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mémoire par lequel, après avoir rappelé les prin- | percepteur de deniers communaux ; il ne fait aucipales conditions du bail fait à Lecardé, notam- cune recette pour le compte de la ville de Rouen; ment la fixation du prix de chaque place d'un il n'est tenu à aucun compte envers elle : il est mètre à 24 fr. dans la halle aux toiles, et à 12 fr. fermier des droits de halles pour le prix de dans la halle aux cotons, et la défense expresse 45,000 francs par an ; les droits qu'il perçoit sont d'excéder les prix, sous peine de concussion; ils sa chose propre ; 2° Lecardé n'est ni fonctionnairę, dénoncèrent ledit Lecardé comme ayant abusé de ni officier public; il n'est ni leur commis, ni leur leur bonne foi, et ayant employé vis-à-vis d'eux la préposé; 3° il n'a pas ordonné de percevoir; .il surprise et même la violence pour les faire sou- n'a ni exigé ni perçu ce qu'il savait n'être pas scrire des baux à des prix beaucoup plus élevés dû, et il n'a pas excédé ce qui était dû. que ceux déterminés par son bail, comme ayant exigé d'eux des prix excessifs, et s'étant ainsi rendu coupable de concussion.

Après une instruction préliminaire, Lecardé fut renvoyé devant le tribunal correctionnel de Rouen.

Il établit sa défense sur les faits ci-dessus rappelés, sur d'autres encore particuliers à la halle aux cotons; il s'appuya sur les propositions à lui faites par les fabricants pour la plus grande sûreté de leurs marchandises, et sur les conventions réciproques qui avaient été la suite de ces proposisitions; conventions qu'il soutint avoir été faites de bonne foi, librement et volontairement, entre les contractants.

Le développement de ces moyens a été donné à l'audience, tant par les mémoires du demandeur, que par son avocat, et la cour y a statué en ces termes :

« Oui, à l'audience du 28 décembre dernier, le rapport de M. Charle, conseiller; les observations de M. Loiseau, avocat défenseur de Lecardé; et, à l'audience de ce jour, les conclusions de M. Olivier, conseiller, pour le légitime empêche ment de M. Giraud, avocat-général;

« La cour, apres avoir délibéré en la chambre du conseil, statuant, en premier lieu, sur les trois premiers moyens de cassation proposés par Lecardé;

«< Relativement au premier, qui est fondé sur ce que, s'agissant de l'interprétation d'un bail émané de l'autorité administrative, les tribunaux correctionnels ne pouvaient en connaître ;

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Et il dit que, s'il s'agissait d'examiner et de juger si ces conventions étaient permises ou interdites par son bail, ou si elles en violaient ou non les clauses et conditions, il n'appartient qu'à l'au- Attendu que les halles sont des propriétés torité administrative de décider ces questions, communales; qu'aux termes de l'article 7, de la parce qu'elle seule était compétente, d'après les loi du 11 frimaire an vii, les prix de la location lois, sur ces attributions, pour expliquer et inter- des places dans les halles et marchés, font partie, préter, au besoin, le bail qui était émané d'elle. tout comme le prix des baux, des biens commuQue si, au contraire, ces conventions étaient naux proprement dits, des recettes communales; étrangères audit bail, et indépendantes de ses que le bail à ferme consenti à Lecardé par l'adclauses et conditions, les questions qui en déri-joint municipal de la ville de Rouen, des droits vaient rentraient dans le droit commun, et qu'elles devaient être jugées par les tribunaux civils.

Le tribunal correctionnel de Rouen, n'eut point égard à cette défense de Lecardé : ce tribunal pensa qu'il avait exigé des sommes excédant les droits qui lui étaient dus; et le considérant comme préposé de la municipalité de Rouen pour la perception de ces droits, il le déclara concussionnaire, et le condamna à un emprisonnement de deux années, en une amende de 2,000 francs et aux frais. Ce jugement a été confirmé par l'arrêt qui est attaqué.

