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1878 cédé aux monténégrins que le port de Spizza, au moyen d'une petite rectification de frontière, laquelle, du point Milujevic se dirigerait en ligne droite vers le village de St. Pettka situé au bord de la mer.

Cette haute Assemblée aurait à statuer si, pour la partie du district d'Antivari occupée actuellement par les monténégrins, un équivalent devait leur être donné sur un autre point quel

conque.

Protocole No. 9.

Roumanie.

Séance du 29 juin 1878.

-

Grèce. — Provinces limitrophes. Crète. — Art. XV; amendement anglais: substituer
commission européenne. Communications de Mr. Delyanni et de Mr. Rhan-
gabé.
Admission de ses représentants. Proposition anglaise,
discussion. Art V; indépendance. Discussion sur la question s'il y a ou non
connexité entre la reconnaissance de l'indépendance et les remaniements terri-
toriaux. Observations de Lord Beaconsfield au point de vue du traité de Paris
Réponse des Plénipotentiaires

-

et de la liberté de navigation sur le Danube.

russes.

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Bosnie et Herzégovine. Droit de garnison de l'Autriche-Hongrie dans l'enclave de Novibazar.

Le Comte Schouvaloff retire ses réserves.

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1878

Pour la Turquie:

Alexandre Carethéodory Pacha,

Mehemed Ali Pacha,

Sadoullah Bey.

La séance est ouverte à 2 heures et 1.

Le Président annonce que la commission de délimitation des frontières s'est constituée, et se compose de la manière sui

vante:

Pour l'Allemagne le Prince de Hohenlohe; pour l'Autriche le Baron de Haymerle; pour la France le Comte de Saint-Vallier; pour la Grande Bretagne Lord Odo Russell; pour l'Italie le Comte de Launay; pour la Russie le Comte Schouvaloff; pour la Turquie Mehemed Ali Pacha.

La commission a tenu sa première séance aujourd'hui.

Avant de procéder à l'ordre du jour, le Président rappelle que les diverses propositions présentées dans la dernière séance ont été remises aux commissions respectives.

L'ordre du jour appelle en premier lieu l'article XV du traité de San Stefano, concernant l'Ile de Crète et les provinces limitrophes du Royaume de Grèce. Conformément à la décision prise par le Congrès, le Président a invité MM. les Représentants du gouvernement de Sa Majesté le Roi de Grèce à vouloir bien faire à la haute Assemblée, dans la séance de ce jour, les communications dont ils seraient chargés.

Le Président donne lecture de l'article XV du traité de San Stefano.

Lord Salisbury demande une modification au dernier alinéa ainsi conçu: »Des commissions spéciales, dans lesquelles l'élément indigène aura une large participation, seront chargées dans chaque province d'élaborer les détails du nouveau règlement. Le résultat de ces travaux sera soumis à l'examen de la Sublime Porte, qui consultera le gouvernement impérial de Russie avant de les mettre à exécution«<.

Son Excellence désirerait que les mots »le gouvernement impérial de Russie « fussent remplacés par ceux-ci: »la commission européenne.<<

Le Comte Schouvaloff, faisant allusion au danger qu'il a dejà signalé d'étendre trop les attributions des commissions européennes, est d'avis qu'il serait préférable de substituer aux mots indiqués par Lord Salisbury, les grandes puissances de l'Europe«.

M. le Plénipotentiaire d'Angleterre ayant insisté pour les termes qu'il a proposés, et le Prince de Bismarck ayant fait remarquer qu'au fond la divergence entre les deux opinions est

1878 peu sensible, le Comte Schouvaloff accepte la rédaction proposée par l'Angleterre, à laquelle le Congrès donne également son adhésion.

MM. Delyannis, ministre des affaires étrangères de Grèce, et Rangabé, ministre de Grèce à Berlin, sont ensuite introduits. Le Président dit que le Congrès a voulu entendre les voeux et les appréciations du gouvernement hellénique avant de prendre une décision sur l'article XV qui forme, en ce moment, l'objet de ses délibérations. Son Altesse Sérénissime prie MM. les Représentants de la Grèce de faire connaître leurs opinions et leurs désirs à la haute Assemblée.

M. Delyannis exprime au Congrès la reconnaissance du Gouvernement hellénique pour l'admission des Représentants grees au sein de la haute Assemblée. Son Excellence espère que le Congrès voudra examiner avec la même bienveillance la cause que son collègue et lui ont mission de défendre. Il donne ensuite lecture de la communication suivante:

»Les seuls et véritables voeux du gouvernement hellénique ont été toujours identiques aux aspirations de la nation entière, dont la Grèce libre ne constitue qu'une petite partie.

»Ces mêmes aspirations animaient le peuple hellène quand il entreprit en 1821 la longue guerre de son indépendance.

>>Quant à leur réalisation complète, le gouvernement hellénique ne saurait se faire illusion sur les nombreuses difficultés qu'elle rencontre.

>>La ferme résolution de l'Europe d'établir la paix en Orient sans trop ébranler l'état des choses existant, indique au Gouvernement hellénique les limites qu'il doit imposer à ses aspirations.

>> Ainsi, le gouvernement doit limiter ses voeux et voir dans l'annexion de Candie et des provinces limitrophes au Royaume, tout ce qui, pour le moment, pourrait être fait pour la Grèce.

>> Les voeux du gouvernement du Roi ne s'opposent ni aux intérêts de l'Europe, ni à ceux de l'état voisin. Leur satisfaction serait l'accomplissement de la volonté ferme et tenace des populations de ces provinces, et donnerait le calme et une existence tenable au Royaume.

