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Ordonnance de 1681

des gabares.

La formule d'Ancône fait courir le risque donec navis appulerit in portum ibique salva steterit horas 24.

La formule de Hambourg fait courir le risque ab horâ et die quo solverit dieta navis et appulerit in portum, (ou bien) ab horâ et die quo prædicta merces deportata sunt in portum.............. vel navalia, inferendi dicta navi causâ; et durabit isthac assecuratio donec dicta merces pervenerint in portum......... et exoneratæ, atque in salvo fuerint absque ullo detrimento et incommodo.

Notre Ordonnance, dressée d'après les anciennes lois maritimes, a pris un juste milieu sur cette matière. Si le tems des risques n'est point réglé par › le contrat, il courra, à l'égard du vaisseau, ses agrès, apparaux et victuailles, du jour qu'il aura fait voile jusqu'à ce qu'il soit ancré au port de sa » destination, et amarré à quai; et quant aux marchandises, sitôt qu'elles au

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Effets mis dans ront été chargées dans le vaisseau, ou dans des gabares, pour les y porter, » jusqu'à ce qu'elles soient délivrées à terre. » Art. 13, titre des contrats à la grosse. Art. 5, titre des assurances. Ibiq. Valin et Pothier, no. 63. Cette règle est retracée par tous nos auteurs.

Incipit assecuratio ab eo tempore quo merces assecuratæ ad navalia aut scaphas, undè et per quas navi inferri debent, adductæ sunt. Kuricke, pag. 836, no. 16. Assecuratio initium habebit à tempore mercium in navalia translatarum, ut imponantur navi. Loccenius, pag. 983, n°. 9.

La raison en est que le risque maritime commence dès le moment que la marchandise est exposée à la mer, soit dans le navire, soit dans le trajet pour parvenir au navire. Celui qui fait assurer sa marchandise, est présumé vouloir se mettre à couvert de tous les risques maritimes. Tel est vœu de l'assurance. Ce vœu serait manqué, si les assureurs ne répondaient pas de la perte arrivée sur mer, sous prétexte que les marchandises qu'on transportait pour être embarquées dans le navire ont été absorbées par les flots, dans le cours de ce transport.

Le transport par gabares n'est employé que parce que le navire ne pouvant s'avancer jusqu'au rivage, il faut y suppléer par le moyen des gabares, qui sont alors présumées faire partie du navire même.

Mais il faut que le transport par gabares se fasse du port même, ou de la rade où le vaisseau est ancré; car s'il s'agissait de remonter ou de descendre une rivière pour parvenir au navire, je crois qu'il faudrait un pacte spécial, ou que la formule imprimée de la police en renfermât la clause. Telle qu'on voit dans les formules de Bordeaux et de Rouen. Vide Marquardus, lib. 2, cap. 13, no. 62.

Si, pour décharger les marchandises à terre, il faut se servir de gabares, les assureurs en courent le risque, pourvu qu'il s'agisse de les transporter sur le quai du port ou de la rade où le navire est ancré; car si on les transportait ailleurs, les assureurs n'en seraient point tenus.

En 1779, le navire du sieur Angleys arriva au Fort-Royal, île Martinique, On déchargea les marchandises dans des bateaux de transport, pour les faire passer à Saint-Pierre, bourg de la même île. Un de ces bateaux périt. Le sieur Angleys voulait rejeter cette perte sur ses assureurs d'entrée. Je lui répondis qu'il n'était pas fondé, parce que le voyage d'entrée était fini au FortRoyal; qu'autre chose serait, si la marchandise eût été déchargée par gabares, pour être portée au Fort-Royal même, où le voyage d'entrée se trouvait terminé.

Le mot gabare signifie toute chaloupe, tout bateau ou lacon, en un mot, tout petit bâtiment employé pour transporter du quai ou de la rade, les marchandises jusqu'au navire dans lequel elles doivent être embarquées, et vice versâ. Réglement d'Amsterdam, art. 4. (Vid. suprà, ch. 6, sect. 6, § 3, où je parle des marchandises de divers navires, transbordées dans une même chaloupe, qui périt).

$3. Observations gé

Pour résumer ce que je viens de dire, j'observerai qu'au défaut de pacte spécial, le risque courra, à l'égard du vaisseau, du jour qu'il aura fait voile, nérales. et la prime sera acquise (pour les deux tiers, suivant les cas ), quoique le voyage soit ensuite changé ou rompu, pourvu toutefois que la destination n'ait pas été changée ab ovo. (Infrà, sect. 11) (1).

