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Le flagrant délit n'apportait aucune modification à ces règles de compétence; il en résultait seulement, que le prévenu surpris en flagrant délit, pouvait être arrêté sans mandat et conduit immédiatement devant le juge de paix '.

La loi du 7 pluviôse an Ix vint bientôt attaquer cette nouvelle organisation. On reprochait aux juges de paix une inertie qui compromettait les intérêts de la justice. « Soit que la sévérité des fonctions criminelles, dit l'exposé des motifs de cette loi, ne s'allie pas naturellement au ministère pacificateur dont ils sont principalement chargés, soit que leur isolement au milieu d'un petit canton ne leur permette pas de suivre au delà de ce canton les ramifications qui leur échappent, soit enfin qu'indépendants du gouvernement et sans direction commune, ils ne recherchent les délits que sous l'influence des passions qui depuis dix ans nous agitent, toujours est-il vrai de dire qu'on ne trouve maintenant dans la police de sûreté, ni cet ensemble de mouvements, ni cette unité d'action, sans lesquels on espèrerait vainement le retour du calme et de la tranquillité. » Les attributions des juges de paix furent restreintes et ces officiers subordonnés aux magistrats de sûreté qui furent institués au chef-lieu de chaque arrondissement. Ces nouveaux magistrats furent autorisés à faire eux-mêmes les actes qui peuvent procurer la recherche et la poursuite des délits, de quelque nature que soient ces actes; ils pouvaient

'C. 3 brumaire an iv, art. 62. 2 Voy. notre tome II, p. 124.

recevoir des déclarations, faire saisir en flagrant délit et s'ils le jugeaient nécessaire, faire des visites et perquisitions, interroger, entendre des témoins et dresser des procès-verbaux pour constater le corps du délit '. Ils réunissaient entre leurs mains tous les pouvoirs de la police judiciaire; ils pouvaient en faire par eux-mêmes tous les actes ou en surveiller l'exécution dans les mains des officiers inférieurs.

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Organisation de la police judiciaire par le Code d'instruction criminelle.

Le Code d'instruction criminelle n'a suivi qu'en les modifiant profondément les errements des législaque nous venons de résumer.

tions

La loi du 16-29 septembre 1791 avait maintenu dans les mains des nouveaux magistrats la plus grande part des droits de police dont leurs prédécesseurs étaient investis; les juges de paix et les officiers de gendarmerie avaient repris presque toutes les attributions des juges des lieux et des prévôts de maréchaussée; ils continuaient l'ancienne information, bien que cette procédure, purement préliminaire, n'eût plus force de preuve; ils préparaient l'instruction; ils réunissaient même aux droits de l'officier de police quelques-uns des droits qui ne doivent appartenir qu'au juge.

Circ. du Min. de la justice du 21 floréal an ix.

Les lois du 3 brumaire an iv et du 7 pluviôse an Ix conservèrent ce droit d'information, d'abord aux juges de paix, ensuite aux magistrats de sûreté; elles continuèrent également à confondre, dans les mains de ces magistrats, les attributions de la police judiciaire et les attributions du juge. Il était difficile de ne pas reconnaître dans toutes ces dispositions une influence indirecte, une reproduction détournée des règles de notre ancienne législation.

Le Code d'instruction criminelle a modifié à la fois les agents de la police judiciaire et ses attributions.

L'art. 9 de ce Code dispose que:

La police judiciaire sera exercée, sous l'autorité des cours d'appel, et suivant les distinctions qui vont être établies,

Par les gardes champêtres et les gardes forestiers; Par les commissaires de police;

Par les maires et les adjoints de maire;

Par les procureurs de la République et leurs substituts;

Par les juges de paix;

Par les officiers de la gendarmerie;

Par les commissaires généraux de police;
Et par les juges d'instruction.

Tous ces officiers n'ont pas été investis de la même compétence.

Les gardes champêtres et forestiers sont particulièrement chargés de rechercher les délits et les con

traventions de police qui portent atteinte aux propriétés rurales et forestières (art. 16).

Les commissaires de police, les maires et les adjoints des maires sont chargés de la recherche de toutes les contraventions de police (art. 11).

Les procureurs de la République et leurs substituts sont chargés de la recherche des délits et des crimes (art. 22).

Les officiers de police judiciaire, que la loi qualifie auxiliaires du ministère public, à savoir: les juges de paix, les officiers de gendarmerie, les commissaires généraux et ordinaires de police, les maires et leurs adjoints sont associés aux officiers du ministère public dans la recherche des crimes et délits (art. 48, 49 et 50).

Enfin, le juge d'instruction est celui de tous les officiers de police judiciaire dont les pouvoirs sont les plus étendus: au droit de rechercher les crimes et les délits et de les poursuivre même d'office dans certains cas, il réunit le droit de constater et d'instruire (art. 59 et 61).

A côté de ces officiers, et pour concourir à l'accomplissement de leur mission, la loi a placé

1° Les préfets des départements et le préfet de police à Paris, qui peuvent faire personnellement, ou requérir les officiers de police de faire tous les actes de la police judiciaire (art. 10);

2° Les officiers de police judiciaire spéciaux, qui, tels que les conducteurs des ponts et chaussées, les gardes du génie, les gardes-pêche, les agents voyers, les cantonniers, les préposés des postes, des contri

butions indirectes, des douanes, des octrois, exercent les fonctions de la police judiciaire, relativement à certains délits spéciaux;

3° Les agents de la force publique, qui, tels que les sous-officiers de la gendarmerie et les gendarmes, les appariteurs et officiers de police, apportent, dans de certaines limites, leur concours aux actes de la police judiciaire.

Les attributions des officiers de police sont restreintes :

Ils reçoivent les rapports, dénonciations et plaintes qui leur sont adressées (art. 11, 16 et 48).

Ils consignent dans les procès-verbaux qu'ils rédigent à cet effet la nature et les circonstances des faits qu'ils ont mission de rechercher (art. 11, 16 et 54).

Enfin, ils transmettent immédiatement ces dénonciations et procès-verbaux à l'officier du ministère public compétent pour poursuivre (art. 15, 20 et 54).

Ainsi, le droit d'informer ne leur appartient plus; l'information, même préliminaire et édifiée à titre de simples renseignements, est, en général, abolie; ils ne peuvent ni faire comparaître l'inculpé et l'interroger, ni procéder à l'audition sommaire des témoins, ni se livrer à la visite des lieux. Ils sont principalement établis pour recevoir les dénonciations et les plaintes et pour transmettre sans délai ces actes aux officiers chargés de poursuivre.

Toutefois, au cas de flagrant délit, ces attributions restreintes se modifient et s'étendent; ils ne se bornent plus à donner des avis aux magistrats, ils agis

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