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voir que Jérusalem reprenait son indépendance, et que l'autel du Dieu d'Israël s'était relevé sur les débris de l'idole de Jupiter, il jura qu'il irait lui-même dans cette ville, et qu'il en ferait le tombeau de tous les Juifs; mais pour le punir, dit l'Écriture, «<le Seigneur frappa ce prince d'une plaie incurable « qui déchirait ses entrailles. » Loin d'être détourné de son dessein par cette maladie1, et ne respirant que vengeance, il voulut qu'on accélérât sa marche; mais, lorsque ses chevaux couraient avec impétuosité, il tomba de son char, et tous ses membres furent meurtris par cette chute.

Bientôt sa maladie empira; toute sa chair se pourrissait, et il sortit des vers de son corps. Accablé de douleurs, humilié et ne conservant plus d'espérance, Antiochus se repentit de ses fureurs. Les livres saints assurent qu'il dit ces paroles : « Il << est juste que l'homme soit soumis à Dieu, et que celui qui << est mortel ne s'égale pas au Dieu souverain. »>

Ce monarque expirant nomma pour son successeur Antiochus Eupator, en lui recommandant de se conduire avec modération et justice; il écrivit ensuite une lettre aux Juifs pour les engager à être fidèles à son successeur, et pour les assurer qu'ils seraient traités avec douceur. Après avoir fait ces dispositions, reconnu la puissance de Dieu et témoigné un tardif repentir, Antiochus mourut. Lysias, parent du jeune roi, fut chargé de l'administration du royaume.

Le nouveau monarque de Syrie écrivit à Lysias qu'il savait que les Juifs n'avaient jamais voulu consentir à changer de coutumes et de religion, que c'était là le seul objet de leur révolte, et que, voulant que ce peuple jouît de la paix comme les autres, il ordonnait que leur temple leur fût rendu, et qu'on leur permît de suivre les lois de leurs ancêtres. Il chargeait Lysias d'envoyer des députés à Jérusalem, afin d'y conclure un traité. Il joignit à cet ordre une lettre pour les Juifs, qui contenait les mêmes dispositions.

An du monde 3841.. Avant Jésus-Christ 163.

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Judas, aussi habile politique que brave guerrier, crut nécessaire de se donner une garantie de la solidité de cette paix, et il implora à cet effet la protection des Romains. Quintus Memmius et Titus Manlius, envoyés du sénat, qui se rendaient à Antioche, écrivirent au peuple juif, et lui confirmèrent les promesses de Lysias et du roi.

La méfiance de Machabée n'était que trop fondée. Antiochus, trompé par des Juifs apostats, et par l'avidité de ses courtisans, qui renonçaient avec regret à leur domination et à leurs pillages dans la Judée, déclara de nouveau la guerre aux Juifs, dont il voyait avec jalousie les victoires récentes sur les Arabes et les Galiléens.

L'auteur de tous les maux de Jérusalem, le perfide Ménélaüs, excitait de tous ses efforts là vengeance des Syriens; mais il se vit enfin victime de sa trahison. Lysias apprit au roi que les cruautés et les débauches de cet homme avaient donné naissance aux troubles de la Judée et à tous les malheurs qui en étaient résultés; il fut condamné à mort et précipité du haut d'une tour.

Bientôt le roi vint attaquer Judas avec son armée que commandait Nicanor; elle était composée de cent dix mille hommes de pied, cinq mille chevaux, vingt-deux éléphants, et trois cents chariots armés de faux.

Machabée, plein de confiance dans la protection du Seigneur, après avoir ordonné des prières générales, marcha sans crainte au-devant du roi, et donna pour mot d'ordre la victoire de Dieu. Ayant pris avec lui les plus braves de ses jeunes guerriers, il attaqua, la nuit, le quartier d'Antiochus, passa au fil de l'épée quatre mille hommes, tua le plus grand nombre des éléphants, et répandit l'effroi dans le camp.

Quelque temps après, il remporta une autre victoire sur l'armée royale; ce fut dans cette seconde bataille qu'un Juif nommé Éléazar, et que quelques versions disent être un des frères de Judas, fit l'action la plus héroïque avec la certitude d'y perdre la vie. Ayant aperçu de loin un superbe éléphant

que la richesse de son harnois fit reconnaître pour l'éléphant du roi, il s'élança, s'ouvrit un passage au travers des ennemis, se jeta entre les jambes de cet animal, et mourut écrasé sous son poids1. Le roi ne montait point cet éléphant; mais l'éclat d'un coup si hardi augmenta le courage des Juifs et la crainte des Syriens. Cependant Judas, ne pouvant exterminer un si grand nombre d'ennemis, se vit obligé de s'enfermer, les uns disent à Bethsura, les autres à Jérusalem, où le roi vint l'assiéger. Sa perte paraissait assurée, lorsque sur ces entrefaites le roi apprit que Philippe, auquel il avait confié le gouvernement de la Syrie, venait de se révolter, probablement à l'instigation des Romains, qui voulaient favoriser le jeune Démétrius, fils de Séleucus, et le placer sur le trône. Ces nouvelles forcèrent Antiochus à renoncer à ses projets. Il se réconcilia avec Machabée, l'embrassa, le déclara prince de la Judée, enrichit le temple saint de ses présents, et y offrit un sacrifice.

Les craintes d'Antiochus ne tardèrent pas à se vérifier. Démétrius Soter s'empara de la plus grande partie de la Syrie, après avoir vaincu Antiochus et Lysias.

