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Il faut assimiler au père et à la mère légitimes les père et mère de l'enfant naturel reconnu, le tuteur même, quand le conseil de famille n'a pas désigné un autre parent pour soigner l'enfant toutes ces personnes ont légalement la garde de l'enfant ou pupille, et elles sont responsables des dommages que causeraient ses actes illicites.

:

2o Les maîtres et les commettants sont responsables du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés. Le mal a été fait à cause de ces fonctions ou grâce à ces fonctions: il ne fallait pas prendre un préposé inhabile, malhonnête, vicieux. Un cocher, ivre ou maladroit, casse la jambe d'un passant qu'il renverse; un agent d'une compagnie d'assurances répand des calomnies contre une compagnie rivale; un contre-maître prolonge contrairement à la loi le travail d'un enfant dans une manufacture, et l'enfant est tué par une machine dont il s'est approché imprudemment, etc. : dans tous ces cas et autres analogues, le maitre est responsable et devra payer des dommages-intérêts (1384).

Cette responsabilité est fort étendue; les développements considérables de l'industrie en présentent chaque jour des applications nouvelles et imprévues; les tribunaux se montrent sévères.

3o Les instituteurs et les artisans sont responsables du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance.

Il y a une grande différence entre la responsabilité, des personnes indiquées dans la première et dans la troisième classe et la responsabilité des maîtres et commettants. En effet, les premiers, le père et l'instituteur, par exemple, peuvent faire tomber la présomption légale · de faute qui pèse sur eux; ils peuvent prouver par tous les moyens qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à leur responsabilité. Au contraire, les maîtres et commettants ne peuvent faire une pareille preuve, ils sont présumés en faute d'une façon absolue: on n'a pas voulu qu'ils se montrassent négligents dans le choix de leurs subordonnés et pussent impunément prendre des gens vicieux qui useraient de leurs fonctions pour faire le mal. Si on les avait admis à s'excuser, on aurait eu des procès sans fin.

Lorsque l'auteur du fait, dans les trois cas, est responsable, la personne lésée peut l'attaquer, et elle le fera certainement si le coupable est solvable. Dans le cas ou le père, maître, instituteur, etc., seraient condamnés, ils auraient un recours contre l'auteur du dommage, s'ils pouvaient démontrer qu'il a agi sciemment et en connaissance de

cause.

Ajoutons enfin un dernier cas de responsabilité.

Le propriétaire d'un animal, ou celui qui s'en sert pendant qu'il est à son usage, est responsable du dommage que l'animal a causé, suit

que l'animal fût sous sa garde, soit qu'il fût égaré ou échappé (1385). Le propriétaire d'une maison est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu'elle est arrivée par suite de défaut d'entretien. ou par le vice de sa construction (1386).

L'étude des règles que nous venons d'examiner sera complétée par la comparaison à faire avec les dispositions qui gouvernent les infractions pénales.

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Des infractions à la loi pénale.

Nous connaissons déjà la dénomination et la classification légales de ces infractions; elles sont en effet ou des contraventions, ou des délits, ou des crimes.

Le législateur a pensé que, pour assurer l'exécution de certaines règles dont l'observation était absolument nécessaire pour la sécurité et l'ordre dans la société, il fallait des sanctions efficaces: les peines de simple police contre les auteurs de contraventions, les peines correctionnelles contre les auteurs de délits, et les peines afflictives et infamantes contre les auteurs d'un crime, sont les sanctions que la société a le droit d'infliger au coupable.

Avant d'examiner en elles-mêmes ces trois causes qui donnent naissance au droit social, comparons-les aux délits et quasi-délits civils. Je ne reviens pas sur le principal caractère déjà signalé, et qui est commun aux deux sortes de faits : les uns et les autres sont des faits illicites.

1° La première différence est dans les sanctions.

L'infraction à la loi pénale, crime, délit ou contravention, entraine contre le coupable une punition, amende, privation de droit, châtiment ou prison, infligée par la société. Mais elle n'entraîne pas nécessairement une réparation pécuniaire, car il peut n'y avoir de dommage

pour personne.