Le risque pour le corps finira, lorsque le navire sera ancré au port de sa destination, et amarré à quai.

Le risque sur les marchandises commencera dès qu'elles seront chargées dans le vaisseau, ou dans les gabares pour les porter, et ne finira que lorsqu'elles auront été délivrées à terre.

Il n'est donc pas nécessaire qu'elles soient parvenues au magasin ou au pouvoir de l'assuré, ainsi que le voulait le Guidon de la mer. De sorte que si la barrique posée sur le quai roule dans la mer, les assureurs n'en répondent

(1) L'usage actuel de notre place est de stipuler que le risque sur le corps courra du jour que le navire aura commencé de prendre charge; mais comme cet usage peut varier, je me réfère sur ce point à la règle générale établie par l'Ordonnance. T. II.

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$4.

Si le tems n'a pas

été limité, doit-il

l'être arbitrio boni viri?

.

point. (Suprà, ch. 12, sect. 46). Ils ne répondent également point des autres fortunes de terre. (Suprà, ch. 12, sect. 42, 43 et 45. Vide Straccha, gl. 13).

En 1753, un négociant s'était fait assurer in quovis, 8,000 liv., en espèces d'or et d'argent qu'il attendait de Buenos-Aires. En 1764, les assureurs requirent que les risques fussent déclarés finis. L'assuré soutenait que ses fonds n'étaient pas encore arrivés, et que la police ne renfermait aucun terme. Sentence de l'amirauté de Paris, qui déchargea les assureurs, sur le fondement que les risques ne doivent pas être éternels, et que onze ans d'attente doivent suffire. Pothier, no. 63.

La même question fut élevée parmi nous dans les circonstances suivantes : Les sieurs Garnier, Mallet et Dumas, de Cadix, s'étaient rendus assureurs sur le corps du vaisseau Nostra Senora de Oranzaza, capitaine Joseph Ventura, de sortie de Cadix jusqu'à Cumana, et de retour à Cadix.

Le 19 décembre 1752, ils se firent réassurer à Marseille 18,000 liv., avec clause qu'en cas de perte, ils ne seraient tenus de produire d'autre sorte d'écriture, que le seul acquit du paiement qu'ils en auraient fait aux premiers assurés. Ce navire arriva heureusement à Cumana, dans l'Amérique méridionale. Il y fit un long séjour.

En 1756, Garnier, Mallet et Dumas se pourvurent au consulat de Cadix, en résiliation du risque, attendu le trop long séjour que le navire faisait à Cumana; ils furent déboutés de leur requête. Enfin, ils apprirent que le navire était devenu innavigable à Cumana. Cet accident fut notifié aux réassureurs de Marseille, par exploit du 2 juin 1761.

Le consulat de Cadix condamna Garnier, Mallet et Dumas à payer la perte. Ils la payèrent par quittance du 26 avril 1762.

Le 4 septembre suivant, les sieurs Kick et Durantet, porteurs de la police de réassurance, se pourvurent contre les réassureurs, et communiquèrent la quittance dont je viens de parler.

Les réassureurs opposaient que le risque s'était évanoui par le laps de dix années, et qu'un navire qu'on laisse croupir pendant si long-tems dans un port, ne peut que devenir innavigable.

Sentence du 26 juin 1764 ( plaidant M. Gignoux pour les sieurs Kick et Durantet), qui régla la cause à droit sur le fond et principal, et qui condamna les réassureurs au paiement provisoire des sommes réassurées.

Ceux-ci appelèrent de cette sentence au chef du provisoire. Ils obtinrent un décret de surséance. Arrêt du 26 juin 1765, au rapport de M. de Fortis,

qui révoqua le décret de surséance, et qui confirma la sentence, avec amende et dépens.

Ensuite de cet arrêt, tous les réassureurs, à l'exception de B***, qui avait fait faillite, payèrent les sommes par eux réassurées, en principal, intérêts et dépens, et renoncèrent à la poursuite du fond.

Seconde sentence rendue le 15 novembre 1766, qui condamna les administrateurs de la faillite de B***. à payer définitivement la somme de 2,000 liv. par lui souscrite, et qui les y condamna sous l'hypothèque du 19 décembre 1752, jour de la réassurance reçue par courtier. Cette dernière sentence fut acquiescée.

