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LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE :

Sur le rapport du mi

nistre de l'agriculture et du commerce; Vu l'article 1er de la loi du 18 juin 1859; Vu la loi du 21 mai 1827 et l'ordonnance du 1er août 1827; Le Conseil d'Etat entendu,

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DÉCRÈTE:

ART. PREMIER. Les transactions sur la poursuite des délits et contraventions commis dans les bois soumis au régime forestier deviennent définitives:

10 Par l'approbation des conservateurs des forêts, lorsque les condamnations encourues ou prononcées, y compris les réparations civiles, ne s'élèvent pas au-dessus de 1 000 francs;

2o Par l'approbation du sous-secrétaire d'Etat, président du conseil d'administration des forêts, quand les condamnations sont supérieures à 1 000 francs, sans dépasser 2 000 francs;

3o Par l'approbation du ministre de l'agriculture et du commerce, quand les condamnations s'élèvent à une somme supérieure à 2 000 francs.

ART. 2.

Les articles 1 et 2 du décret du 21 décembre 1859 sont abrogés. ART. 3. Le ministre de l'agriculture et du commerce est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera insérée au Bulletin des lois.

Fait à Paris, le 22 décembre 1879.

Signé: JULES GRÉVY.

Par le Président de la République :
Le ministre de l'agriculture et du commerce,
Signé P. TIRARD,

Pour ampliation :

Le conseiller d'Etat, directeur du cabinet et du personnel,
Signé DE BAGNAUX,

N° 27. CIRC. DE L'ADMINIST. DES FORÊTS.

--

- 22 janv. 1880, no 262.

Modification du titre premier du décret du 21 décembre 1869, portant répartition d'attributions entre les autorités appelées à statuer en matière de transactions sur délits forestiers.

MONSIEUR LE CONSERVATEUR, un décret du 22 décembre 1879, dont vous trouverez ci-après copie, a modifié la compétence des autorités appelées à statuer en matière de transactions sur délits forestiers. En vertu de ce décret, vos attributions se trouvent étendues à toutes les contraventions, y compris celles commises par les adjudicataires ou entrepreneurs de coupes, pour lesquelles les condamnations encourues ou prononcées ne s'élèvent pas à plus de 1000 francs. En portant ces dispositions à votre connaissance, je

crois nécessaire de vous rappeler quelques-unes des règles qu'il me paraît utile de suivre pour fixer le montant des transactions.

La première condition à remplir, quand on admet un délinquant à transiger, est d'assurer au propriétaire de la forêt une juste réparation du préjudice résultant du délit. La somme à payer doit donc comprendre, d'une part, des restitutions se montant à la valeur des produits enlevés ; d'autre part, des dommages-intérêts représentant aussi exactement que possible le préjudice d'avenir causé à la forêt. Il n'y a lieu de se départir de ces bases que dans des cas tout à fait exceptionnels, par exemple, quand l'intérêt même du propriétaire est d'abaisser le chiffre des réparations civiles, afin d'en obtenir le payement de la part de délinquants auxquels leur état d'indigence ne permettrait pas d'acquitter une somme plus forte. Aucune distinction n'est à observer à cet égard entre les bois domaniaux et ceux des communes et établissements publics, et vous devez considérer comme abrogée, en ce qui concerne les délits commis dans ces dernières forêts, la règle de proportionnalité entre les réparations civiles et l'amende prescrite par la circulaire n° 786.

Comme vous ne l'ignorez point d'ailleurs, l'article 202 du Code forestier, suivant lequel les dommages-intérêts ne peuvent être inférieurs à l'amende simple, n'est pas applicable à la matière. Cette disposition, que certains agents croient, à tort, devoir observer dans leurs propositions de transactions, n'est obligatoire qu'en cas de poursuites exercées devant les Tribunaux. La restitution et les dommages-intérêts étant fixés, c'est par la modération ou la suppression de l'amende qu'il convient de tenir compte des motifs d'indulgence qui peuvent exister pour chaque cas particulier. Dans cette appréciation, vous pourrez prendre en considération le sacrifice déjà imposé au délinquant par le payement des réparations civiles et des frais; vous ne devrez pas perdre de vue toutefois que le plus souvent la restitution ne lui cause pas une perte réelle et le prive seulement d'un gain illicite.

Quand les délits ont été commis dans les bois des communes ou des établissements publics, il n'est pas nécessaire de consulter les conseils municipaux ou les commissions administratives, à moins que des circonstances spéciales ne rendent leur avis opportun. L'intervention de ces assemblées dans le règlement des transactions constitue, en effet, une dérogation à l'économie de la loi du 18 juin 1859, qui a entendu soustraire ce genre d'affaires à leur examen, ainsi que le porte l'exposé des motifs. Vous apprécierez donc s'il y a lieu de communiquer aux conseils municipaux et aux commissions administratives les propositions de transaction sur lesquelles vous êtes appelé à statuer. Les chefs de service doivent s'abstenir de prendre l'initiative à cet égard. L'administration, de son côté, se réserve le soin de provoquer l'avis desdites assemblées, le cas échéant, dans les affaires qui lui sont soumises.

