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seule profession. Tout était commun entre eux; ils n'avaient point de serviteurs, croyant qu'assujettir les hommes c'était offenser la nature qui les rend tous égaux. Des prêtres, choisis par eux, recevaient tout le fruit de leur travail et les nourrissaient tous. Cette secte, peu nombreuse et séparée du reste de la nation, pouvait être regardée comme une communauté religieuse, et n'avait aucune influence dans les affaires publiques.

Un homme appelé Judas fonda une quatrième secte dont l'ardeur et l'activité entraînèrent une grande partie du peuple. Semblables en tout autre point aux pharisiens, ils soutenaient qu'on ne doit reconnaître pour seigneur et pour roi que Dieu seul; et leur fanatisme républicain leur aurait fait souffrir toutes sortes de tourmens et de supplices, plutôt que d'accorder à quelque homme que ce fût le nom de seigneur ou de maître. L'esprit turbulent de ces derniers sectaires fut, comme on le verra bientôt, une des principales causes de la ruine de leur patrie.

Création d'une qua

trième secte

parmi les

Juifs.

L'empereur Auguste avait nommé Syrhénéus Révolte gouverneur de Syrie, avec ordre d'y faire le dé- Parm nombrement des biens de tous les particuliers. Cette mesure excitait le mécontentement des Juifs. Le grand-prêtre Joasar voulut vainement leur persuader de s'y soumettre. Ce même Judas, dont nous venons de parler, de concert avec un pharisien nommé Sadoch, excita le peuple à la révolte,

en lui disant que ce dénombrement était une preuve évidente du projet formé par l'empereur de ruïner les Juifs et de les réduire en servitude. Il leur rappela tous les miracles de Dieu en leur faveur, et l'obligation sacrée de défendre leurs lois et leur indépendance. Enfin il leur promit, au nom du Seigneur, les plus grands succès, s'ils se dévouaient pour servir sa cause. Aussitôt le feu de la révolte se répandit partout; ce ne fut, de tous côtés, que meurtres et brigandages; on pillait amis et ennemis, sous prétexte de défendre la liberté publique: on accusait les riches et les grands de trahison pour les tuer et s'emparer de leurs biens. La rage des séditieux fut portée à un tel degré de fureur qu'une grande famine qui survint n'arrêta pas le cours de leurs cruautés, et qu'on vit même le feu de cette guerre civile porter l'embrasement jusque dans le temple de Dieu.

Syrhénéus, après avoir répandu beaucoup de sang, apaisa cette première révolte, et acheva le dénombrement qui eut lieu trente-sept ans après la bataille d'Actium. Le gouverneur confisqua les biens d'Archélaüs, et maintint Héro de et Philippe dans les tétrarchies qu'Hérode-le-Grand leur avait laissées par testament. Salomé, sœur de ce monarque, mourut dans ce temps et laissa à Julie ́sa fille sa toparchie, dont les Romains lui confirmèrent la possession.

Syrhénéus, pour calmer l'esprit des révoltés,

déposa le grand-prêtre Joasar, leur ennemi, et donna sa charge à Ananus.

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Peu après l'empereur Auguste mourut, et Tibère lui succèda *. Ce prince donna le commandement de la Judée à Valérius Gratus. Plusieurs grands-prêtres furent successivement déposés par le gouverneur : le dernier qu'il nomma fut Caïphe; et Gratus lui-même, après onze ans de gouvernement, se vit remplacé par Ponce Pilate. Hérode le tétrarque se concilia l'amitié de Tibère, et bâtit en son honneur une ville qu'il nomma Tibériade.

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Ce fut sous leur administration que périt le Sauveur du monde, arrêté par Caïphe, méprisé par Hérode, et livré aux Juifs par Pilate.

Le gouverneur romain envoya de Césarée à Jérusalem des troupes, dont les drapeaux portaient l'effigie de l'empereur. Ces images révérées

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à Rome exigeaient des honneurs contraires à la loi des Juifs.

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drapeaux

Ils vinrent en foule supplier Pilate de faire por- Renvoi des ter ailleurs ses drapeaux. Il refusa d'y consentir, romains. disant que c ce serait offenser l'empereur. Leurs instances redoublerent; Pilate monta sur son tribunal, et fit prendre les armes à ses troupes qui enveloppèrent les Juifs, en les menaçant de les tuer s'ils ne se soumettaient. Tous alors découvrirent leurs poitrines, et s'écrièrent que le main

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Nouvelle révolte par

tien de la loi leur était plus cher que la vie. Pilate, vaincu par ce zèle ardent, fit reporter les draà Césarée.

peaux

Quelque temps après le gouverneur, projetant

miles Juifs. de faire construire des aquéducs, crut nécessaire de tirer de l'argent du trésor du temple. Le peuple se souleva encore, mais Pilate réprima cette sédition, après avoir fait mourir un grand nombre de révoltés. Il voulut ensuite soumettre les Samaritains qui avaient pris les armes pour s'emparer de la montagne de Garizim, croyant qu'ils trouveraient dans le sein de cette montagne un trésor et des vases sacrés qu'on disait y avoir été cachés par Moïse. Les rigueurs que le gouverneur exerça dans cette expédition déterminèrent les Samaritains à l'accuser près de Vitellius, gouverneur de Syrie. Celui-ci commanda à Pilate d'aller à Rome pour se justifier. Il vint lui-même à Jérusalem pour la fête de Pâques; on l'y reçut avec de grands honneurs. Il affranchit les habitans d'un tribut qu'on percevait sur les fruits; il permit aux sacrificateurs de garder l'éphod et les ornemens sacerdotaux que la jalousie d'Hérode-le-Grand avait fait renfermer dans la forteresse Antonia; enfin il déposa Caïphe, et donna le sacerdoce à Jonathas, fils de l'ancien grand-prêtre Ananus.

Défaite

Il paraît qu'Hérode le tétrarque jouissait alors, d'Hérode le sous la protection de Tibère, d'une autorité

tétrarquc.

pres

que royale; car on voit qu'il fit la guerre à Aré

thas, son beau-père, roi des Arabes, dont il voulait répudier la fille pour épouser sa sœur Hérodiade. Ses armes furent malheureuses; Aréthas le battit, et le peuple juif regarda ce mauvais succès comme un châtiment que Dieu infligeait à Hérode pour le punir de la mort de Jean-Baptiste, dont on révérait partout la sainteté.

d'Agrippa,

d'Hérode.

Tibère mourut à peu près à cette époque : l'a- Tétrarchie vénement au trône de son successeur Caïus Cali-petit-fils gula changea totalement la fortune d'un petit-fils d'Hérode, nommé Agrippa. Maltraité par sa famille, privé de biens et d'apanage, il était venu à Rome pour implorer la protection de l'empereur. Accueilli par Antonia, mère de Caligula, il avait indiscrètement montré le désir de voir ce prince arriver à l'empire. Tibère, informé par un délateur de ses vœux imprudens, l'avait fait enchaîner dans un cachot. Caligula, monté sur le trône, se souvint de son ami, le combla de présens, lui accorda de grands biens et une tétrarchie en Judée, avec le titre de roi, et lui donna une chaîne d'or du même poids que la chaîne de fer qu'il avait portée dans sa prison.

Hérodiade, jalouse de la fortune d'Agrippa son frère, prétendait aussi avoir un diadème; mais l'empereur, mécontent de sa conduite et de ses intrigues, l'envoya en exil avec son mari Hérode le tétrarque, à Lyon dans les Gaules.

Les Juifs d'Alexandrie, ne voulant pas rendre
TOME 3.

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