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sujettir l'assuré à une augmentation de prime proportionnée aux risques qu'il· » aurait fait courir de plus à l'assureur, en lui diminuant l'objet par sa faussę

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Mais c'est ordinairement le sinistre qui donne lieu à pareille plainte. Ce serait donc un triste présent qu'on ferait aux assureurs, si, en les condamnant à payer la perte, on leur accordait une augmentation de prime.

Le juge peut, suivant les circonstances du fait, prononcer la nullité de l'assurance. Mais il rendrait une sentence évidemment nulle et injuste, si, laissant subsister le contrat reconnu vicieux, il se bornait à y appliquer une modification aussi contraire au pacte stipulé qu'impuissante à remplir l'intérêt légitime de la partie lésée.,

Si, avant le départ du navire, ou pendant le cours du risque, l'assureur demandait que l'assurance fût résiliée, sur le fondement qu'on lui a dissimulé quelque circonstance essentielle, on ne pourrait s'empêcher de faire droit à sa requête. Ce serait tyrannie que de le forcer à se contenter d'une augmentation de prime. La chose ne reçoit point de milieu: il faut ou anéantir le contrat, ou le laisser subsister tel qu'il est.

Si le navire périt, et que les assureurs prouvent qu'on leur a dissimulé quelque circonstance essentielle, le contrat doit être cassé. Il n'est plus tems, après le tems du risque et que la perte est arrivée, de leur offrir le prix du risque. Pothier, no. 196.

Mais si, dans le principe, la nature du risque a été pleinement déclarée, les assureurs ne pourront ni contester le paiement de la perte, sous prétexte de la minimité de la prime stipulée, ni requérir une augmentation de primc.

Des assureurs, moyennant une prime de quatre pour cent, avaient pris risque sur les facultés de la tartane Saint-Joseph, consistant en soies. D'autres assureurs, moyennant une égale prime de quatre pour cent, avaient pris risque sur les mêmes facultés, consistant en soies, franc à eux de confiscation de la part des Espagnols. Le navire fut confisqué. Les premiers assureurs furent condamnés à payer la perte. Infrà, chap. 8, sect. 5.

Valin, art. 49, reconnaît que cette décision est juridique et conforme aux principes. « Cependant, ajoute-t-il, il y a une chose qui fait de la peine; savoir, l'erreur ou la méprise des assureurs qui n'avaient stipulé qu'une prime de quatre pour cent, pour indemnité de tous risques, tandis que, » dans le même tems, d'autres assureurs, en exigeant une parcille prime, avaient eu la précaution de se faire tenir quittes de toute confiscation de

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la part des Espagnols. Pourquoi une si grande inégalité de condition entre › ces divers assureurs? Il semble que les premiers auraient été dans le cas de de» mander au moins une augmentation de prime très-considérable. Mais, d'un autre › côté, peut-on rien, ajouter aux clauses d'une police d'assurance? Il faut › donc dire qu'il a été bien jugé en rigueur de droit, et que les premiers as» sureurs sont seulement à plaindre de n'avoir pas mieux veillé à leurs in» térêts. »

Mais ceux des assureurs de la tartane Saint-Joseph, qui avaient souscrit la police à tout événement, ne se plaignaient pas d'avoir été trompés. Ils s'y étaient déterminés par les circonstances du moment; et d'ailleurs, je ne trouve pas que ce soit rigueur de droit, que de juger en conformité du pacte des parties. On ne saurait s'en écarter, sans tomber dans l'arbitraire, et sans détruire la foi des contrats. Vid. suprà, ch. 1, sect. 5, § 3.

CONFERENCE.

XX. Le taux de la prime, dit Valin sur l'art. 1, d'après Puffendorf, liv. 5, chap. 9, $ 8, dépend absolument de la convention, eu égard à la nature et à la longueur des risques. Le taux de la prime dépendant des circonstances des tems, des lieux et de la manière dont on envisage les événemens, il est impossible d'établir une règle de fixation pour la prime, et il est par conséquent nécessaire de s'en rapporter aux pactes des parties, sans pouvoir s'en écarter.

