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d'une subrogation de cette nature, et le tribunal de première instance prononce non moins formellement sur une subrogation de la même nature.

La validité de la cession conventionnelle était contestée par le motif qu'elle aurait dû être stipulée dans la police d'assurance et qu'elle ne l'avait pas été.

Le tribunal adopte ce principe, et comme la compagnie de l'Escaut avait produit sa police qui ne contenait pas cette stipulation, tandis que la compagnie Securitas n'avait pas produit la sienne, elle rejette l'action, quant à la première, et quant à la seconde, lui ordonne de produire un acte ayant date certaine antérieure au sinistre, préjugeant ainsi le rejet si pareil acte n'était pas prodoit.

Dans la réalité, le tribunal rejettait l'action pour l'une et l'autre demanderesses, car aucune n'avait d'autre preuve de cession que la quittance de payement du sinistre contenant cession et non produite alors à défaut d'enregistrement.

Aussi toutes deux ont appelé par les mêmes motifs, et ont produit à l'appui de leur appel la quittance-cession enregistrée depuis le jugement.

C'est donc bien sur cette cession, titre commun des demanderesses,que repose l'action, et c'est en partant de ce fait, comme la Cour d'appel de Gand elle-même, dont d'ailleurs, nous venons de l'observer, l'arrêt n'est pas attaqué de ce chef, que nous devons déterminer la nature des droits qui en sont l'objet.

La seconde difficulté ne peut davantage nous arrêter, parce que, quoi qu'on puisse penser de la justesse du point de départ de cet arrét, il ne change pas la question du litige non plus que ses éléments de solution que l'action ait été intentée à titre d'une cession faite par deux personnes, héritières du créancier originaire, ou qu'elle l'ait été à titre d'une cession faite par une seule, il n'importe : dans le premier cas, la créance, appartenant dans l'origine à une seule personne, s'est d'abord divisée en deux parts, par suite de l'ouverture de la succession du créancier au profit de deux personnes; puis chaque part en deux autres parts, par suite de la cession de chacune d'elles aux deux demanderesses; dans le second cas, elle s'est divisée en deux parts seulement par suite de la cession qui leur en a été faite; dans un cas, le défendeur aura été attrait en justice par les deux demanderesses à raison d'une même créance

divisée en quatre parts, et dans l'autre, à raison de cette créance divisée en deux parts; les quatre parts n'ont point, relativement à la créance, au débiteur et aux acquéreurs, une autre nature que les deux parts; la division comme la subdivision provenant également d'une acquisition faite par plusieurs personnes ont le même effet, une dis tinction d'intérêts résultant de cette acquisition; les droits réclamés en justice de l'un ou de l'autre chef conservent donc aussi la même nature, et en conséquence ni la question du litige ni sa solution ne peuvent subir aucune influence du changement que, suivant les demanderesses, la Cour d'appel de Gand aurait apporté dans les faits de la cause; dans les deux cas il y aura une ou plusieurs actions, selon l'appréciation que l'on fera de l'objet du débat judiciaire engagé entre parties; dans les deux cas cet objet sera le même, une créance divisée entre plusieurs acquéreurs, à raison de laquelle le débiteur est poursuivi; les raisons de décider seront donc les mêmes; nous pouvons donc négliger ce changement réel ou non, pour rechercher quelle est la nature des droits poursuivis en justice par les demanderesses contre le défendeur. Nous l'avons vu par le résumé des circonstances qui y ont donné naissance, ces droits ont leur source dans une seule créance due par un seul débiteur à un seul créancier; mais cette créance s'est partagée entre plusieurs personnes, qui se sont réunies pour agir en payement du tout contre l'unique débiteur primitif, et qui ont un même titre d'action, le titre de la créance et une cession à eux faite, à chacun pour moitié par les deux représentants du titulaire, entre lesquels elle se trouvait aussi divisée par moitié. Légalement parlant, les droits qui résultent de ces circonstances constituent-ils plusieurs créances ou n'en forment-ils qu'une seule divisée entre plusieurs personnes ; la Cour d'appel de Gandy a vu plusieurs créances; nous estimons que c'est là une erreur; qu'en droit il n'y a dans l'espèce qu'une créance appartenant en commun à deux personnes, qui représentent ensemble et au même titre un auteur commun, créancier originaire. La créance en effet est le corrélatif de l'obligation; elle en provient; pour qu'il y ait créance, il faut qu'auparavant une obligation ait été formée, soit par la convention, soit autrement; c'est pour cette raison que les obligations sont dans notre Code civil représentées comme l'une des manières d'acquérir, et que des titres particuliers traitent, non des créances, mais des obligations; là donc où il n'y a qu'une obli