Aucune hésitation ne saurait du reste s'élever sur la portée des délibérations des conseils municipaux et des commissions administratives. Après comme avant jugement, ces délibérations ne constituent qu'un simple avis auquel le service forestier n'est pas tenu de se conformer. La faculté de tran

siger dont il a été investi par la loi ne comporte aucune restriction, et l'administration est substituée complètement, en matière de transactions, aux mandataires habituels des communes et établissements publics. Une décision du 7 décembre 1875, concertée entre les ministres de l'intérieur et des finances, a même reconnu que le caractère général et exclusif du droit de l'administration s'oppose à ce que les communes modifient les décisions prises, en renonçant, en tout ou en partie, aux sommes stipulées en leur faveur.

Beaucoup d'agents s'abstiennent de comprendre des réparations civiles dans les transactions à accorder aux entrepreneurs de coupes affouagères quand ceux-ci sont nommés seulement pour la forme, comme il arrive trop fréquemment. Ils sont mus par l'idée que le payement des restitutions et des dommages-intérêts, devant être effectué, dans ce cas, par prélèvement sur les fonds des communes, ne donne en réalité lieu qu'à une simple opération de comptabilité sans portée effective. C'est là une erreur. Les conseils municipaux qui présentent des entrepreneurs fictifs répartissent souvent le montant des condamnations ou des transactions entre les affouagistes, et la caisse municipale bénéficie alors du montant des réparations civiles. La suppression de la restitution et des dommages-intérêts présente encore d'autres inconvénients: elle fait disparaître toute constatation officielle du préjudice causé aux forêts communales par les délits commis dans les coupes affouagères. Or, il n'est point inutile, ne serait-ce qu'au point de vue de la responsabilité de l'administration, que les municipalités se rendent immédiatement compte de la perte qu'elles font subir aux communes en refusant de nommer des entrepreneurs sérieusement responsables. Il est nécessaire surtout que les préfets soient mis à même d'apprécier, par l'examen des budgets communaux, les conséquences pécuniaires des irrégularités commises dans l'exploitation des coupes affouagères. Déjà, en effet, quelques-uns d'entre eux, ainsi éclairés sur la situation, ont pris le parti de refuser leur approbation à toute inscription aux budgets communaux d'indemnites allouées aux entrepreneurs de coupes à titre de remboursement de condamnations.

J'appelle enfin votre attention sur la marche à suivre en cas de poursuites dirigées contre des adjudicataires ou entrepreneurs de coupes pour retard dans l'exécution des travaux d'exploitation. Il est prudent de faire de la mise en ordre de la coupe pour un terme indiqué une des conditions de la décision à intervenir, car l'action résultant du délit s'éteignant par le payement de la transaction, l'administration risquerait de se trouver désarmée, si l'adjudicataire, après s'être libéré, refusait de terminer son travail. De même, quand, un retard d'exploitation ayant été constaté par procès-verbal, l'adjudicataire sollicite une prolongation de délai, sa demande ne doit pas faire l'objet d'une décision séparée, mais simplement d'une clause de la transaction qui peut lui être accordée, sauf à tenir compte, dans le calcul des réparations civiles, des dommages résultant du retard.

Je n'entends pas d'ailleurs, monsieur le Conservateur, vous tracer sur ces divers points des règles absolues et invariables. La matière n'en comporte pas. J'ai simplement voulu indiquer les principes qui doivent vous guider

dans vos décisions. Rien n'est au surplus changé dans les formes à observer, et les transactions sur lesquelles vous êtes désormais appelé à statuer seront instruites comme par le passé. Vous continuerez donc à exiger la production de pétitions de la part des délinquants et à vous faire adresser des rapports spéciaux par les chefs de service pour tous les délits à la charge des adjudicataires ou entrepreneurs de coupes, ainsi que pour tous ceux qui donneraient lieu à des condamnations dépassant 500 francs. Recevez, etc.

Le sous-secrétaire d'Etat, président du conseil d'administration,
Cyprien GIRERD.

N° 28. TRIB. CORR. de Vendôme. 16 mai 1879.

Battue, lieutenant de louveterie, arrêté préfectoral, communication, conservateur, absence d'un agent forestier, demande reconventionnelle, dommages-intérêts.