Lecardé s'est pourvu régulièrement, et il a présenté les moyens suivants :

1° Incompétence ratione materiæ, en ce que, s'agissant de l'interprétation d'un bail émane de l'autorité administrative, les tribunaux correctionnels ne pouvaient pas en connaître ;

2o Violation de l'autorité de la chose jugée et de l'article 1351 du Code civil.

3o Violation des articles 1341 et suivants du même Code;

4° Fausse application de l'article 174 du Code pénal, sous trois rapports : 1o Lecardé n'est point

Tome I.

à percevoir, au profit de la commune, dans les halles aux toiles et aux cotons de cette ville, n'a donc été et n'a pu être consenti qu'en vertu du mandat tacite et inhérent aux fonctions municipáles, pour la gestion des biens des communes ; que cet acte n'a pas été l'exercice d'une délégation de pouvoirs faite par le gouvernement; qu'il n'a pas porté sur un objet qui fût, en tout ou en partie, une dépendance du domaine public; que l'officier municipal avec qui Lecardé a contracté, n'a donc pas eu, dans cet acte, le caractère d'un agent du gouvernement; qu'il n'y a eu que celui d'agent de la commune; que cet acte n'est donc pas un acte administratif; qu'il n'est qu'un acte privé, soumis aux mêmes règles que toutes les transactions que les citoyens peuvent faire entre eux, et qu'il entre dans les règles ordinaires du droit, pour tout ce qui concerne son interprétation, ses effets, son étendue et ses limites;

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que, ainsi que le dit l'orateur du gouvernement; ils ne sont pas investis d'un si haut caractère;

n'a agi que comme tuteur légal et nécessaire de toutes les corporations politiques de son territoire; Que la cour royale a donc eu caractère pour prononcer sur l'étendue et les bornes des droits confiés à Lecardé par cet acte de bail à ferme, et qu'elle n'a pas dû recourir à l'autorité administrative pour en faire déterminer le sens ou l'interprétation;

«Relativement au deuxième moyen, pris de la violation de l'autorité de la chose jugée et de l'article 1351 du Code civil, en ce que la cour royale a déclaré nulles et illicites des conventions qui avaient été reconnues valables par différents jugements de la justice de paix, rendus en dernier ressort;

<< Attendu que l'arrêt de la cour royale de Rouen a été rendu sur la poursuite du ministère public; qu'il n'y a donc pas eu identité de parties; qu'il n'y en a pas eu non plus sur l'objet de ces instances; que devant le juge de paix, la demande a porté sur l'exécution d'une convention écrite; que, devant la cour royale, la poursuite a eu pour base et pour objet la répression de faits prétendus criminels;

Relativement au troisième moyen, fondé sur la violation des articles 1341 et suivants du Code civil, en ce que la cour royale de Rouen a admis la preuve testimoniale contre la teneur d'actes

écrits;

Attendu que cette preuve n'a point été admise contre et outre le contenu en ces actes, que ces actes, au contraire, ont été reconnus constants; qu'elle n'a été admise que sur le fait de leur exécution, et sur l'action criminelle qui pouvait en résulter :

"

« La cour rejette ces trois moyens.

« Statuant en second lieu, sur le quatrième moyen, pris de la fausse application de l'art. 174 du Code pénal, aux faits reconnus constants;

« Vu l'article 410 du Code d'instruction criminelle, d'après lequel la cour de cassation doit annuler les arrêts et jugements en dernier ressort, qui ont faussement appliqué la loi pénale; « Vu aussi l'article 174 du Code pénal, qui est ainsi conçu, etc.;

«Attendu que cet article est placé sous la rubrique des concussions commises par des fonction naires publics; que l'orateur du gouvernement, dans son exposé au Corps législatif, n'en a fait non plus l'application qu'aux fonctionnaires publics, et qu'il en a justifié les dispositions pénales par la nécessité d'opposer des barrières à la cupidité, quand elle est unie au pouvoir;