Le délit ou quasi-délit civil entraîne au contraire cette réparation, car c'est son effet essentiel : s'il n'y a pas de personne lésée, s'il n'y a pas par conséquent de dommages-intérêts à réclamer, il n'y a ni délit ni quasi-délit civils.

Un même fait peut avoir en même temps les caractères d'une infraction pénale et d'un délit ou quasi-délit; alors il aura pour conséquences possibles contre le coupable: 1° une condamnation à la peine. sociale, et 2° une condamnation à des dommages-intérêts.

Une tentative de crime est punie comme le crime même; si l'ad qui la constitue ne cause aucun dommage, ce n'est pas même un det civil (2 P.).

Un homicide par imprudence peut être un quasi-délit civil, et c'est un délit pénal puni de peines correctionnelles (319 P.).

Un mineur, un domestique dans l'exercice de ses fonctions, commettent un crime: le père ou le maitre responsables sont coupables d quasi-délit, etc.

2o La juridiction peut être différente.

S'il y a infraction pénale, la juridiction compétente pour prononcer la peine est et ne peut être qu'un tribunal de simple police, un tr.bunal correctionnel ou une cour d'assises.

Les dommages-intérèts résultant d'un délit ou quasi-délit qui Le serait pas une infraction à la loi pénale, ne peuvent être pronone's que par un tribunal civil.

Si l'infraction pénale est en même temps dommageable à autrui, la demande en dommages-intérêts peut être, au gré de la personne lésée. portée devant le tribunal chargé de la répression ou devant le tribunal civil (3, I. C.).

Lorsque le tribunal criminel est saisi, si une instance en dommagesintérêts était déjà pendante devant le juge civil, celui-ci doit surseir jusqu'à ce que le procès criminel soit vidé.

3o La personne lésée peut renoncer à demander des dommages-intérêts, ou transiger sur le montant et la nature de l'indemnité; mas ni la transaction ni la renonciation ne peuvent arrêter la poursuite du ministère public poursuivant la répression et requérant une pénalite contre le coupable (4, I. C.).

4° L'action pénale est éteinte par la mort survenue du coupable; l'obligation de payer des dommages-intérêts est, au contraire, transmissible, et les héritiers de l'auteur du mal peuvent être poursuiv.s en réparation devant le tribunal civil.

5o Si le délit est purement civil, sans être une infraction à la le: pénale, l'action en dommages-intérêts est prescriptible par trente ans seulement; mais s'il y a eu en même temps crime, délit ou contraven tion, la durée de l'action civile est la même que celle de l'action pénal ou publique, et nous verrons que la prescription est plus courte.

6o La contrainte par corps ayant été supprimée en matière civile, si un délit ou un quasi-délit ne donnent lieu qu'à des dommages-inrêts, la personne lésée qui en aura obtenu n'aura pas ce moyed d'exécution contre le délinquant condamné (L. 22 juillet 1867).

Mais s'il y a eu infraction à la loi pénale, crime, délit ou contravention, les particuliers qui ont obtenu condamnation du coupable at paiement des frais ou de dommages-intérêts, peuvent encore user de

la contrainte par corps contre le coupable, mais à une condition: il faut que le crime, le délit ou la contravention aient été reconnus par la juridiction criminelle, soit qu'elle ait jugé en même temps l'action civile et l'action publique, soit que préalablement elle ait prononcé la peine et que la victime ait ensuite intenté l'action privée devant les tribunaux civils.

Reste maintenant à examiner quand il y aura crime, délit ou contravention.

On comprend qu'il nous est impossible de signaler ici les différentes espèces de crimes, de délits et de contraventions, et de rechercher la définition et le caractère de chacun d'eux. Nous ne pouvons étudier que les principes les plus généraux.

L'infraction est un acte imputable à un auteur responsable, et qui a consisté à faire ce que défendaient, à ne pas faire ce qu'ordonnaient, sous peine de châtiment, les lois qui ont pour objet la sécurité publique (1, P.).

Quels sont les éléments de l'infraction pénale?

Pour bien comprendre la réponse, il faut suivre les diverses étapes que fait en quelque sorte l'auteur, depuis le moment où il a eu la pensée du crime jusqu'au moment où il l'a exécuté.

