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a présenté, hier, un projet de décret dans lequel il s'est constamment écarté des principes constitutionnels. Il a établi une distinction entre le décret d'accusation rendu contre le sieur Varnier, et celui rendu contre le sieur Delattre, sous prétexte que le décret rendu contre le premier porte qu'il sera tenu au secret et que celui rendu contre le second ne renferme pas cette disposition rigoureuse. Cette distinction est absolument injuste parce que, l'objet de l'accusation étant le même, la peine doit aussi être la même. Les lois doivent porter un caractère impartial, de bienfaisance pour récompenser, de sévérité pour punir. Pour prévenir de semblables erreurs, dans le cas où l'Assemblée aurait malheureusement besoin de prononcer encore des décrets d'accusation pour des crimes de lèse-nation, je propose de charger le comité de législation de présenter une formule uniforme d'accusation.

M. Thuriot. J'appuie cette motion et je demande que les accusés soient promptement transférés à Orléans.

Plusieurs membres : L'ordre du jour!

M. Lasource. Il faut enjoindre aux grands juges d'interroger le sieur Varnier, ou accorder à cet accusé la permission de correspondre, par lettre, avec sa mère. Il n'est pas nécessaire pour sa punition, quand même il serait coupable, je dis plus, il serait barbare de lui refuser la liberté de donner, sous le contrôle d'un officier civil, des consolations à une mère éplorée. Cette demande est de toute justice, et j'en fais la motion expresse.

Plusieurs membres : L'ordre du jour!
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)
Un de MM. les secrétaires donne lecture:

1° D'une lettre de M. Deless art, ministre de l'intérieur, qui fait part d'une demande du directoire du département de l'Oise, relative à l'emplacement du lieu de ses séances, avec l'avis du ministre.

(L'Assemblée renvoie cette lettre au comité des domaines.)

2o D'une lettre de M. Rumpler, chanoine de Varsovie, qui envoie à l'Assemblée un assignat de 50 livres, pour dédommager un citoyen qui a perdu, par le feu, un assignat de pareille sonime; cette lettre est ainsi conçue :

« Strasbourg, le 22 novembre 1791. « Monsieur le Président,

« J'ai lu hier, dans un journal (1) qu'il s'était présenté à la barre un pauvre malheureux qui, ne possédant pour toute fortune qu'un assignat de 50 livres, l'avait vu dévorer par les flammes, à un petit bout près, qu'il exhibait à l'Assemblée nationale, pour en être indemnisé de sa perte; mais qu'après quelque discussion, l'affaire avait été renvoyée au rapport.

« Je sens, Monsieur, que les représentants de la nation ne doivent pas légèrement disposer des fonds publics. Je sens également qu'aucun des membres de la législature n'aurait osé, de crainte d'offenser son voisin, tirer deux louis de sa poche, pour écarter à la fois et la discussion et la pétition; mais un citoyen de la galerie pouvait, sans blesser la délicatesse de personne, faire ce que n'aurait pu décemment un législateur dans le sanctuaire du Sénat de l'Empire.

(1) M. Delacroix.

«J'ose donc vous supplier de vouloir bien permettre que je me mette pour un instant à la place de l'un ou l'autre des spectateurs, pour y présenter, en esprit de fraternité, cette faible offrande de 50 livres ci-jointe, au pauvre incendié, dont le sort m'a touché.

Si le rapport lui est favorable, son désastre lui aura doublé sa subsistance, et, au cas contraire, le bonhomme se trouvera dédommagé de sa perte. (Applaudissements.)

Je suis avec un respect infini, Monsieur le Président, votre très humble et très obéissant serviteur.

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Signé RUMPLER, chanoine de Varsovie. » Plusieurs membres : L'insertion de la lettre au procès-verbal, avec mention honorable.

(L'Assemblée décrète que cette lettre sera insérée dans le procès-verbal avec mention honorable et ordonne que l'assignat sera déposé au comité des assignats, pour être remis à sa destination.)

3o D'une adresse du même citoyen à laquelle sont jointes différentes pièces.

(L'Assemblée renvoie cette adresse et les pièces au comité des pétitions.)

4o D'une adresse de la garde nationale de Périgueux qui demande à marcher sur les frontières. (L'Assemblée renvoie cette adresse au pouvoir exécutif.)