Qu'en punissant de la peine de la réclusion, les fonctionnaires publics concussionnaires, cet article punit aussi leurs commis ou préposés coupables du même crime, parce qu'en les commettant, ils ont agi en vertu de l'autorité que ces fonctionnaires leur ont conférée; mais qu'il les punit seulement d'une peine correctionnelle, parce

Que si cet article, dans sa disposition énonciative, comprend tous percepteurs de droits ou revenus publics et communaux, ce n'est que sous le rapport de la qualité de fonctionnaires ou d'officiers publics, qu'ils peuvent avoir; qu'en effet il ne les rappelle point dans la nomenclature de ses dispositions pénales; que ces percepteurs ne peuvent donc être compris dans cette disposition générale qu'en la qualité de fonctionnaires ou d'officiers publics, et conséquemment que cet article ne leur est applicable que dans les cas seulement où ils peuvent être réputés avoir cette qualité.

« Et attendu que Lecardé n'a rien perçu comme fonctionnaire ou officier public; qu'il n'était investi d'aucun caractère public; qu'il n'a perçu qu'à titre de fermier, les droits de halles qui appartenaient à la commune de Rouen; que ce titre n'était qu'un titre privé;

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Qu'il n'était ni le commis, ni le préposé d'aucun fonctionnaire ou officier public; qu'en sa qualité de fermier, il ne percevait point pour autrui; qu'il percevait pour son propre compte et à ses risques et périls;

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Que s'il faisait sa perception en vertu d'un bail passé entre lui et l'adjoint de la commune, la qualité de la partie avec laquelle il a contracté ne changeait rien à la sienne qui était déterminée par le bail, à celle de fermier; exclusive de celle de commis ou préposé;

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Que d'ailleurs, s'agissant, dans cet acte, d'un revenu communal, l'adjoint municipal n'y avait eu que la qualité privée de mandataire et de gérant de la commune, et non le caractère public de fonctionnaire ou d'agent du gouvernement;

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Que si Lecardé a donc exigé ou reçu ce qu'il savait n'être pas dû, ou excédé ce qui lui était dû d'après son bail, il ne s'est pas rendu coupable de concussion; qu'il n'a commis qu'une exaction, contre laquelle il peut être réclamé devant qui de droit; et qu'en le condamnant à la peine correctionnelle portée dans le susdit art. 174 du Code pénal, contre les commis et préposés des fonctionnaires ou officiers publics convaincus de concussion, la cour royale de Rouen a fait une fausse application de cet article:

« D'après ces motifs, la cour casse et annule, etc., renvoie, etc., ordonne, etc ».

XII. Ainsi, on doit regarder comme constant que les actes qui tiennent à la police et à l'exercice des pouvoirs de l'administration générale, ne peuvent être annulés ou modifiés que par l'autorité administrative supérieure.

Et que ceux qui émanent du corps municipal, pour la gestion des biens de la commune et de ges intérêts particuliers, ne peuvent être jugés que par les tribunaux ordinaires.

Mais au lieu d'attaquer les actes du maire

comme fonctionnaire administratif ou comme et d'en envoyer, dans le même délai, un double agent de la commune, on peut prétendre qu'il a à l'administration de département, et un autre à excédé ses pouvoirs et donné lieu à une action l'administration municipale du canton ( que repersonnelle en dommages et intérêts de la com- présente le sous-préfet). pétence des tribunaux civils, ou mème des tribunaux de répression. Dans ce cas, le maire ne peut-il être poursuivi qu'avec l'autorisation du gouune ordonnance royale? vernement, donnée par

Voy. Mise en jugement, no v. L'autorisation du gouvernement n'est pas nécessaire, quand le maire est poursuivi comme officier de l'état civil. Voy. Acte de l'état civil, sect. 1, § II, no ïv.

Elle ne l'est pas non plus, lorsqu'il est poursuivi comme juge ou officier de police judiciaire, pour un crime ou un délit relatif à ses fonctions. On suit alors les formes prescrites par les art. 483 ou 484 du Code d'instruction criminelle, selon qu'il s'agit d'un délit ou d'un crime.

Enfin, si comme juge, il est civilement actionné en dommages et intérêts, on suit les formes expliquées à l'article Prise à partie.

