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seulement que l'on a joint aux peines du droit commun certaines peines spéciales: la destitution et la dégradation pour les militaires de l'armée de terre, et pour les membres de l'armée de mer, outre ces deux peines, la privation du commandement, l'inaptitude à l'avancement, la réduction de grade et le cachot ou double boucle. Ajoutons que le condamné à mort est fusillé (L. 9 juin, 4 août 1857; L, 4 juin 1858).

Des peines de droit commun. Nous avons indiqué dans nos préliminaires que ces peines étaient divisées en trois classes de simple police, correctionnelles ou criminelles. Nous supposons cette classification bien connue, et nous allons dire ce que sont ces peines en ellesmêmes.

Il y a des peines qui sont communes aux matières de simple police, correctionnelles ou criminelles : c'est la publicité par affiches des jugements, la confiscation spéciale et les amendes.

La publicité du jugement ou de l'arrêt, au moyen d'affiches ou d'insertion dans les journaux, peut être ordonnée dans des buts divers : 1° à titre de réparation civile, par exemple, en matière de contrefaçon, quand la partie intéressée la demande comme dommages-intérêts: c'est alors une sanction d'ordre privé; 2o à titre pénal: c'est une mesure générale pour les arrêts criminels. Dans les autres matières, la publicité doit être ordonnée ou permise par la loi; elle peut être ordonnée notamment pour des jugements condamnant des commerçants qui ont falsifié la marchandise vendue (L. 7-15 mars 1850; L. 20 mars 1829; L. 27 mars 1851; 11, 36, P.).

La confiscation spéciale. La confiscation générale de tous les biens, d'abord proscrite en 1790, rétablie dans le Code pénal de 1810, a définitivement disparu de nos lois depuis la charte de 1814. La confiscation spéciale de certains objets a lieu dans des cas assez rares. Sont confisqués : les boissons falsifiées et contenant des mixtions nuisibles à la santé, l'édition contrefaite d'un ouvrage, les engins, filets et armes qui ont servi à commettre des délits de chasse, etc. (318, 427, Pr.; L. 3 mai 1844).

L'amende. Quand la loi frappe une infraction pénale d'une amende de un franc à quinze francs, l'infraction est une contravention, nous le savons au delà de ce taux, avec ou sans limite, l'amende peut être peine correctionnelle ou criminelle. Les amendes en matière de simple police sont attribuées à la commune où la contravention a eu lieu (466, P.).

La surveillance de la haute police est une peine commune aux matières correctionnelles et criminelles (11, 44-50,67, 138, 401, P.; Déc. 24 oct. 1870).

L'emprisonnement de simple police varie de un jour à cinq jours; il a lieu dans des prisons municipales, où le condamné n'est assujetti à aucun travail (465 P.).

L'emprisonnement correctionnel est de six jours à cinq ans : le condamné doit être employé à l'un des travaux établis dans la maison où il subit sa peine. Les produits du travail de chaque. détenu sont appliqués, partie aux dépenses communes de la maison, partie à lui procurer quelques adoucissements, s'il les mérite, partie à former pour lui, au temps de sa sortie, un fonds de réserve. La prison, semble dire la loi, devrait être une maison spéciale, dite de correction. En fait, il y a des prisons départementales, où sont détenus les condamnés à un emprisonnement de moins d'un an; les autres sont envoyés dans des maisons centrales soumises à un règlement différent. Les maisons départementales reçoivent aussi souvent des prévenus et des accusés, des condamnés de passage, même de jeunes détenus; les maisons centrales reçoivent également bien d'autres détenus que ceux qui sont frappés d'emprisonnement correctionnel (40, 41, P.).

Une loi, récente encore, a organisé des colonies pénitentiaires pour les jeunes garçons et des maisons pénitentiaires pour les jeunes filles; on y envoie notamment les jeunes gens acquittés comme ayant agi sans discernement et non remis à leurs parents et des mineurs de seize ans condamnés (L. 5 aoùt 1850; 66, P.).