5o D'une lettre d'un citoyen qui propose des moyens de recueillir encore une portion importante des récoltes, dans les plantations ravagées de Saint-Domingue, et qui, pour cela, demande à l'Assemblée une avance de deux millions.

(L'Assemblée renvoie cette lettre aux comités réunis du commerce et des colonies.)

6o D'une lettre du département de la Mayenne, qui informe l'Assemblée que les biens nationaux dont l'estimation s'élevait à 11,232,454 livres ont été vendus 16,665,393 livres.

7° D'une lettre des administrateurs composant le directoire du département du Haut-Rhin, qui envoie toutes les pièces relatives au transport d'argent arrêté à Belfort; cette lettre est ainsi conçue;

Colmar, 22 novembre 1791.

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d'autres. En conséquence, cette troupe se dispo- | sait, avec d'autres mécontents, à établir un camp à Alais et l'autre à Jalès. Ces dispositions ont été découvertes par une lettre qui a été interceptée, et qu'écrivait à l'un d'eux le principal agent qu'ils avaient ici. Cet homme, attaché autrefois à l'hôtel de ville, a été arrêté le 13, et on espère découvrir, par lui, le fil de toute la trame. Il y a apparence qu'il était en correspondance directe avec les princes, puisqu'il payait déjà aux émigrants les 45 livres par mois, comme s'ils étaient déjà à Coblentz. D'autres grandes et intéressantes découvertes se feront à mesure qu'on aura fouillé dans les papiers, et qu'on aura intercepté la correspondance de ce particulier.

Notre district, au reste, était assez tranquille, même avant la fuite de ces insensés, lorsque cette paix a été un moment troublée à Aujac. Là, les patriotes en sont venus aux mains avec ceux qui ne voulaient point de curé constitutionnel. 8 hommes de ligne ont fait face à 200 de ces factieux; et, soutenus ensuite par 30 patriotes de Gennelach, ils les ont tous dispersés, après s'être emparés des chefs, qu'on a conduits ici.

"Il paraît, au surplus, que les projets des fanatiques et des émigrants n'intimident pas beaucoup les citoyens du département du Gard, puisque les dernières ventes des domaines nationaux se sont élevées à plus d'un million et que l'estimation ne les avaient portées qu'à quatre cent et quelque mille livres.» (Applaudissements.)

Un membre, au nom du comité de législation, demande que 8 commis soient accordés à ce comité.

(L'Assemblée accorde cette demande).

L'ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret du comité des assignats et monnaies sur une nouvelle émission d'assignats de 5 livres.

M. Dorizy, rapporteur. Messieurs, le 11 novembre dernier (1), l'Assemblée nationale a adopté le décret d'urgence. Par son décret du même jour, elle a accordé provisoirement et par échange, la somme de 10 millions en assignats de 5 livres qu'elle a destinés aux besoins de la caisse de l'extraordinaire et de la trésorerie nationale; elle a ajourné le surplus du projet du comité au lundi suivant, jour auquel lui serait présenté le projet d'échange des 100 millions d'assignats de 5 livres dans les départements, et elle a ordonné l'impression du rapport et du projet de décret.

Le comité des assignats avait fait imprimer à la suite de ce rapport le projet de décret qu'il devait vous présenter le lundi 14 novembre. Le voici (1):

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité des assignats, et avoir décrété l'urgence sur le projet de décret qui lui a été présenté le 21 de ce mois, décrète ce qui suit:

« Art. 1. Pour subvenir aux besoins de la caisse de l'extraordinaire et de la trésorerie nationale, il sera attribué au service de ces deux caisses, outre les 10 millions décrétés le 11 novembre présent mois, 15 autres millions qui, réunis, feront 25 millions, et cette somme sera délivrée au caissier de la caisse de l'extraordinaire, en assignats de 5 livres, en la forme ordi

(1) Voy. ci-dessus séance du 11 novembre 1791, page 2. (2) Bibliothèque nationale: Assemblée législative, Assignats et monnaies, no 2.

naire, au fur et à mesure de la fabrication et par concurrence avec les 75 millions réservés à l'échange dans les départements.

« Art. 2 Ces assignats seront employés aux besoins journaliers desdites caisses, et ils seront échangés contre des assignats de 500, 1,000 et 2,000 livres, qui seront brulés avec les formalités et la publicité prescrites par les décrets.