»Nous croyons que l'accomplissement des voeux ci-dessus énoncés est dans les intérêts de l'Europe. Sa volonté étant d'amener et de consolider la paix en Orient, l'annexion de ces provinces serait le moyen le plus efficace et le seul possible pour écarter toutes les causes qui pourraient dans l'avenir faire péricliter l'oeuvre pacificatrice de l'Europe. On n'aurait qu'à se rappeler le passé de ces provinces, les causes qui les ont tant de fois agitées, et les moyens extrêmes auxquels ces contrées ont

eu recours pour améliorer leur sort, pour être pleinement con- 1878 vaincu que les mêmes causes amèneraient, dans un avenir plus ou moins prochain, les mêmes tristes résultats.

» D'ailleurs, l'Europe ayant vu dans la création du Royaume hellénique une oeuvre extrêmement civilisatrice, son agrandissement ne serait que le complément de cette oeuvre.

>>L'annexion de ces provinces serait aussi dans l'intérêt de la Turquie. Elle lui éviterait dans l'avenir toute cause de troubles, qui ont tant de fois épuisé son budget, compromis ses intérêts politiques, et aigri ses relations de bon voisinage, dont le Royaume hellénique a été de tout temps si soigneux.

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Quant à l'intérêt capital, que ces provinces mêmes trouveraient dans leur annexion, il est généralement connu que, depuis un demi siècle déjà, elles réclament leur union à la Grèce. Elles ont bien des fois, et hautement, manifesté ce désir. Elles n'ont pas hésité même de prendre les armes à plusieurs reprises, et de s'attirer tous les malheurs de la guerre pour le réaliser. Il y a quelques mois à peine une d'elles n'a pu être pacifiée que sur l'assurance formelle d'une grande puissance que, la cause hellénique ne serait point lésée, »et que cette puissance même dirait explicitement au Congrès, que cette pacification est due à son intervention".

»Une autre province, l'Ile de Candie, est encore en pleine insurrection, et, d'après les dernières nouvelles, le sang y coule en abondance.

»Ne serait-ce pas une oeuvre de justice et d'humanité que de satisfaire aux aspirations nationales de ces pays, de combler leurs voeux, tant de fois manifestés, et de leur épargner à l'avenir les destructions et les catastrophes auxquelles ils s'exposent pour parvenir à une existence nationale?

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Quant au Royaume hellénique, toutes les manifestations des voeux nationaux des hellènes de la Turquie ne peuvent naturellement que produire une profonde émotion dans le Royaume hellénique.

Les originaires des provinces grecques de l'Empire ottoman y comptent par milliers; un grand nombre en occupent des places distinguées dans toutes les branches de l'administration, dans la marine, et dans l'armée, d'autres non moins nombreux s'y distinguent par leur activité industrielle et commerciale. Le contrecoup que la nouvelle d'une insurrection hellénique en Turquie produit dans leurs coeurs, est trop puissant pour ne pas les remuer. Il pousse les uns à passer les frontières pour s'unir aux combattants; les autres à vider leur bourse pour la cause commune. Cette commotion est vite communiquée à tous les habi

1878 tants du pays, quoique non originaires des provinces combattantes, et la population entière du Royaume, qui ne peut oublier ce qu'elle doit aux combats antérieurs de ces frères deshérités, ni rester impassible vis-à-vis de leur lutte de délivrance, court se mettre dans leurs rangs pour les aider à reconquérir leur liberté.

>>Un état de choses pareil fait naître chaque fois des crises sérieuses dans le Royaume hellénique, qui rendent très difficile la position de son gouvernement. Ne pouvant refuser ses sympathies aux hellénes des provinces en question unies à la Grèce libre par des liens d'histoire, d'origine et de malheurs communs; ne devant afficher une indifférence qui le frustrerait de la confiance de l'hellénisme et étoufferait les justes espérances que les hellènes de la Turquie ont de tout temps fondées sur la Grèce libre; tout gouvernement hellénique serait impuissant de résister

au courant.

» Crût-il même devoir le faire au sacrifice des intérêts les plus précieux du Royaume, il serait renversé par le courant qui entraînerait le pays tout entier dans la lutte des provinces insurgées. Dans le cas même où le gouvernement aurait la force d'opposer une digue au courant national, tous ces efforts resteraient sans effet, à cause de l'étendue et de la conformation de la ligne frontière du Royaume, qu'une armée de 5000 hommes même ne serait pas en état de garder de manière à pouvoir empêcher la sortie clandestine des volontaires.

>>La situation créée au gouvernement hellénique par ces mouvements insurrectionnels n'est pas moins difficile et intenable sous le point de vue financier. Le budget du Royaume a bien des fois subi, et subit encore l'influence de pareils événements. Aussi grande et éclatante que soit la différence entre le budget des recettes publiques dressé en 1829 par le président de la Grèce, et celui de l'exercice de l'année dernière, il n'en est pas moins vrai que les secours pécuniaires alloués chaque fois aux réfugiés des provinces insurgées et aux combattants rapatriés, et les armements motivés par cette situation anormale, et par les relations tant soit peu tendues avec l'état limitrophe qui en ont été toujours la conséquence, ont bien des fois englouti plusieurs millions, augmenté la dette publique et affecté à des dépenses infructeuses la plus grande part des recettes publiques, qui, déversées au développement matériel du pays, en auraient bien plus encore augmenté les ressources et le bien-être.

»Si de grandes et riches nations avec lesquelles la petite Grèce ne saurait jamais se mesurer ont toujours. en des circonstances analogues, ressenti les suites onéreuses de dépenses de

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