gation, il n'y a qu'une créance, cette créance pourra bien se partager entre plusieurs personnes, mais les différentes parts, étant inséparables de l'obligation, resteront toujours unies par ce lien commun et ne seront en conséquence que les parties d'un tout; elles ne formeront comme auparavant dans la même main qu'une créance; les coïntéressés pourront bien disposer, chacun comme il l'entendra, de la part qu'il y a; chacun pourra même en faire remise au débiteur commun; mais la disposition, de même que la créance, n'ayant de vie que par l'obligation, laissera l'une telle que l'autre l'a faite, elle ne sera en conséquence que la disposition d'une partie d'une seule et même chose, et si cette disposition accorde une remise au débiteur, elle aura pour effet de le libérer de son obligation jusqu'à due concurrence, et par conséquent éteindra non une créance, mais une partie de l'unique créance qui en était l'objet. Ainsi rattaché à son corrélatif nécessaire, le point de savoir s'il y a dans l'espèce une seule créance revient au point de savoir s'il y a une seule obligation; poser cette question, c'est demander si l'espèce nous présente réunis sur le chef du défendeur, les éléments constitutifs d'un seul lien de droit.

Ces éléments, en ce qui concerne les obligations conventionnelles, et il s'agit ici d'une obligation de ce genre, sont le consentement, la capacité, la matière et la cause; dès qu'il y a consentement de deux personnes également capables à l'effet, de la part de l'une, de donner ou de faire au profit de l'autre; dès que ce consentement porte indistinctement sur toutes les parties d'une chose ou d'un fait, et qu'il a une cause qui les embrasse aussi toutes indistinctement, il y a un seul lien de droit d'un contractant à l'autre, il y a une seule obligation; tel est Je résumé des deux premiers chapitres du titre de notre Code des Contrais ou obligations conventionnelles; celle obligation pourra donc être divisible ou indivisible; divisible, elle pourra venir à se diviser ou rester dans son état primitif ou revenir à cet état après s'être divisée, elle n'en sera pas moins une, dans tous les cas, parce que dans tous, ses diverses portions ont des éléments identiques et partant ont un lien de droit identique aussi; c'est ce que suppose d'ailleurs le chapitre de ce titre, qui fait une subdivision parmi les diverses espèces d'obligations, des obligations divisibles et indivisibles, et qui qualifie simplement de parties d'une obligation les effets du partage qui peut s'opérer d'une obligation divisible,

loin d'en faire diverses obligations; c'est ce que confirme en termes précis Pothier en son Traité des obligations, commentaire d'autant plus sûr du titre de notre Code civil sur cette matière, qu'il a été le principal, pour ne pas dire l'unique guide des rédacteurs de ce titre; et son autorité a ici d'autant plus de poids que la section des obligations dividuelles et des obligations individuelles, où il s'en exprime, repose sur l'un des chefs-d'œuvre du célèbre Dumoulin, son Traité de dividuo et individuo, et a comme ce traité son premier fondement dans la loi romaine. « La division de la « dette, dit Pothier, qui se fait par la mort << du créancier ou du débiteur, qui laisse plusieurs héritiers, ne fait pas d'une delle plusieurs dettes, mais elle assigne seule«ment à chacun des héritiers du créancier «< ou du débiteur des portions dans cette « dette, qui n'avait pas de portions aupara«vant, mais qui en était susceptible. C'est « en cela seul que consiste cette division; « il n'y a qu'une seule, dette unum debi· « tum : la loi 9, fï., de pactis, le dit en termes formels. Effectivement les différents « héritiers du créancier ne sont créanciers «que de la dette qui a été contractée en« vers le défunt; les différents héritiers du « débiteur ne sont débiteurs que de celle qui a été contractée par le défunt. Il n'y