« Art. 3. Ils ne seront délivrés que par forme d'emprunt sur les 100 millions destinés à l'échange dans les départememts et districts du royaume, ils ne pourront accroître l'émission actuellement portée à 1,400 millions par le décret du 1 novembre, et ils seront remplacés sur les émissions futures, pour compléter l'échange de 100 millions décrétés le premier du présent mois de novembre.

« Art. 4. L'administrateur de la caisse de l'extraordinaire sera tenu de rendre compte détaillé de l'emploi qui a été fait sous ses ordres et sous sa responsabilité, de partie des 100 millions d'assignats de 5 livres, décrétés par l'Assemblée nationale constituante.

« Art. 5. Les commissaires de la trésorerie nationale rendront également un compte détaillé de l'emploi fait dans leurs différentes caisses, de la partie desdits 100 millions qui y a été versée par M. Lecouteulx, en exécution des décrets de l'Assemblée nationale.

«Art. 6. Il en sera usé de même à l'égard de l'emploi qui sera fait des 25 millions qui leur sont attribués par le présent décret.

« Art. 7. Les bordereaux qui ont été tenus par les agents de la trésorerie nationale, pour l'échange de partie des assignats de 5 livres en faveur du commerce et des départements, ainsi que les noms, qualités et demeures de ceux qui les ont échangés, seront imprimés et distribués dans les départements et districts du royaume. »

Depuis, votre comité a cru nécessaire d'y faire quelques changements. Permettez-moi quelques développements à l'égard de ces changements.

D'abord, il a été dit à l'Assemblée nationale, par différents membres, que la caisse de l'extraordinaire et la trésorerie nationale n'étaient point en état de rendre un compte de l'emploi des assignats de 5 livres qui se faisaient dans les deux administrations. Différents membres ont allégué des abus qui s'y étaient glissés. Ces différentes motions ont déterminé le comité des assignats à établir les dispositions qui forment l'article 4.

Je puis vous dire aujourd'hui que l'administrateur de la caisse de l'extraordinaire a rempli autant qu'il a été en lui, et depuis le 11 novembre jusqu'à ce jour, les dispositions qui sont prescrites par cet article. Il a écrit au comité que des 100 millions d'assignats qui avaient été destinés par l'Assemblée nationale constituante à échanger de plus gros assignats, il n'en était resté d'affectés au service de la caisse de l'extraordinaire que 5 millions. En même temps, il s'est engagé envers le comité, et conséquemment envers vous, Messieurs, à remplir sur les 100 millions dont vous allez destiner l'usage, toutes les formalités et les précautions de détail que l'Assemblée pourra exiger.

J'observe, sur l'article 5, que la trésorerie nationale a fourni à votre comité différents états qui justifient la manière dont a été fait l'emploi de 93,233,200 livres sur les 100 millions en assignats de 5 livres qui ont été versés dans cette caisse par M. Lecouteulx, en exécution des décrets de l'Assemblée nationale. Je tiens ici un

aperçu de la destination de cette somme, savoir: le service du culte, l'administration et l'ordre judiciaire, la liste civile, la guerre, les travaux publics, la gendarmerie, la loterie royale, les douanes nationales, les fermes générales, les étapes et convois militaires, la direction des postes, les échanges faits pour les moissons, vendanges, etc., etc.

Tous ces différents objets forment un total de 93, 233, 200 livres. La trésorerie nationale, Messieurs, ne s'est pas contentée de ces détails; elle nous a encore fourni un autre état de ce qui avait été envoyé dans les départements pour les différents objets de service. Il nous a encore été fourni un autre état de ce qui a été dépensé pour le commerce et l'agriculture dans les différents départements du royaume. Enfin, je tiens ici un bordereau général de toutes les opérations qui ont été faites à cet égard. A ces différents états, Messieurs, est joint un état destiné à faire connaître tout ce qui a été employé, tant par la caisse de l'extraordinaire que par la caisse de la trésorerie nationale, et les versements qui ont été faits à la caisse de l'extraordinaire dans les 83 départements du royaume. Enfin cet état comporte ce que chaque département a dépensé.