SECTION II.

« 4. Les officiers ou agents municipaux qui n'exécuteraient pas les articles précédents, demeureront personnellement responsables des dommages et intérêts résultants des délits commis à force ouverte ou par violence sur le territoire de la commune.

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Art. 1. Chaque commune est responsable des délits commis à force ouverte ou par violence sur son territoire, par attroupements ou rassemblements armés ou non arinés, soit envers les personnes, soit contre les propriétés nationales ou privées, ainsi que des dommages-intérêts auxquels ils donneront lieu.

« 2. Dans le cas où les habitants de la commune

De la responsabilité des communes à raison des auraient pris part aux délits commis sur son ter

attentats commis sur leur territoire.

1. Les règles et les conséquences de cette responsabilité sont si importantes pour les communes et l'ordre général, que nous croyons devoir rapporter ici le texte même de la loi du 10 vendémiaire an IV (2 octobre 1795), qui les a éta

blies.

TITRE Ier

«Tous citoyens habitant la même commune sont garants civilement des attentats commis sur le territoire de la commune, soit envers les personnes, soit contre les propriétés. TITRE II. Moyens d'assurer la police intérieure de chaque commune.

ritoire, par des attroupements et rassemblements, cette commune sera tenue de payer à la république une amende égale au montant de la réparation principale.

3. Si les attroupements ou rassemblements ont été formés d'habitants de plusieurs communes, toutes seront responsables des délits qu'ils auront commis, et contribuables, tant à la réparation et dommages-intérêts, qu'au paiement de l'amende.

4. Les habitants de la commune ou des communes contribuables, qui prétendraient n'avoir pris aucune part aux délits, et contre lesquels il ne s'éleverait aucune preuve de complicité ou participation aux attroupements, pourront exercer leur recours contre les auteurs et complices des délits.

R

« Art. 1er. Il sera fait et dressé, dans chaque 5. Dans le cas où les rassemblements auraient commune du royaume, un tableau contenant les été formés d'individus étrangers à la commune, noms, âge, états ou professions de tous ses ha- sur le territoire de laquelle les délits ont été combitants au-dessus de l'âge de douze ans, le lieumis, et où la commune aurait pris toutes les mede leur habitation, et l'époque de leur entrée

sur la commune.

« 2. Les officiers municipaux (aujourd'hui le maire), dans les communes dont la population s'élève au-dessus de cinq mille habitants, l'agent municipal ou son adjoint ( le maire), dans les communes dont la population est inférieure à cinq mille habitants, formeront le tableau prescrit par l'article précédent.

sures qui étaient en son pouvoir, à l'effet de les prévenir et d'en faire connaître les auteurs, elle demeurera déchargée de toute responsabilité.

« 6. Lorsque, par suite de rassemblements ou attroupements, un individu, domicilié ou non sur une commune, y aura été pillé, maltraité ou homicidé, tous les habitants seront tenus de lui payer, ou, en cas de mort, à sa veuve et enfants, des dommages-intérêts.

3. A cet effet, il sera adressé dans la dé» 7. Lorsque des ponts auront été rompus, des cade, ', par l'administration de département (le routes coupées ou interceptées par des abatis d'arpréfet), aux officiers municipaux, ou agent mu- bres ou autrement, dans une commune, la municipal, des modèles imprimés de ce tableau; les-nicipalité ou l'administration municipale du can. quels seront tenus de les remplir dans la décade, ton les fera réparer sans délai aux frais de la

commune, sauf son recours contre les auteurs du | pas moins tenus de remplir, à cet égard, les oblidélit. gations que la loi leur prescrit.

« 8. Cette responsabilité de la commune n'aura pas lieu dans les cas où elle justifierait avoir résisté à la destruction des ponts et des routes, ou bien avoir pris toutes les mesures qui étaient en son pouvoir pour prévenir l'événement, et encore dans le cas où elle désignerait les auteurs, provocateurs et complices du délit, tous étrangers à la

commune.