La pensée d'abord de violer la loi : voilà le premier fait. Il n'est pas punissable; difficile à saisir et à prouver, plus difficile à imputer à l'auteur, qui a peut-être eu involontairement ce mouvement détestable, il ne trouble pas assez la société pour qu'elle agisse.

Ce n'est plus unt pensée involontaire, ni même follement accueillie; elle est plus que caressée par une imagination coupable: elle est voulue, la résolution est prise de violer la loi. Fût-elle prouvée, elle n'a pas paru au législateur une atteinte assez grave à la sécurité publique pour en punir l'auteur.

Celui-ci est allé plus loin: un acte préparatoire a suivi la résolution. De fausses clefs ont été achetées pour commettre un vol, du poison pour un empoisonnement, etc. La loi, cette fois, pourrait punir l'auteur de ces faits parfaitement prouvés et fort significatifs; elle pourrait estimer que la société est assez menacée dans sa sécurité. Elle ne le fait pourtant pas, voulant encourager l'auteur à abandonner son projet si elle le punissait quand même après ses préparatifs, eile le pousserait à commettre le mal, puisqu'il n'y aurait plus pour lui qu'une question de plus ou moins de gravité dans la pénalité contre la chance d'avoir les bénéfices de l'infraction, s'il échappait au châtiment par la fuite ou faute de preuves.

Un nouveau pas est encore franchi: un commencement d'exécution a eu lieu; mais l'auteur s'est arrêté avant d'avoir causé aucun préju

dice, il a volontairement abandonné sa résolution. Tant mieux, le législateur s'en félicite, il ne le punit pas puisqu'il s'arrête encore à temps.

Enfin, l'auteur manifeste sa résolution par un commencement d'exécution, sans que rien vienne démontrer qu'il n'a pas persisté jusqu'au bout au contraire, si l'exécution est suspendue ou si elle manque son effet, il est prouvé que ç'a été par des circonstances indépendantes de sa volonté (2, P.).

Il y a eu dans ce dernier cas tentative.

Si l'infraction était un crime, la tentative, sauf de rares exceptions, est punie comme le crime même (2, 319 P.).

Si l'infraction est un délit, la tentative n'est considérée comme délit que dans les cas spécialement déterminés par la loi ainsi, celui qui aura tenté de contraindre par voies de fait ou menaces, tenté de corrompre par promesses, offres, dons ou présents, un fonctionnaire de l'ordre administratif pour obtenir de lui des procès-verbaux, certificats, etc., contraires à la vérité, sera puni des mêmes peines correctionnelles que s'il avait commis le délit, c'est-à-dire contraint ou corrompu, en effet, l'agent (3, 177, 178 P.).

En principe, sauf une loi expresse, la tentative de contravention reste impunie.

Il est très-délicat, très-difficile souvent, en pratique, de distinguer le cas où il n'y a eu que des actes préparatoires de celui où il y a eu tentative.

N'oublions pas non plus que si, en principe, les actes préparatoires ne sont pas punis comme devant conduire au crime,, ils peuvent l'être comme étant des délits distincts, définis par la loi. Ainsi le port d'armes prohibées constitue en lui-même un délit, que le porteur ait eu ou non l'intention de commettre un crime (314 P.).

Quand l'exécution a été complète, nous venons de voir que si, par une circonstance indépendante de la volonté de l'auteur, l'effet n'a pas suivi; si la personne empoisonnée, par exemple, soignée à temps et ayant pris un contre-poison, a guéri, il y avait tentative. La pratique dit qu'il y a eu tentative achevée, crime manqué.

Tentative inachevée, c'est-à-dire exécution arrêtée; tentative achevée, c'est-à-dire crime manqué ou crime achevé la peine est toujours la même.

L'infraction pénale peut avoir été commise par plusieurs agents. Tantôt ils ont participé à l'acte comme auteurs, tantôt comme complices.

Les auteurs sont ceux qui ont exécuté physiquement les actes constitutifs du crime ou du délit. On appelle ainsi les faits néces

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