M. de Lamarche est chargé par la trésorerie nationale des échanges destinés aux différents départements; il tient des feuilles journalières que j'ai présentement à la main. Depuis le 22 septembre dernier, jour auquel a commencé l'exécution du décret jusqu'au 19 novembre présent mois, les échanges se font d'une manière que je crois déjà avoir présentée par extrait, à l'Assemblée nationale, lors de mon premier rapport. Les départements envoient à la capitale les grosses valeurs qu'ils désirent échanger; ils ont un commettant dans la capitale, qui a la confiance; ils joignent à leurs envois un exposé de leurs besoins. Lorsque c'est un particulier qui fait ces demandes, l'état est certifié par la municipalité, ensuite par le district et enfin par le département. Muni de ces certificats, le particulier se présente chez M. de Lamarche; il y souscrit une demande en échange. M. de Lamarche ne lui donne d'abord aucun bon d'échange dans le moment où il se présente; mais M. de Lamarche, suivant les possibilités et d'après les sommes dont il peut disposer, envoie le lendemain un porteur de registre, qui s'assure que le particulier qui s'est présenté chez lui a vraiment un domicile et est un homme en qui on peut avoir confiance. Alors il lui remet un bon, en vertu duquel le particulier se présente à la caisse de M. Dupin, qui réalise le bon de M. de Lamarche.

En outre, M. de Lamarche tient un état par colonnes, où sont inscrits le nom du département, celui du district et de la municipalité, l'objet des besoins, les sommes demandées par les particuliers, et le nom et la demeure de la personne qui reçoit l'échange. S'il existe des abus dans ces échanges, ce ne peut être que dans l'infidélité des agents des municipalités ou des départements qui, recevant une somme, en déclareraient une autre et agioteraient à l'infâme rue Vivienne.

A toutes ces précautions, votre comité, Messieurs, a pensé qu'il était possible d'en ajouter une encore. Il a pensé qu'il était possible qu'un homme qui se présentait chez M. Dupin avec un bon de 10,000 livres, ne remit à M. Dupin les 10,000 livres que dans un temps éloigné. Il a pensé que l'on devait exiger que celui qui avait un bon fut tenu de le décharger. M. de Lamarche,

avec lequel le comité a eu une longue conférence à cet égard, disposé à suivre tout ce qui peut éclairer son administration, a dù expédier, ainsi qu'il nous a promis, à M. Dupin, l'ordre de faire décharger par celui qui se présentait à la caisse, le bon qui deviendrait alors une attestation que la personne qui s'est présentée pour toucher 10,000 livres a vraiment reçu cette somme.

Il me reste, Messieurs, deux mots à vous dire pour vous engager à adopter le projet qui vous est présenté. Quelques membres du comité, dans le peu de temps qu'ils ont eu pour se réunir hier, ont observé que peut-être la trésorerie nationale pourrait subvenir à son service en consommant beaucoup moins de petites valeurs. Ils ont remarqué que depuis le 12 novembre, jour auquel ils avaient encore quelques restes de 100 millions, jusqu'à mercredi prochain, la trésorerie nationale aura absorbé 10 millions. Il a semblé au comité que la trésorerie nationale aurait pu en dépenser un peu moins. A cet égard, nous n'avons pu, M. Guyton-Morveau et moi, en nous rendant hier soir à la trésorerie nationale, nous procurer un état exact de ces dépenses; mais M. Cambon vient de me le remettre à l'instant, et je vais vous en donner connaissance.

Sur 9,500,000 livres remises à la trésorerie nationale par la caisse de l'extraordinaire, en assignats de 5 livres, il en a été distribué par la trésorerie nationale pour 7,494,650 livres, et dont le déduit suit...

M. Fauchet. Je demande la permission d'observer qu'il ne reste rien dans la mémoire de la lecture rapide de ces tableaux sur des objets de finance aussi compliqués; et c'est perdre le temps qu'on emploie à les entendre. Il est bien plus. simple d'imprimer, et il me paraît fort étonnant que MM. les rapporteurs des comités des finances fassent des rapports sans les avoir fait imprimer, afin que chacun de nous pùt les examiner et délibérer dessus avec certitude.

Plusieurs membres: Il est imprimé!

M. Fauchet. Oui, il y en a bien un; mais les développements que nous donne M. le rapporteur ne l'ont point été.

M. Guyton-Morveau. Je prie l'Assemblée d'observer que M. le rapporteur n'est entré dans ces détails fastidieux que pour répondre aux objections faites au comité.

Un membre: J'observe que ces interruptions font perdre du temps. Je demande que le rapporteur continue.

M. Dorizy, rapporteur. Je reviens à l'objet principal du rapport, car les détails dans lesquels je suis entré n'ont été que pour éclairer l'Assemblée sur la manière dont se faisait l'administration des caisses.