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« a donc toujours qu'une dette; mais (et « c'est en cela que consiste la division) cette « dette qui était indivisée et ne contenait « aucune portion tant qu'il n'y avait qu'une « personne qui fut débiteur, et une seule qui fut créancier, se trouve avoir des por «tions et être due par portions soit à chacun « des héritiers du créancier, soit par cha«cun des héritiers du débiteur. (Traité « des obligations, no 319.) Dumoulin, de Dividuo et individuo, part. 2o, no 18, 19, 20 et 21.

Cette hypothèse dont parle Pothier s'est réalisée dans l'espèce où se réunissent tous les éléments constitutifs d'un seul lien de droit et partant d'une seule obligation.

Consentement de donner échangé entre deux personnes également capables; consentement portant de la part du défendeur sur une somme d'argent égale au montant des dommages-intérêts dus par elle en cas d'incendie, consentement embrassant indistinctement toutes les parties de celle somme, consentement qui a pour cause la dation en location d'une maison, cause embrassant comme le consentement toutes les parties de la même somme, auxquelles toutes elle correspond; il y a donc là une seule

obligation et par suite il y a aussi une seule créance.

Cette obligation s'est divisée d'abord entre deux personnes, en vertu de leur titre d'enfants, héritiers de la personne envers laquelle elle a été contractée; elle s'est divisée ensuite entre les deux demanderesses, en vertu d'un titre commun d'acquisition, la quittance du prix de l'assurance contenant cession expresse (cession valable ou non, c'est là une question dont nous n'avons pas à nous occuper, elle tient au fond du litige).

La division qui s'en est opérée a donc bien pu en former diverses portions, mais ce ne sont toujours que les portions d'une seule obligation, elle n'a donc pas pu en former plusieurs obligations; il n'en est pas moins resté après cette division qu'une seule obligation, et par conséquent il n'en est resté non plus qu'une seule créance, il n'a pu en résulter plusieurs.

Telle est donc la nature du droit, à raison duquel le défendeur a été attrait en justice par les deux demanderesses; ce droit consiste en une seule créance; et à ne voir que l'arrêt attaqué, nous pourrions déjà en conclure qu'il n'y a eu qu'une seule action et qu'ainsi elle n'a pu être jugée qu'en premier ressort, car cet arrêt repose sur le principe qu'à une seule créance ou à plusieurs créances distinctes répondent soit une, soit plusieurs demandes ou actions.

Ce principe du reste, que la Cour d'appel de Gand a violé par l'application juridiquement erronée qu'elle en a faite, est vrai et nous conduit à reconnaître qu'il n'a été intenté dans l'espèce qu'une seule action, que la question dont dépend le pourvoi doit être résolue dans ce sens, et que pour l'avoir autrement résolue, la Cour d'appel a contrevenu à la loi des deux degrés de juridiction et à l'article 14 de la loi du 25 mars 1841.

Comme en effet la créance est le corrélatif nécessaire de l'obligation, l'action personnelle est le corrélatif de l'une et de l'autre : droit de poursuivre l'exécution de l'obligation, le payement de la créance, elle nait de l'obligation, elle s'identifie avec la créance; les deux dénominations se confondent dans le langage de la loi; l'article 1689 du C. civ. nous en offre l'exemple; elle est donc une comme l'obligation, comme le lien de droit inhérent à l'obligation, comme la créance Formée par ce lien.