Enfin nous avons, comme peine correctionnelle encore, l'interdiction de certains droits civiques, civils et de famille, dont il faut lire le détail dans la loi : La peine est divisible, le tribunal prive des droits qu'il détermine; tantôt elle est obligatoire, tantôt elle est facultative (42, 43, P.).

Nous connaissons la liste des peines exclusivement criminelles ; nous allons dire en quoi consiste chacune d'elles, mais en les divisant d'abord avec la loi en trois classes:

1o Les unes, en effet, sont propres aux crimes politiques; le bannissement, la détention et la déportation.

2o Les autres sont réservées pour tous les autres crimes: la reclusion, les travaux forcés à temps, les travaux à perpétuité, et la mort. On voit que la peine de mort (et la réforme a eu lieu en 1848) ne peut plus être prononcée pour crimes politiques; elle a été remplacée par la déportation.

3o La dégradation civique, enfin, est une peine applicable aux deux espèces de crimes.

Voyons successivement ces peines diverses.

La dégradation civique est une peine qui consiste dans la privation indivisible des droits énumérés par le Code pénal; tantôt elle est prin

cipale, tantôt elle est l'accessoire des peines de la déportation, des travaux forcés, de la détention, de la reclusion et du bannissement (34, 28, P.).

Le bannissement est, d'après la loi, une peine qui consiste à transporter le condamné hors du territoire français; elle peut être prononcée pour cinq au moins et dix ans au plus: en fait, elle est transformée en une détention le plus souvent, parce que le condamné n'obtient pas toujours la faculté d'être reçu en pays étranger' (32, 33, P.; Ord. 2 avril 1817).

à

La reclusion consiste à être renfermé dans une maison de force et y être soumis à des travaux dont le produit pourra être appliqué en partie au profit du condamné; la durée varie de cinq à dix ans. Il n'y a pas d'établissements spéciaux; on met les condamnés à la reclusion dans les maisons centrales, qui, nous le savons déjà, servent à plusieurs fins (21, P.).

La détention. C'est une peine politique introduite en 1832, et consistant à être enfermé dans une forteresse de l'État. Le condamné n'est pas soumis à l'obligation du travail, et il peut, conformément aux règlements établis par le gouvernement, communiquer avec les personnes du dehors. La durée varie de cinq à vingt ans (20, P.).

La déportation est une peine politique et perpétuelle; il y en a deux espèces :

L'une est la déportation dans une enceinte fortifiée: elle remplace depuis 1850 la peine de mort en matière politique. Elle a longtemps consisté pour le condamné à être transporté dans la vallée de Waïhtau, qui se trouve dans une des îles Marquises; aujourd'hui, elle s'exécute dans la presqu'ile de Ducos, qui fait partie de la Nouvelle-Calédonie (L. 23 mars 1872).

L'autre, la déportation simple, après s'être exécutée dans l'île de Noukaïva, l'une des Marquises, est aujourd'hui subie dans l'île des Pins, qui est une dépendance de la Nouvelle-Calédonie.

Les travaux forcés à temps ou à perpétuité sont deux peines distinctes la première, peine temporaire, peut avoir une durée de cinq à dix ans. Longtemps les condamnés à ces peines furent marqués avec un fer brûlant sur l'épaule; ils étaient dans les bagnes, employés aux travaux les plus pénibles, traînant un boulet attaché au pied (15, 16, P.).

Aujourd'hui la peine consiste en une véritable transportation: les travaux sont de colonisation ou d'utilité publique; le boulet est une punition disciplinaire, facultative pour l'administration. Les femmes, qui n'étaient pas envoyées au bagne, sont transportées, mais dans un lieu distinct, et employées à d'autres travaux que ceux imposés aux hommes. La Guyane française d'abord, et maintenant la Nouvelle

Calédonie, contiennent les établissements créés pour l'exécution de cette peine (L. 30 mai 1854; Déc. 2 sept. 1863).