Le comité des assignats a désiré, Messieurs, que votre décret portat précisément que la caisse de l'extraordinaire ne pourrait prétendre à avoir plus de 15 millions au delà des 10 millions qui ont été accordés le 11 novembre, pendant tout le temps qui serait employé à la fabrication des 100 millions d'assignats que vous avez destinés à cet échange, de sorte qu'il restât, sur ces 100 millions, 75 millions privativement destinés à l'échange que vous avez voulu qui eut lieu dans les départements.

Je finis par une dernière observation sur l'article 7, auquel je propose d'ajouter par amendement, à cause de l'immensité de ces bordereaux, qu'ils ne seront imprimés que relativement à ce

qui concernera chacun des 83 départements en particulier, et que l'on n'enverra pas à chacun des 83 départements les états des échanges qui ont eu lieu pour les autres départements, états qui ne peuvent leur servir à rien.

(L'Assemblée décide que la discussion est ouverte sur le projet de décret, et qu'il sera discuté article par article.)

M. Dorizy, rapporteur. Voici le premier article de notre projet de décret:

"

L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité des assignats, et avoir décrété l'urgence sur le projet de décret qui lui a été présenté le 11 de ce mois, décrète ce qui suit:

« Art. 1er. Pour subvenir aux besoins de la caisse de l'extraordinaire et de la trésorerie nationale, il sera attribué au service de ces deux caisses, outre les 10 millions décrétés le 11 novembre présent mois, 15 autres millions qui, réunis, feront 25 millions, et cette somme sera délivrée au caissier de la caisse de l'extraordinaire, en assignats de 5 livres, en la forme ordinaire, au fur et à mesure de la fabrication, et par concurrence avec les 75 millions réservés à l'échange dans les départements. »

M. Poujet. Si, pour ce qui me concerne, j'ai consenti à accorder les 10 premiers millions, mesure qui vous était bien moins dictée par l'esprit d'ordre que par la nécessité des circonstances, cela n'a pas été du moins sans une conviction intime, qu'elle n'avait été amenée que par un défaut d'exactitude et de surveillance, où peut-être de tous les deux; mais enfin vous l'avez décrété, il le fallait, Aujourd'hui, votre comité vous propose de porter jusqu'à 25 millions la part que vous accorderez définitivement à la caisse de l'extraordinaire; mais votre comité a bien senti lui-même que si la caisse de l'extraordinaire entrait en participation des assignats de 5 livres destinés aux échanges, et si elle y entrait pour un quart, elle ne devait avoir ní privilège, ni préférence aussi n'a-t-il demandé pour elle qu'une simple concurrence avec les départements que je crois nécessaire de lui accorder; mais je trouve incomplète la disposition du premier article à cet égard. Il établit bien la concurrence dans le droit; mais qui nous répondra qu'elle sera fidèlement exécutée dans le fait? Qui nous rassurera contre les demandes ultérieures de cette caisse, et contre la nécessité peut-être de les accorder encore?

Je désirerais donc, et je demande qu'à l'article premier, il soit ajouté une déposition conçue en ces termes :

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D'après la délivrance faite au caissier de la caisse de l'extraordinaire des 10 millions d'assignats, qui lui ont été attribués par le décret du 11 de ce mois et avant qu'il puisse lui en être délivré d'autres, il en séra envoyé 30 millions dans les départements; et quant aux autres 15 millions, qui doivent être délivrés à cette caisse aux termes du présent article, ils ne seront délivrés à mesure de la fabrication qu'en proportion et en même temps que les 45 millions restants seront envoyés aux départements.

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M. Haussmann. Il nous a été dénoncé un très grand abus. On vous a dit que l'on vendait dans Paris pour des 10,000 livres d'assignats de 5 livres dont les numéros se suivaient. Vous voulez, Messieurs, prévenir cet abus, et c'est le but de votre comité. Les petits assignats sont l'unique ressource du commerce, et si vous ne prenez pas

toutes les mesures pour vous opposer à leur gaspillage, vous en príverez les départements. Les précautions les plus sévères doivent être prises dans cet échange. Il faut se garantir de cet agiotage malheureux, qui, dans les payements, substitue les grands assignats aux petits qui se vendent avec 7 et même 8 070 de bénéfice. Or, pour y parvenir, voici l'article additionnel que je propose :

«Tous administrateurs et caissiers, tous chefs d'ateliers et autres personnes qui recevront des mandats pour faire des échanges d'assignats de 5 livres, seront tenus de certifier la réception de ces assignats, et de faire mention de leurs lettres et de leurs numéros. »

M. Vincens-Plauchut. La mesure de M. Haussmann peut être excellente pour des assignats de forte somme; mais elle est impraticable pour ceux de 5 livres. Il faudrait faire imprimer un registre de 5 millions de numéros. Je demande donc la question préalable.