Sous ce nouveau règne, la paix dont les Juifs jouissaient depuis si peu de temps fut troublée par la trahison d'un habitant de Jérusalem, nommé Alcime, qui avait usurpé autrefois la grande-prêtrise, et qui était souillé d'idolâtrie. Cet homme vint trouver Démétrius, lui fit de riches présents, et le trompa sur l'état de la Judée, en lui disant que Machabée et les assydéens opprimaient le peuple par leurs rigueurs, et le portaient sans cesse aux séditions et à la guerre. Démétrius, persuadé, d'après les faux avis de ce traître, que la tranquillité publique était inconciliable avec l'autorité de Judas, ordonna à Nicanor d'entrer à la tête d'une armée en Judée, de se saisir de Machabée, et d'investir Alcime du sacerdoce. Nicanor obéit à regret; il estimait Judas, et, l'ayant trouvé en bon état de

■ Même année, 3841.

défense, il persuada au roi de renoncer à sa vengeance, et conclut un nouveau traité avec les Juifs.

Le libérateur de Jérusalem, parvenu à une paix qu'il croyait durable, se maria et jouit quelque temps du repos de sa gloire. Mais Alcime parvint à aigrir de nouveau le monarque syrien, en lui faisant croire que Nicanor le trahissait. Le général reçut de nouveaux ordres; il ne lui fut plus possible d'en différer l'exécution, et la guerre recommença.

Judas, suivant sa coutume, étant venu au-devant de l'en-. nemi, déclara à son armée que l'ombre d'Onias lui était apparue, et lui avait promis la victoire en lui donnant une épée d'or. Les Juifs, rassurés par ce prodige et affermis par leurs prières, ne comptèrent plus leurs ennemis; ils se précipitèrent sur eux, les mirent en déroute, et leur tuèrent trentecinq mille hommes. Nicanor périt dans cette bataille. Judas célébra sa victoire par un sacrifice solennel, et ordonna qu'elle serait toujours fêtée dans la suite des temps. Les Juifs, irrités, suspendirent la tête de Nicanor aux murs de la forteresse, et sa main à la porte du temple. A cette époque Démétrius était devenu le maître de toute la Syrie par la mort d'Antiochus et de Lysias. Judas, instruit de la grande puissance des Romains, envoya à Rome deux ambassadeurs, nommés Eupolime et Jason. Ils conclurent avec le sénat un traité d'alliance, dont les principales dispositions furent que les Juifs ne donneraient aucun secours aux ennemis des Romains; mais qu'au contraire ils fourniraient des troupes aux armées de la république sans recevoir ni solde ni munitions. Le sénat promettait de son côté que, s'il survenait une guerre au peuple juif, il l'assisterait de bonne foi, selon que le temps le permettrait. En conséquence, le sénat écrivit à Démétrius pour le menacer de ses armes s'il ne cessait de persécuter les Juifs. Malheureusement cette lettre arriva trop tard en Asie. Démétrius, irrité de la défaite de Nicanor, chargea de sa vengeance Bacchide et Alcime. Ces deux généraux entrèrent en Judée, s'emparèrent de Masaloth, et attaquèrent à l'impro

viste Judas, qui s'était campé à Laïse, et qui n'avait avec lui que trois mille hommes choisis. Machabée, sans espoir de vaincre, mais incapable de crainte, résista aux conseils de ceux qui l'engageaient à fuir. Il chargea l'ennemi, enfonça l'aile droite que commandait Bacchide; mais l'aile gauche des Syriens l'ayant tourné, les efforts de sa vaillance devinrent inutiles. Le combat avait duré depuis le matin jusqu'au soir. Judas, après avoir longtemps résisté à la foule qui l'entourait, tomba percé de coups. Il expira, et peu de ses braves guerriers échappèrent à la mort par la fuite 1.

Jonathas et Simon emportèrent le corps de Judas à Modin, et l'enterrèrent dans le sépulcre de leurs pères. Tout Israël pleura sa mort, en s'écriant.: « Nous avons perdu l'homme << invincible qui seul avait sauvé le peuple de Dieu. »

Bacchide, vainqueur, exerça de grandes vengeances sur les Juifs, et donna le gouvernement du pays aux plus impies. Israël fut accablé d'une si grande affliction, qu'on n'en avait pas vu de pareille depuis la captivité.

Les amis de Judas, indignés et persécutés, se rassemblèrent et prirent Jonathas, frère de Machabée, pour leur chef. Jonathas, à la tête d'une troupe intrépide, marcha contre Bacchide, le battit, et le força de se retirer. L'impie Alcime s'était emparé du sacerdoce; mais, au moment où il voulait profaner le temple, Dieu, dit l'Écriture, le frappa de paralysie, et termina ainsi sa coupable vie. Jonathas, délivré de ses deux ennemis, gouverna deux ans Israël en paix. La guerre recommença de nouveau; mais Bacchide ayant encore été vaincu par les Juifs que commandait Simon, frère de Jonathas, le général syrien conclut la paix, et ne revint plus depuis en Judée. Ainsi la guerre cessa. Jonathas établit sa résidence à Machmas, ramena la justice en Judée, et en bannit toute impiété.

Après de si longues guerres, il aurait été difficile aux Juifs de se relever si les dissensions de leurs ennemis ne fussent An du monde 3843.- Avant Jésus-Christ 191.

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