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article

la chambre; vous n'êtes pas légalement établis. Comment existez-vous? Pour répondre à cette objection, environnée de divisions et de subdivisions, il suffit d'ouvrir la Charte, aux articles 33 et 34. >> En nous bornant à l'article 54, car c'est cet que l'accusé réclame, c'est là qu'il se place. Il a réclamé la chambre pour juge; il la décline aujourd'hui. Il ne lui refuse pas, il est vrai, le pouvoir au fond, mais bien celui de la forme. Il veut une loi. Ici, une idée se présente d'elle-même, c'est le texte d'autres articles de la Charte.

> >> On veut assimiler l'accusation actuelle à l'accusation des députés contre les ministres ; mais ce n'est point par oubli que l'article 34 ne parle point de formes; mais l'article 56 qui concerne les ministres en parle. La raison est que ce ne sont pas toutes les actions des ministres, mais seulement celles qui seront définies. Il faut donc une loi. D'ailleurs il ne s'agit point d'un acte intérieur de la chambre, mais en partie extérieur, puisque la chambre des députés y concourt. Ici rien d'applicable dans les lois existantes. Il faudrait donc une loi qui liât les chambres. Dans l'article 56, il n'y a aucun inconvénient dans le délai; car le droit commun des lois existantes leur est applicable jusqu'à ce que la loi ait été rendue.

>> Get article 56 sur lequel on a aussi fait des

argumentations, veut que, lorsqu'il s'agit d'une accusation contre les ministres, des lois particulières spécifient le délit et en déterminent la poursuite. Mais ici, il ne s'agit que d'une nature de crimes particuliers, qu'il faut désigner; ét ce n'est point là l'espèce présente.

» Dans ce cas, d'ailleurs, il n'y aurait point d'inconvénient à attendre une loi, et il y en aurait beaucoup dans

jamais ce moment: car la justice ne doit

jamais être interrompue; on ne la suspendit jamais

en vain.

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Mais, admettons pour un moment l'hypothèse bizarre où l'on voudrait que l'accusé se trouvât placé. Supposons qu'on soit fondé à réclamer lat loi qu'on sollicite. Comment peut-elle exister cette loi? Elle exige le concours des trois branches du pouvoir législatif: elle ne peut pas être rendue sans la volonté de la chambre. Eh bien! supposons que vous ou MM. les députés, vous voulussiez user d'un droit constitutionnel qui vous est acquis, celui de ne pas adopter une loi projetée, qui vous est présentée. Si vous refusiez constamment votre approbation à cette loi qu'on demanderait, il en résulterait, d'après le système de l'accusé, qu'il ne pourrait jamais être jugé. Et, par une autre supposition, que je vous prie de me permettre, s'il arrivait que quelqu'un de MM. les pairs se rendit

coupable d'un crime, il ne pourrait donc non plus être jugé, puisqu'il n'y aurait pas de loi qui déterminât les formes dans lesquelles il devrait l'être: Ainsi, après avoir trahi son prince et son pays, un pair ne pourrait pas être atteint par la justice; il jouirait en paix de l'impunité, ou bien, si vous admettiez seulement que la loi devrait être rendue avant de le mettre en jugement, il pourrait, profitant d'un intervalle indispensable, et à l'abri d'une indépendance que vous aurez toujours intérêt de maintenir, il pourrait emporter au dehors les fruits de ses forfaits!

>> Certes, il serait superflu de pousser plus avant. de pareils raisonnemens; leur absurdité me dispense d'en continuer la réfutation.

>> On voudrait engager la chambre à se dépouiller des attributions qu'elle a acceptées. Je lis alors l'art. 24; admettons pour un instant le système du maréchal, et voyons-en les conséquences effrayantes. Si vous ne pouvez pas juger actu un pair, et qu'il nous faille une loi, où en sera la société ? Un pair pourrait impunément se livrer à tous les crimes, imiter les exemples trop funestes donnés à la France.

>> En vain la société réclamerait, il ne pourrait même être arrêté; tel est le texte de l'article, et cet article au contraire doit être une sauve

garde. Il existerait donc une classe impunie et autorisée à tout entreprendre. Cette considération bat en ruine le système du maréchal. Et pourrait-on avancer que ces terreurs sont chimériques; qu'il ne faut qu'une loi pour organiser la chambre? Mais tout délai, n'est-il pas la mort de la société? Peut-on admettre un seul jour, où une classe de citoyens pourrait tout se permettre impunément ? Ainsi nulle espèce d'inconvénient pour les ministres, et beaucoup pour les pairs. Ainsi vous avez donc en vous-mêmes tous les pouvoirs nécessaires à l'exercice des fonctions qui vous sont confiées par la Charte. Mais comment les organiser? comment les exercer? Je puis vous citer l'exemple d'un peuple à qui l'on ne reprochera pas de n'être pas jaloux de sa liberté. Quelles lois règlent la marche du parlement? Il ne se conduit que par des traditions réglées par une suite d'exemples. Mais est-il donc si difficile de régler la conduite de la chambre ? L'on s'en est rapporté à sa sagesse, et l'on a bien fait. Il y a un droit commun aux deux procédures; l'une des jurés, l'autre des cours spéciales: ceux-ci sont juges du fait et du droit ; la procédure est commune, sauf le juri. Vous auriez sans peine réglé votre marche. D'abord la marche : 1°. elle prescrit la publicité dans tous les procès criminels; 2°. la défense qui est

de droit commun; 3°. l'audition des témoins, débats contradictoires, confrontation. Tout cela est tellement de droit, que vous les auriez adoptés sans l'ordonnance du Roi; mais il existe ailleurs des formes. Ce n'est pas une fraction des pairs, mais la masse entière qui prononce. La Charte le veut; mais l'ordonnance n'y déroge pas. L'affaire serait donc arrivée vierge devant vous? L'accusé, les témoins auraient comparu, et ensuite les débats auraient été ouverts; car, s'il y avait eu mise en accusation, en prévention même, il aurait fallu scinder la chambre en trois portions. Ainsi la nécessité des choses appelait tout ce qui a été fait. Il faut d'ailleurs des formes qui garantissent la sûreté des citoyens. En effet, douze jurés, inconnus, obscurs, sont choisis au hasard; et c'est à leur conscience que le sort de l'accusé doit être livré. Il a donc fallu établir en avant du juri deux garanties: la mise en prévention et la mise en accusation, opérées toutes par des juges différens. Ainsi les garanties étaient là nécessaires. Mais ici peuton les réclamer? Un homme qui a eu l'honneur d'être pair est accusé : c'est devant ses amis, du moins devant ses anciens collègues, devant une grande masse d'hommes dignes, comme ils en sout jaloux, de l'estime publique ; et on réclame des garanties avant leur décision! Il n'y a pas d'homme

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