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L'UNIVERS.

HISTOIRE ET DESCRIPTION

DE TOUS LES PEUPLES.

SUITE ET FIN

DE LA RUSSIE

ET

Provinces Russes en Asie.

TYPOGRAPHIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES,

RUE JACOB, No 56.

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ET LES PROVINCES RUSSES EN ASIE,

CIRCASSIE ET GÉORGIE,

PAR M. CÉSAR FAMIN.

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FIRMIN DIDOT FRÈRES, ÉDITEURS,

IMPRIMEURS-LIBRAIRES DE L'INSTITUT DE FRANCE,
RUE JACOB, N° 56.

M DCCC XXXVIII.

AZ 4682

.

BLIOTHEQUE CANTONA
LAUSANNE
UNIVERSITAIRE

DON 51335

:

PAUL 1er.

(1796-1801.) Catherine n'avait rien négligé pour rendre Paul indigne du trône ce prince, croyant désarmer sa mère, avait paru se résigner au rôle qu'elle lui imposait, et il semblait vouloir justifier, par son genre de vie, son exclusion totale des affaires. Cependant le temps de cette espèce d'exil n'avait pas été perdu pour lui: doué d'un esprit juste, et capable des résolutions les plus généreuses, il avait d'abord affecté l'originalité et la brusquerie, comme pour mettre ces qualités sous la sauvegarde de quelques ridicules. Vieilli dans cette contrainte, il avait fini par se les approprier, et ils accompagnaient si naturellement son physique, que l'on ne doutait point qu'ils ne lui fussent naturels. Le jeu singulier des circonstances avait refoulé dans son cœur les plus doux sentiments de la nature : un doute qui l'humiliait planait sur sa naissance; était-il le fils de Pierre III ou de Soltikof? Il s'indignait contre cette dernière supposition, et il est probable que ce fut dans l'intention de la détruire qu'il affectait les manières étranges du feu tsar. Celle qu'il pouvait nommer sa mère le repoussait, et s'emparait, dès leur naissance, des enfants que lui donnait la grande-duchesse. Les favoris de Catherine se plaisaient à l'abreuver d'humiliations; à peine lui laissait-on des moyens suffisants pour soutenir une représentation décente. Le peuple qui l'aimait applaudit à son élévation inattendue; la cour étudia avec anxiété les premiers actes de son règne. Ils surpassèrent l'attente générale; et tandis que le trône corrompt d'ordinaire les princes, on crut un instant que le pouvoir avait opéré dans le caractère du nouveau tsar une révolution favorable. Les mesures qui ouvrirent son règne furent empreintes de modération; on remarqua toutefois qu'elles formaient un contraste calculé avec les entreprises audacieuses du gouvernement précédent. Les nobles, presque tous complices des rigueurs de la mère, n'avaient pas eu le temps de désarmer le ressentiment du fils;

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et, comme étourdis de ce revers subit, ils n'osaient encore saluer ce nouveau règne, ni se flatter que l'empereur oublierait les injures du grand-duc.

Paul interrompit l'exécution d'une levée extraordinaire, rompit le traité de subsides, conclu avec l'Angleterre, suspendit les préparatifs de la guerre contre la France, et rappela des frontières de Perse, l'armée que commandait Valérien Zoubof.

La pénurie du trésor avait forcé Catherine à recourir à des mesures financières dont elle comptait réparer l'effet désastreux par les avantages de ses armes. Elle avait décrété que les monnaies seraient reçues pour une valeur double de celle qu'elles représentaient réellement, et les assignats s'étaient multipliés à un point que, dans leur échange contre du numéraire, on refusait de les recevoir au pair. Paul en fit brûler pour six millions de roubles, à la grande satisfaction du peuple; enfin, pour arrêter le mal à sa source, il prescrivit de grandes économies dans les dépenses de la cour.

A l'instant où les anciens favoris de Catherine s'applaudissaient de la clémence ou de l'oubli du monarque, un acte de solennelle réparation vint leur apprendre que le passé vivait encore dans la mémoire de leur maître. Avant de rendre à Catherine les derniers devoirs, il voulut confondre dans une même cérémonie et l'expiation d'un crime et ce qu'il devait à la mémoire de sa mère. Il se rendit au monastère de Saint-Alexandre-Nevski, où reposaient les restes de Pierre III; là, après avoir considéré dans un sombre recueillement ce tombeau dont la simplicité même éveillait tant de douloureux souvenirs, il arrosa le cercueil de larmes. pieuses, et le fit exposer sur une estrade au milieu de l'église; ensuite on transporta le corps avec celui de l'impératrice dans l'église de la forteresse de Saint-Pétersbourg, à côté des sépultures des tsars. Sur la pierre de leur commun sépulcre, on grava cette inscription: Divisés pendant leur vie, réunis après leur mort. Pour donner à cette cérémonie imposante un carac

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