L'objet de l'action, l'obligation, la créance peut donc se diviser, l'intérêt propre à cet PASIC., 1852, 1re PARTIE.

objet peut se diviser également, mais de même que le lien de droit reste un malgré cette division, l'action reste une aussi; elle pourra donc s'exercer pour tout son objet ou pour une portion de son objet, selon qu'il sera demeuré entier ou qu'il aura été réduit par une extinction partielle (1), ou qu'il se sera divisé entre plusieurs personnes agissant chacune séparément pour sa portion ou agissant toutes ensemble pour le tout; l'intérêt dans ces divers cas en sera plus ou moins grand, mais ce sera toujours la même action, tantôt répétée, tantôt intentée en une fois, et par conséquent susceptible ou non d'appel selon l'intérêt plus ou moins grand qui s'y attachera suivant les occur

rences.

Ainsi en est-il dans l'espèce où il y a une seule obligation, une seule créance divisée entre plusieurs; tous ont à ce titre une même action; en usant tous ensemble ils forment un seul demandeur, et c'est le cas de leur appliquer la loi romaine que cite Pothier dans le passage dont nous venons de vous donner lecture, la loi 9, ff.,de pactis : «Si plures eamdem actionem habent, unius «loco habentur, ut puta, plures sunt rei « stipulandi vel plures argentarii, quorum << nomina simul facta sunt, unius loco nu« merabuntur, quia unum debitum est. »

Cette loi, qui relic l'une à l'autre, comme deux termes inséparables, l'action unique et la dette unique, résume en quelque sorte les considérations que nous venons de vous présenter; là où il y a une seule dette, un seul lien de droit, là il y a une même action, quelque division qui s'opère dans l'obligation, et par conséquent cette action sera jugée en premier ou en dernier ressort selon qu'embrassant toute la dette ou une portion de la dette, elle donnera au jugement un intérêt supérieur ou inférieur au premier ressort.

Ce résultat de l'unité d'obligation et de créance nous apparaît non moins clairement dans la pensée juridique dont l'établissement des deux degrés de juridiction est l'expression. La loi a, par cet établissement, donné aux justiciables une garantie contre les erreurs du juge originairement saisi des actions, et elle a restreint cette garantie, source de dépenses, aux actions qui, par leur valeur, peuvent donner lieu à des er

(1) Cas d'un arrêt de la Cour de cassation de France, du 15 mars 1813 (Dalloz, Jur. du xıx® 8., yo Degrés de juridiction, sect. 11, art. 5, § 2.

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reurs d'un intérêt en rapport avec ces dépenses à un moindre intérêt elle n'a accordé que les garanties ordinaires de la justice, un degré de juridiction; à un intérêt plus grand elle a accordé des garanties extraordinaires, deux degrés de juridiction.

Cette pensée justifie la solution de la question du litige par l'unité d'obligation et de créance dans l'espèce. Le défendeur a été attrait en justice à raison d'une obligation contractée par lui envers l'auteur des demanderesses, elles ont demandé, devant le tribunal de première instance, le payement de la créance, qui en était dérivée, qui était d'une valeur supérieure au laux du dernier ressort, et qui était divisée entre elles deux par moitié; saisi de cette contestation, le tribunal a dù apprécier la validité et les effets du lien de droit, base commune de l'objet des poursuites et de toutes ses parties indistinctement; tel était donc l'intérêt de son jugement, l'intérêt de l'erreur qu'il pouvait commettre; cet intérêt, l'erreur possible, qui pouvait le sacrifier au détri ment de l'un ou de l'autre des contendants, défendeur ou demandeur, en un mot la chose jugée, embrassaient donc aussi l'obligation toute entière, et toutes ses parties indistinctement; il ne pouvait pas être commis, quant à l'obligation considérée en ellemême, plusieurs erreurs différentes, une erreur propre à chacune de ses parties, et par suite ayant sa valeur propre aussi; il ne pouvait en être commis qu'une les embrassant toutes ensemble, et par suite ayant la même valeur qu'elles toutes réunies; une contestation qui pouvait avoir un semblable résultat tombait donc sous la pensée de la loi, sous la nécessité de la garantie extraordinaire assurée par elle aux justiciables. Et qu'on ne dise point, pour repousser cette conséquence, que chacun des intéressés eùt pu agir séparément, que s'il l'avait fait, l'action eût été jugée en dernier ressort, qu'il ne peut donc en être autrement s'ils agissent ensemble; il n'y a aucune comparaison à faire au point de vue de la pensée de la loi entre ces deux modes de procéder, en supposant toutefois que le défendeur n'eût pas été en droit de mettre les autres intéressés en cause pour faire juger sur le tout par un seul jugement (1); si chacun eût agi séparément, la chose jugée eût été renfermée dans un moindre intérêt et avec