On ne saurait disconvenir que les réassureurs étaient non recevables à contester le remboursement d'une perte payée par les premiers assureurs, dont ils étaient garans. Mais il paraît dur qu'un navire devenu innavigable dans un port lointain, où on l'a laissé oisif pendant plusieurs années, soit à la charge des assureurs. Cependant, s'il n'y a aucune fraude de la part des assurés, la règle générale est pour ceux-ci. La loi n'a établi sur ce point aucun délai fatal; et les assureurs doivent s'imputer de n'avoir pas limité le tems de l'assurance. Car si la police renferme quelque pacte particulier au sujet de tout ce que dessus, il faut s'y tenir.

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Au ch. 12, sect. 11, j'ai parlé du capitaine qui met à la voile en un tems non opportun, ou qui néglige de profiter du tems convenable.

Au ch. 3, sect. 4, j'ai fait voir que la survenance de la guerre ou de la paix n'altère en rien l'assurance, et ne procure ni augmentation ni diminution de prime.

L'assurance faite en tems de paix n'est pas annulée par la survenance de la guerre. Ainsi jugé toutes les fois que la question s'est présentée, et entre autres, par sentence du 6 juin 1747, en faveur de Jean-André Boulle, contre ses assureurs sur le corps et facultés du vaisseau l'Aurore. On voulait distinguer les cas insolites et imprévus d'avec les cas ordinaires. Mais cette distinction fut rejetée. Vide suprà, ch. 12, sect. 1, S1, tom. 1.

CONFÉRENCE.

CLIX. Ce sont les conventions insérées dans les polices d'assurance qui font la loi entre les parties. Ces conventions sont presque toujours établies d'après les usages et les formules particuliers des différentes places maritimes.

Mais on sait qu'à défaut de pacte spécial qui limite le tems des risques, c'est-à-dire dans les assurances à tems non limité, les assureurs sont responsables, à l'égard du corps du navire, du

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jour où il aura fait voile jusqu'au jour où il sera ancré et amarré au port du lieu de sa destination, et à l'égard des marchandises, du jour où elles auront été chargées dans les gabares jusqu'au jour où elles seront délivrées à terre. ( Art. 328 et 341 du Code de commerce). De manière qu'il n'est pas nécessaire que les marchandises assurées soient parvenues au magasin ou au pouvoir de l'assuré, pour que les assureurs soient déchargés des risques, comme l'exigeaient les art. 7 du chap. 5, et 17 du chap. 9 du Guidon de la mer. Une barrique déchargée sur le quai viendrait ensuite à rouler dans la mer; les assureurs n'en répondraient pas davantage que des autres fortunes de terre. - ( Au reste, voyez la sect. 9 du tit. 10, tom. 3 de notre Cours de droit commercial maritime, sur le tems et le lieu des risques maritimes).

Mais, comme le demande Emérigon, dans ces assurances à tems illimité, les risques peuvent-ils être toujours sans fin, et ne peut-on pas les faire fixer arbitrio boni viri, aut judicis? Enfin quand doivent-ils être réputés finis?

Il est d'une éternelle vérité que tout doit avoir une fin; par conséquent, il doit être une époque où le risque est réputé fini. Aux autorités rapportées par Emérigon, il faut citer la sentence de l'amirauté de Paris, rendue contre le sieur Huguet de Semonville, et qui déchargea les assureurs, sur le fondement que les risques ne doivent pas être sans fin, et que onze ans d'attente devaient suffire. - (Voyez Pothier, assurances, no. 63 ).

Nous dirons, avec M. Estrangin, qu'il devrait, en pareil cas, être donné un délai à l'assuré avant de le déclarer déchu, parce que la loi n'a établi sur ce point aucun délai fatal, et que les assureurs doivent s'imputer de n'avoir pas limité le tems de l'assurance. - (Du reste, voyez nos conférences sur les sections auxquelles renvoie Emérigon).

$ 1.

Voyage simple.

SECTION III.

Diverses sortes de voyages.

Le réglement du 1. mars 1716, art. 15 et 16, distingue le voyage simple d'avec le voyage en caravane. Mais ce mot, voyage simple, est un terme équivoque, qu'il est nécessaire d'expliquer.

En matière d'assurance, toute navigation assurée, quelque compliquée qn'elle soit, constitue un voyage simple : Simplex duntaxat et unum. On considère moins le voyage du navire que celui qui est déterminé par la police : Viaggium promissum et comprehensum in assecuratione. Roccus, not. 18. Infrà, sect. 4, § 1.

Ainsi, l'assurance faite pour l'aller ou pour le retour, ou seulement pour une partie de la route, ou pour un tems limité, caractérise le voyage assuré vis-à-vis des parties contractantes.

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