un paragraphe qui serait ainsi conçu :

» Si le jugement par défaut est sujet à l'ap»pel, le tiers ne sera responsable de l'exécu» tion qu'il aura faite du jugement que dans le » cas ou l'appelant lui aurait dénoncé son appel. »

La section du tribunat entendait done l'article 575 du projet, comme nous entendons l'art. 548 du Code, qui n'en est que la reproduction. Elle trouvait ce système vicieux, et en demandait le redressement. Il ne fut pas accordé. Donc le législateur, bien averti de l'interprétation que l'on donnait à ses paroles, a voulu la maintenir et la consacrer.

L'opinion contraire avait été adoptée, mais avant le Code de procédure, par une décision du grand juge du 10 therm. an XI, et une instruction de la régie du 21 fruct. an xi, en matière de radiation d'inscription. Il en devait être ainsi puisqu'on était alors sous l'empire de la loi du 11 brum. an vII, qui portait, art. 25: Les inscriptions sont radiées sur la justification du consentement des parties intéressées ou du jugement EXÉCUTOIRE qui l'aurait ordonné.

Deux arrêts, l'un de la cour de Paris, du 14 fruct. an XII, l'autre de la cour de Bor

ment, ou quelque autre chose à faire par un tiers ou à sa charge, ne seront exécutoires par les tiers ou contre eux, même après les délais de l'opposition ou de l'appel, que sur le certificat de l'avoué de la partie poursuivante, contenant la date de la signification du jugement, faite au domicile de la partie condamnée, et attestation qu'il n'existe contre le jugement ni opposition ni appel. »

On voit que ce projet ne diffère de l'article du Code que dans les derniers mots, en ce qu'il ne dit pas par qui sera délivrée l'attestation de non-opposition ni appel. Mais, relativement à l'objet qui nous ocenpe, au

Les jugements qui prononceront une mainlevée, une radiation d'inscription hypothécaire, un paye- cune différence.]

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