(4) Jousse, Tr. des présidiaux, Ire partie, chapitre 1er, art. 2, § 1, dit qu'il peut en être ainsi dans le cas où la créance appartenant à une seule

elle l'erreur dont chaque partie, demande-
resse ou défenderesse, eût eu à souffrir; le
jugement eût été irrévocable, il est vrai,
mais il ne l'eût été que pour une portion
de la créance, et à ce jugement eût pu suc-
céder un second jugement qui aurait pu
rectifier pour une autre portion l'erreur
commise. Les choses ne se passent point
ainsi quand l'action a été intentée en une
fois; toute la créance alors a été réclamée,
l'erreur du juge a pu l'embrasser toute en-
tière, il y a eu chose jugée sur le tout et le
besoin des garanties extraordinaires contre
les erreurs d'un grave intérêt a pris nais-
sance, la loi a dûù les accorder; et dans cette
différence entre les deux modes de pour-
suites se manifeste la différence qui distin-
gue le dernier, les poursuites dont il s'agit
ici des poursuites qu'intenteraient en même
temps par un même exploit plusieurs per-
sonnes à raison de plusieurs obligations, et
partant à raison de plusieurs créances dis-
tinctes; dans ce cas il y aurait chose jugée
distincte pour chacune; il y aurait par suite
en réalité plusieurs jugements dans un seul
instrument; il pourrait y avoir erreur pour
une et pas d'erreur pour une autre, comme
il pourrait y avoir erreur pour toutes; ces
erreurs seraient donc distinctes entre elles,
chacune aurait son intérêt distinct aussi,
correspondant, selon sa valeur, au premier
ou au dernier ressort, et de là cette consé-
quence qu'il y aurait plusieurs actions, plu-
sieurs demandes, et partant dernier ressort
pour chacune, si chacune avait une valeur
inférieure au premier ressort, ce serait le
cas de la règle que pose Jousse dans son
Traité des présidiaux, 1re partie, chap. 2,
art. 2, § 1, et qu'il fonde sur la loi romaine,
scire debemus, ff., de verb. oblig. quoties sen-
tentia habet diversa capita, quorum unum
alleri non cohæret, tot videntur sententiæ
quot capita. Rien de pareil ne peut se dire
d'une seule créance dérivée d'une seule
obligation, d'un seul lien de droit, divisée
entre plusieurs personnes, et objet d'une
même poursuite, l'erreur commise pour
une portion les embrasse toutes et donne à
la poursuite cette nature d'intérêt en vue
duquel la loi a établi les deux degrés de
juridiction.

Aussi, et nous terminerons par cette réflexion qui confirme tout ce que nous venons de dire, voici ce qui arriverait dans le

personne, celle-ci n'assigne qu'en payement d'une partie de la dette.

système de l'arrêt attaqué la position du demandeur et du défendeur doit être la même, quant à l'appel; si le demandeur ne peut appeler, le défendeur ne le peut non plus, et réciproquement. Suivant le système de l'arrêt attaqué, ni demandeur ni défendeur ne pourraient appeler dans l'espèce; le défendeur ne le pourrait, et pourtant il l'aurait pu s'il avait été assigné par son créancier primitif en payement de la somme réclamée de lui à titre de son obligation; il aurait pu dans ce cas faire rectifier par la voie de l'appel l'erreur d'un premier juge, et il l'aurait pu à cause de la valeur de l'intérêt qu'il y avait; maintenant il n'aura plus ce droit, assigné qu'il est par les représentants ou ayants cause de son créancier primitif en payement de la même somme et à titre de la même obligation, et il ne l'aura plus, quoique l'intérêt qu'il y avait, et qui en était la base, soit resté le même; la cause de l'appel subsisterait, et celle cause n'aurait plus d'effet; il faudrait même aller jusqu'à dire que l'action d'abord intentée par le créancier primitif, et susceptible d'appel, cesserait de l'être s'il venait à mourir durant l'instance, laissant plusieurs héritiers qui la reprendraient; des résultats contradictoires à ce point sont la condamnation du système qui les contient. Ce système ne peut donc être admis; l'appel du défendeur, recevable dans un cas, doit l'être dans l'autre, et recevable pour lui, il doit l'être également pour les demanderesses; un jugement ne peut être en premier ressort pour une partie et en dernier pour l'autre.