Plusieurs membres: La discussion fermée ! (L'Assemblée ferme la discussion.)

M. Brua. La caisse de l'extraordinaire n'a reçu des assignats que pour faire des appoints, et cependant depuis le 11 juillet jusqu'à présent, ce qui fait un peu plus de 4 mois, elle a déjà reçu 94,000,000 d'assignats. Vous allez lui en décréter encore 25 millions. Il est certain que si vous satisfaites de cette manière aux demandes de la caisse de l'extraordinaire, vous verrez qu'au lieu de se borner à faire des appoints en petits assignats de 5 livres, elle fera bientôt la moitié de ses payements en petits assignats. Ce n'est certainement pas là votre intention, car vous priveriez nécessairement les départements de cette ressource. Je demande que la caisse de l'extraordinaire se borne à ces 25 millions et ne puisse en réclamer de nouveaux que lorsque l'émission des 75 autres millions sera complètement livrée aux départements.

Un membre: Je demande la question préalable sur l'amendement. Surveillons les caisses, mais ne décrétons rien à cet égard.

M. Dorizy, rapporteur. Je n'ai qu'un mot à répondre pour tranquilliser le préopinant, c'est qu'avant la fin du mois de décembre prochain, il y aura des petits assignats fabriqués en assez grand nombre pour en donner aux départements et à la trésorerie nationale autant qu'ils en désireront.

M. Vincens-Plauchut. J'appuie l'amendement; les manufactures languissent, l'agriculture ne prospère pas, faute de petits assignats.

Plusieurs membres demandent la question préalable sur les amendements de MM. Poujet et Brua.

(L'Assemblée, consultée, décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur ces amendements et adopte l'article premier du projet de décret du comité.)

M. le Président. Il reste à mettre aux voix l'article additionnel de M. Haussmann, mais je crois que cet article viendrait plus utilement après l'article 7 du projet du comité.

M. Haussmann. Je le représenterai au moment de la discussion de l'article 7.

M, le Président. Avant de passer à l'article 2, je dois annoncer à l'Assemblée que le scrutin de samedi n'a produit en faveur de personne la majorité absolue pour la présidence. J'invite

l'Assemblée à se retirer dans ses bureaux pour procéder à un deuxième tour de scrutin.

(L'Assemblée se retire dans les bureaux et reprend sa séance un quart d'heure après.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture de la lettre suivante :

"Lavaquerie, concierge de l'Abbaye, a l'honneur de faire passer à M. le président, deux lettres adressées à M. Varnier, ainsi qu'une note envoyée par Mme Delattre pour son mari. Ne pouvant rien remettre aux personnes qui sont au secret, sans y être autorisé, il supplie M. le président de lui donner ses ordres à cet égard.

Plusieurs membres : Le renvoi de toutes ces lettres aux archives!

M. Voysin-de-Gartempe. Je m'oppose au renvoi aux archives, et je demande que les lettres soient remises à l'officier municipal chargé de l'inspection de cette prison, parce que, sous prétexte de justice, on fait toujours des actes arbitraires.

M. Delacroix appuie la proposition de M. Voysin-de-Gartempe.

(L'Assemblée, consultée, décrète que les lettres seront déposées aux archives.)

La discussion du projet de décret relatif à une nouvelle émission d'assignats de 5 livres est reprise.

M. Dorizy, rapporteur. Je vais vous lire l'article 2. Le comité y a fait un changement de rédaction afin de ne point anticiper sur le rapport qui vous sera fait relativement au mode des échanges, pour les départements. L'article 2 est maintenant conçu en ces termes:

Art. 2.

« Ces assignats seront employés aux besoins journaliers desdites caisses; les valeurs de ceux qui seront admis à l'échange seront déterminées lors du rapport qui sera fait sur le mode de cet échange dans les départements; et ils seront brûlés avec les formalités et la publicité prescrites par le décret. »

Art. 3.