Le lieutenant de louveterie qui a dirigé, dans une forêt particulière, une battue ordonnée par arrêté préfectoral, n'est pas dispensé de l'assistance d'un agent forestier, alors même que la partie imprimée de cet arrêté qui prescrit de le notifier au conservateur aurait été biffée sans approbation.

Dans ces circonstances, le lieutenant de louveterie est mal fondé à rẻclamer contre le plaignant des dommages-intérêts à raison de la poursuite dont il a été l'objet.

(De Larochefoucauld, duc de Doudeauville, c. de Fontenailles).

FAITS

Les 1 et 15 février 1879, M. de Fontenailles, lieutenant de louveterie de l'arrondissement de Vendôme, s'est rendu dans la forêt de Frêteval, appartenant à M. de Larochefoucauld, duc de Doudeauville, pour y procéder à des battues autorisées par M. le préfet de Loir-et-Cher, afin d'arriver à la destruction des sangliers et des biches qui, suivant l'arrêté préfectoral, existaient en trop grand nombre dans cette forêt.

Le lieutenant de louveterie avait négligé de s'entendre avec le préfet et le conservateur des forêts sur le nombre des tireurs. La liste n'avait été ni faite par les maires, ni communiquée aux représentants du propriétaire. Le lieutenant avait cru pouvoir admettre toutes les personnes qui s'étaient présentées, même celles qui ne demeuraient pas dans les communes voisines de la forêt et qui n'étaient nullement intéressées à la destruction des animaux prétendus nuisibles. Lors de la dernière battue, les traqueurs et les tireurs étaient au nombre d'environ quatre cents.

Il était allégué, en outre, que la battue avait eu lieu dans des parties de la forêt entourées de clôtures, qu'on avait tué un chevreuil et un lapin; que, REPERT. DE LÉGISL. FOREST. JUIN 1880.

T. IX. 5

de plus, après le départ du louvetier, les traqueurs et les tireurs étaient restés dans la forêt, continuant la chasse après la nuit close et enlevant le gibier tué pour se le partager. Il y eut conflit entre les chasseurs et les gardes qui voulaient enlever les animaux tués pour les distribuer aux établissements hospitaliers des communes intéressées.

Enfin, aucun agent forestier, aucun délégué de l'administration des forêts n'avait été désigné pour assister aux battues.

Traduit à raison de ces faits devant le tribunal de Vendôme, M. de Fontenailles a formé contre le plaignant une demande en 20 500 francs de dommages-intérêts. M. le duc de Doudeauville n'avait conclu, comme partie civile, qu'à la condamnation aux dépens pour tous dommages-intérêts. Sur ces demandes principale et reconventionnelle, est intervenu le jugement dont la teneur suit :

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL : Attendu que si la plupart des griefs reprochés par le duc de Doudeauville au cité ne sont pas suffisa mment établis et ne peuvent lui être imputés personnellement, ou ne sauraient le rendre justiciable de la juridiction répressive, il n'en est pas de même du défaut de convocation et de l'absence de tout agent forestier aux battues des 1er et 15 février dernier. Attendu qu'il n'est pas constaté (contesté) que le lieutenant de louveterie a procédé aux dites battues sans que la surveillance des agents forestiers ait été exercée, ni même provoquée.

Attendu que l'article 5 de l'arrêté du 19 pluviose an V exige impérativement l'inspection et la surveillance desdits agents; que le règlement du 20 août 1814 dispose que les chasses seront ordonnées par le préfet, commandées et dirigées par le lieutenant de louveterie qui, de concert avec lui et le conservateur, fixeront le jour, détermineront les lieux et le nombre d'hommes; que les lieutenants de louveterié sont donc tenus personnellement de se concerter avec les agents forestiers dont le concours et la surveillance sont indispensables, ainsi que l'a reconnu la circulaire du ministre de l'intérieur du 22 juillet 1851.

Attendu que si, sur les ampliations des arrêtés préfectoraux des 22 janvier et 6 février 1879, produites dans la cause par de Fontenailles, la mention imprimée qu' « ampliation desdits arrêtés serait adressée au conservateur des forêts » se trouve biffée par une rature, non approuvée d'ailleurs, aucune disposition ne dispense le lieutenant de louveterie de se conformer aux prescriptions des règlements en réclamant le concours des agents forestiers; qu'en prescrivant que les battues ordonnées auraient lieu sous la direction du lieutenant de louveterie, sous la surveillance de la gendarmerie, et avec le concours des maires, le préfet n'a pas exonéré expressément de Fontenailles des obligations qui lui étaient imposées par l'article 3 de l'arrêté du 19 pluviôse an V et le règlement du 20 août 1814; que le Tribunal n'a donc pas besoin de critiquer les actes de l'autorité administrative, ni de les interpréter, pour reconnaître que de Fontenailles n'est pas couvert par les arrêtés préfectoraux dont il excipe.

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