Sous quelque rapport donc qu'on apprécie les poursuites dirigées par les demanderesses contre le défendeur, qu'on les apprécie en elles-mêmes par la nature de leur objet ou qu'on les apprécie par le but de l'établissement des deux degrés de juridiction, l'on arrive à reconnaître une seule action dont y la valeur dépasse la somme de deux mille francs, et par conséquent la Cour d'appel de Gand n'a pu déclarer l'appel des demanderesses non recevable sans contrevenir à l'article 14 de la loi du 25 mars 1841.

Les considérations qui nous ont conduit à cette conséquence en même temps qu'elles répondent aux autorités de doctrine et de jurisprudence, qui pourraient lui être contraires, mettent hors cause l'autorité de la jurisprudence de la Cour de cassation de France et celle de Merlin dont s'est prévalu le défendeur; nous avons vérifié tous les arrêts de cette Cour à l'exception d'un seul, celui du 14 août 1813, que nous n'avons pu trouver, el lous, comme l'opinion de Merlin,

sont conçus dans l'hypothèse d'obligations distinctes; aucun ne l'est dans celle d'une obligation ou d'une créance unique divisée entre plusieurs représentants d'un auteur commun, débiteur ou créancier primitif; il n'y a donc rien à en induire contre la recevabilité de l'appel dans l'espèce. Les raisons par lesquelles nous avons cru qu'elle ne pouvait être méconnue sans contravention, comme elle l'a été, subsistent et nous forcent à conclure, ainsi que nous le faisons, à ce qu'il plaise à la Cour annuler l'arrêt de la Cour d'appel de Gand, du 26 juillet 1851, renvoyer la cause et les parties devant une autre Cour d'appel, pour y être fait droit sur l'appel des demanderesses après interprétation législative; ordonner que l'arrêt d'annulation sera transcrit sur les registres de la Cour d'appel de Gand, que mention en sera faite en marge de l'arrêt annulé; condamner le défendeur aux dépens; ordonner la restitution de l'amende.

ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'après une première cassation, le second arrêt est attaqué par le même moyen que le premier; que la cause doit donc être jugée par les chambres réunies, aux termes de l'art. 23 de la loi du 4 août 1832.

Sur le moyen de cassation, déduit de la fausse application de l'art. 14 de la loi du 25 mars 1841, ainsi que de la violation du même article et de la loi du 1er mai 1790, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré l'appel des compagnies demanderesses non recevable, quoique l'action qu'elles ont intentée conjointement au défendeur eût eu pour objet une somme de plus de 2,000 fr. en principal;

Attendu qu'il est constant en fait que les deux compagnies demanderesses ont assuré, par des polices séparées, pour une somme de 12.500 fr. chacune, la propriété du sieur Van Immerseel, dont le défendeur était locataire; qu'un incendie ayant éclaté dans cette propriété, et les dégâts ayant été évalués à 3,760 fr. 72 c., les deux compagnies ont payé cette somme, chacune pour moitié, à Auguste Van Immerseel; qu'enfin la maison incendiée appartenait au moment du sinistre audit Auguste Van Immerseel et à sa sœur, épouse Simon;

Attendu que les deux compagnies demanderesses, se prétendant subrogées, au même titre, dans les droits des propriétaires, et se fondant sur ce qu'aux termes de l'art. 1733

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