« Ils ne seront délivrés que par forme d'emprunt sur les 100 millions destinés à l'échange dans les départements et districts du royaume; ils ne pourront accroître l'émission actuellement portée à 1,400 millions par le décret du 1er novembre, et ils seront remplacés sur les émissions futures, pour compléter l'échange des 100 millions décrétés le 1er du présent mois de novembre. >>

M. Dorizy, rapporteur. L'article 4 porte que l'administrateur de la caisse de l'extraordinaire rendra compte de l'emploi des 5 millions d'assignats de 5 livres qui lui ont été remis. Cet article est impossible dans l'exécution, parce que M. Lecouteulx, qui ne pouvait prévoir la disposition postérieure d'une loi, n'a pas tenu de bordereaux des espèces qu'il délivrait en général dans ces payements. Il ne peut donc indiquer en détail à quels payements les assignats de 5 livres ont été particulièrement employés. Le comité propose de réunir l'article 6 et l'article 4, qui se trouverait ainsi conçu :

Art. 4.

« L'administrateur de la caisse de l'extraordinaire sera tenu de rendre un compte détaillé de l'emploi qui sera fait sous ses ordres, et sous sa responsabilité, des 25 millions qui lui sont attribués tant par le décret du 1er novembre, que par le présent décret. »

M. Delaporte. L'intention de l'Assemblée et celle du comité est d'éviter les prévarications dans la distribution des petits assignats. Lorsque vous délivrez à la Trésorerie nationale, par exemple, une somme de 10 millions tant en petits qu'en gros assignats, il est possible que le caissier prenne les petits assignats, s'en procure de gros à 6, 7 et 8 0/0 de bénéfice, et qu'ensuite, lorsque les parties prenantes arrivent, on les paye en gros assignats, tandis qu'elles devraient être payées avec les mêmes assignats qui ont été délivrés au caissier.

Je demande, pour qu'on puisse vérifier l'emploi que les caissiers feront des assignats qui

Un membre: J'ai proposé, lors de l'ajourne-feur seront délivrés, qu'ils soient tenus de faire

ment, deux amendements qui ont été renvoyés au comité, qui ne les représente pas. Ils consistaient à établir que les assignats de 5 livres seront échangés contre les assignats de 100, 200 et 300 livres, et ceux-ci contre des assignats de 500, 1,000 et 2,000 livres. Je demande que l'article soit changé et rédigé de la manière sui

vante :

« Les assignats seront employés aux besoins journaliers desdites caisses, et ils seront échangés contre des assignats de 100, 200 et 300 livres; ces derniers seront ensuite échangés pour pareille somme contre des assignats de 500, 1,000 et 2,000 livres.

M. Caminet. Ces dispositions sont réservées par la rédaction du comité, et l'Assemblée s'en occupera quand on lui fera le rapport sur le mode des échanges.

Plusieurs membres: La priorité pour la rédaction du comité !

(L'Assemblée accorde la priorité à la rédaction de l'article 2 du comité et l'adopte.)

M. Dorizy, rapporteur, donne lecture de l'article 3, qui est mis aux voix, et décrété, sans discussion, dans les termes suivants :

exprimer par les parties prenantes dans quelle nature d'espèces ou d'assignats tous les payements auront été faits, et ce à peine de nullité de toutes les quittances qui n'auraient point été assujetties à cette forme. Par ce moyen vous aurez une garantie de plus. (Applaudissements.)

Un membre: L'article qui est véritablement à la discussion est l'article 4. Il me paraît étrange qu'on écarte la question de savoir si un administrateur rendra un compte.

M. Guyton-Morveau. Je demande à ceux qui sont dans l'intention d'assujettir la trésorerie nationale à faire exprimer, dans les quittances, la qualité d'assignats, s'ils entendent parler des quittances des gros seulement, ou s'ils entendent parler de toutes quittances des parties prenantes. A cet égard, je déclare que, pour les versements qui se font en gros assignats, pour quelque objet que ce soit, ce que l'on vous propose s'exécute à présent.

M. Dorizy, rapporteur. L'Assemblée paraissant vouloir adopter la motion de M. Delaporte, voici comment je propose de la rédiger :

Les payeurs de la caisse de l'extraordinaire, ceux de la trésorerie nationale et de toutes au

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