Aucun individu âgé de soixante ans au moment de l'arrêt ne peut être condamné à la transportation: la peine de la reclusion la remplace.

Dès que la peine est de huit ans ou plus, après l'expiration, le condamné est tenu de résider toute sa vie dans le lieu de la transportation; si la peine est de moins de huit ans, il y résidera ensuite un temps égal à la durée de la condamnation.

La loi a donné les moyens d'améliorer le sort des transportés qui se conduisent bien: ils peuvent obtenir des concessions provisoires d'abord, définitives après la libération, l'exercice de tout ou partie de leurs droits civils, la faculté de jouir et de disposer de leurs biens; leur mariage est facilité par la dispense qui leur est faite d'avoir à adresser des actes respectueux à leurs ascendants (Déc. 24 mars 1866).

La mort est la dernière peine placée au sommet de l'échelle pénale. Je ne reviens pas sur les discussions soulevées relativement au droit du pouvoir social d'en faire une sanction de ses lois. L'histoire nous montre que graduellement les cas d'application ont diminué : l'assassinat, le parricide, l'infanticide, l'empoisonnement, l'incendie de maisons habitées, sont les principaux crimes pour la répression desquels elle a été conservée.

Tout condamné à mort a la tête tranchée : l'exécution a lieu sans aucun des accessoires atroces qui l'accompagnèrent longtemps; seulement le parricide est encore conduit au supplice en chemise, nupieds et la tête couvert d'un voile noir; il est exposé sur l'échafaud pendant la lecture de l'arrêt de condamnation, faite au peuple par un huissier.

Telles sont les sanctions pénales les plus importantes. Plusieurs d'entre elles entraînent, comme conséquence forcée, des incapacités remarquables. J'ai déjà dit celles qui produisaient la dégradation civile.

Les travaux forcés, la déportation, la reclusion et la détention mettent le condamné en état d'interdiction légale; il est privé de l'exercice de ses droits civils, et une tutelle est organisée; pendant toute la durée de sa peine, il ne peut recevoir aucune portion de ses revenus (29, 31, P.)

Les peines perpétuelles, au nombre desquelles il faut ici compter la mort, rendent le condamné perpétuellement incapable de disposer par donation ou testament, ou de recevoir à ce titre, si ce n'est pour cause d'aliments; le testament fait avant la condamnation est nul (L. 31 mai 1854).

CONCLUSIONS.

Nous avons terminé l'exposé des principes élémentaires du droit français.

Un tableau rapide, en nous remettant sous les yeux l'ensemble des notions acquises, nous permettra d'en tirer quelques conclusions pratiques.

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Résumé de ce traité.

Le but poursuivi par la grande société française est, avant tout, la justice; il est essentiel, et suffit seul pour donner à un État sa raison

d'être.

Protéger dans leurs rapports multiples et quotidiens la liberté définie des membres de la nation, donner à chacun d'eux pour l'exercice légitime de son activité, une sécurité qu'il n'aurait pas s'il était réduit à ses propres forces, et affermir ainsi l'ordre en faisant rendre à chacun ce qui lui est dû tels sont les résultats de la justice appliquée.

Une direction est indispensable à la société pour la conduire vers ce but, et empêcher ceux qui la composent d'y mettre obstacle: elle est donnée par l'autorité publique au moyen d'un gouvernement, véritable machine politique dont les pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif sont comme les organes moteurs.

Ce qu'on demande au gouvernement, c'est un rendement de justice de plus en plus grand.

La loi naturelle, ou plutôt la morale sociale, mot plus clair, est l'ensemble des règles immuables, éternelles, nécessaires, que trouve, dégage et formule la raison humaine, avec l'aide de toutes les ressources mises à sa disposition par Dieu.

Mais pour être applicables dans une nation au moyen de la force sociale, ces règles du droit naturel doivent être adaptées aux institutions que l'homme crée, et qui sont les rouages de détail des trois organes fondamentaux. Il n'y a pas d'exécution forcée possible de

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