«

9. Lorsque, dans une commune, des cultivateurs tiendront leurs voitures démontées, ou n'exécuteront pas les réquisitions qui en seront faites légalement pour transports et charrois, les habitants de la commune sont responsables des dommages-intérêts en résultant.

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3. Le commissaire du pouvoir exécutif, près l'administration du département dans le territoire duquel il aurait été commis des délits, à force ouverte et par violence, sur des propriétés nationales, en poursuivra la réparation et les dommages-intérêts devant le tribunal civil du département.

« 4. Les dommages-intérêts dont les communes sont tenues, aux termes des articles 'précédents, seront fixés par le tribunal civil du département, sur le vu des procès-verbaux et autres pièces constatant les voies de fait, excès et délits.

« 5. Le tribunal civil du département réglera le montant de la réparation et des dommages-intérêts dans la décade, au plus tard, qui suivra l'envoi des procès-verbaux.

10. Si, dans une commune, des cultivateurs à part des fruits refusent de livrer, au terme du bail, la portion due aux propriétaires, tous.les habitants de cette commune sont tenus des dom-être mages-intérêts.

« II. Dans les cas énoncés aux articles 9 et 10, les habitans de la commune exerceront leur recours contre les cultivateurs qui auront donné lieu aux dommages-intérêts.

« 12. Lorsqu'un adjudicataire de domaines nationaux aura été contraint à force ouverte, par suite de rassemblements ou attroupements, de payer tout ou partie du prix de son adjudication dans la caisse des domaines et revenus

à autres que

nationaux;
«<Lorsqu'un fermier ou locataire aura également
été contraint de payer tout ou partie du prix de
son bail à autres que le propriétaire;
les habitants de la commune
les délits auront été commis, seront tenus des dom-
mages-intérêts en résultant, sauf leur recours con-
tre les auteurs et complices des délits. »

a

Dans ces cas,

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6. Les dommages-intérêts ne pourront jamais moindres que la valeur entière des objets pillés et choses enlevées.

« 7. Le jugement du tribunal civil, portant fixation des dommages-intérêts, sera envoyé, dans les vingt-quatre heures, par le commissaire du pouvoir exécutif, à l'administration départementale, qui sera tenue de l'envoyer, sous trois jours, à la municipalité ou à l'administration municipale du canton."

« 8. La municipalité ou l'administration municipale sera tenue de verser le montant des dommages-intérêts à la caisse du département, dans le délai d'une décade; à cet effet, elle fera con tribuer les vingt plus forts contribuables résidant

dans la commune.

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grains et farines, demeure rapportée dans les dispositions qui seraient contraires à la présente loi. 15. Jusqu'à ce que les municipalités, les administrations municipales et les tribunaux civils de département soient organisés, les municipalités des communes, les officiers de police de sûreté, et les tribunaux de district actuellement existant, sont chargés, sous leur responsabilité personnelle, de l'exécution de la présente loi, chacun d'eux dans les parties qui concernent les administrations municipales, les officiers de police et les tribunaux

civils.

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II. Depuis la restauration, on avait mis en doute si cette loi était encore en vigueur. Les uns pensaient qu'elle était abrogée par la Charte, et que d'ailleurs son exécution se trouvait, en plusieurs points, inconciliable avec les formes de procéder établies par le Code de procédure.

D'autres, au contraire, soutenaient que la loi du ro vendémiaire contenait uue mesure de sûreté générale et d'ordre public; que la Charte, protectrice de toutes les propriétés, loin d'abolir cette mesure, n'avait fait que la confirmer; mais que toutes les fois qu'une commune était poursuivie comme responsable d'un délit commis sur son territoire, il fallait d'abord examiner si elle avait pû empêcher l'événement, et si les assaillants étaient des habitants, ou bien s'ils étaient étrangers à la commune.

La cour de cassation a écarté tous les doutes par plusieurs arrêts, qui ont fixé sa jurisprudence d'une manière certaine. Le premier de ces arrêts, du 17 janvier 1817, rendu au rapport de M. La sagní, a rejeté le pourvoi de la commune d'Haplincourt, contre un arrêt de la cour royale d'Amiens, qui l'avait condamnée envers un sieur Bresson, au paiement de la somme de 24,000 fr. pour dégâts et vols commis dans sa maison par un certain nombre d'individus qui s'y étaient introduits, sans qu'il eût été pris de mesures par la commune pour les repousser, et en des dommages-intérêts.

Voici les motifs de l'arrêt : « la cour...-attendu que la loi du 10 vendémiaire an iv, qui rend responsables les communes des délits commis à force ouverte par attroupements sur leur territoire, lorsqu'elles n'ont pas pris les mesures qui étaient en leur pouvoir, à l'effet de les prévenir et d'en faire connaître les auteurs, n'a fait que reproduire des principes de droit public professés par les meilleurs publicistes; qu'elle est éminemment protectrice des personnes et des propriétés; qu'elle a été constamment exécutée depuis sa promulgation, et que même elle est implicitement maintenue par l'art. 68 de la Charte constitutionnelle;

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III. Un second arrêt du 24 avril 1821, au rapport de M. Dunoyer, a consacré les mêmes principes; il n'avait à prononcer que sur les questions suivantes :

La loi du 10 vendémiaire an Iv, sur la respon. sabilité des communes, quant aux délits qui se commettent dans leur sein, par attroupements, est-elle encore en pleine vigueur?

Une commune doit-elle encourir la responsabilité dont parle cette loi, dès qu'elle n'a pas fait tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher le dommage?

Le 20 août 1819, arrêt de la cour royale d'Amiens qui, aux termes de la loi du 10 vendémiaire an iv, déclare les communes de Château-Thierry, d'Essonne et de Nogentel, solidairement responsables envers le sieur Clément, du pillage que les habitants de ces communes avaient exercé sur des bateaux chargés de blé, appartenant au sieur Clément.

La cour royale considère, 1o qne la loi du 10 vendémiaire an iv, concernant la responsabilité des communes, n'a été formellement abrogée par aucune loi postérieure; qu'elle ne peut être considérée comme remplacée par le Code civil, puisqu'il ne contient aucune disposition relative à la responsabilité des communes, et qu'au contraire, un avis du conseil-d'état, du 5 floréal an XIII, postérieur à ce Code, indique les mesures pour l'application de cette loi, le cas échéant; qu'encore que le Code pénal de 1810 renferme quelques dispositions relatives aux auteurs des délits prévus par cette loi, ces dispositions, concernant seulement les individus, ne peuvent s'appliquer à la responsabilité des communes, eu égard aux réparations civiles ; qu'à la vérité, la loi du 10 vendémiaire an iv, est remplacée par d'autres plus récentes dans plusieurs de ses parties, notamment pour ce qui regarde les passe-ports, le mode d'exercer les actions qu'elle prévoit, mais qu'elle n'est remplacée ni tombée en désuétude pour ce qui concerne la responsabilité des communes, puisque les monuments de la jurisprudence établissent que, jusqu'à présent, elle a continué de recevoir son exécution.

2° Qu'il résulte des procès-verbaux et autres pièces du procès que, le 5 juin 1817, un grand nombre d'habitants de la commune de ChâteauThierry et de celles d'Essonne et de Nogentel ont pillé, par attroupement et à force ouverte, les bâteaux du sieur Clément, qui étaient sur la Marne et dans l'intérieur de la commune de ChâteauThierry, et que les autorités locales des trois communes n'ont pas pris toutes les mesures qui étaient en leur pouvoir pour empêcher ce pillage.

Pourvoi en cassation de la part des trois communes.

Et, attendu qu'il a été reconnu, en fait, par l'arrêt attaqué, que la commune d'Haplincourt n'a point pris de mesures pour prévenir les désor- Elles prétendent, d'abord, que la loi du to vendres commis chez Bresson, et que même une par- démaire an iv n'est plus obligatoire en France. tie de ses habitants y ont pris part....; — rejette.» | Cette loi, disent-elles, ne peut être considérée

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