Au reste, la bonne foi doit principalement régner dans les contrats d'assurance et de réassurance; car une réticence est également une cause d'annulation d'une police de réassurance. Il n'y a à cet égard aucune différence à faire entre ces deux contrats. Chaque contractant ne doit rien dissimuler à l'autre. Cette dissimulation serait un dol qui annulerait l'assurance. C'est avec raison qu'Emérigon combat Valin à cet égard, et si, sous l'empire de F'Ordonnance, il y avait quelque difficulté, tout doute serait aujourd'hui dissipé par les dispositions de l'art. 348 du Code de commerce. Toute reticence annule l'assurance, et il y a réticence, si l'on a caché à l'assureur une circonstance qui pouvait influer sur l'opinion du risque, quand même la réticence n'aurait pas influé sur le dommage ou la perte de l'objet assuré. (Voyez d'ailleurs notre Cours commercial maritime, tom. 3, pag. 507 et suivantes).

Autant que la nature du contrat le permet, le sort des assureurs et des assurés doit être le même à l'actif et au passif. — (Voyez Valin sur l'art. 3, titre des assurances ).

Si les pactes stipulés sont clairs et qu'ils ne renferment rien qui soit prohibé par les lois, il n'est pas permis aux juges de s'en écarter. Le contrat d'assurance est de droit étroit; l'acte ne produit rien au-delà de l'intention des parties. (Giballinus, lib. 4, chap. 11, art. 2, no. 5). Il faut considérer en même tems les paroles du contrat et l'intention des parties.

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Toujours on répute juste la prime dont les parties sont convenues entre elles, sans qu'on puisse se plaindre de la lésion, à moins qu'il n'y ait dol ou surprise manifeste. (Voyez Valin, ibidem. Pothier, assurances, no. 82 ).

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JURISPRUDENCE.

1. L'assureur peut demander la nullité de l'assurance, si l'assuré n'a pas présenté le risque tel qu'il était véritablement. Par exemple, si l'assuré a dissimulé le fait que le navire était en mer depuis un tems plus considérable que celui déclaré. - ( Arrêt de la Cour de Bordeaux, du 4 fructidor an 8, Sirey, additions, tom. 1, pag. 693, 694, et Dalloz, Jurispru dence générale, tom. 2, pag. 61 ).

2o. Les assureurs peuvent demander la nullité de la réassurance, lorsque le réassuré savait, au moment de faire cette réassurance, que le navire était en retard, et que cependant il aurait tu à ses assureurs cette circonstance importante. (Arrêt d'Aix, du 8 octobre 1813, Sirey, 1816, 2. part., pag. 117).

3°. L'assuré, qui sait que le navire sur lequel porte l'assurance est parti, et que depuis le départ, le capitaine n'a pas donné de ses nouvelles, commet une réticence qui annule le contrat, lorsqu'il ne déclare. pas les circonstances à l'assureur.

L'assuré ne peut être admis à prouver par témoins qu'il avait donné verbalement à l'assureur connaissance des circonstances non déclarées.

La clause sur bonnes et mauvaises nouvelles ne couvre pas la réticence. du 14 avril 1818, Dalloz, Jurisprudence générale, tom. 2, pag. 61).

(Arrêt d'Aix,

4. La clause pour compte de qui il appartiendra, insérée dans une police, ne peut être considérée, sous le Code de commerce, comme un équivalent à la déclaration que les marchandises assurées sont la propriété de sujets d'une puissance belligérante, masquée à la faveur d'un nom allié ou neutre. Ainsi, le défaut de déclaration expresse à cet égard devrait être regardé comme une réticence, s'il avait influé sur l'opinion du risque, nonobstant la clause pour compte de qui il appartiendra. Arrêts de la Cour royale de Bordeaux, du 18 février 1823, et du 7 décembre 1824, Dalloz, 1824, supplément, pag. 149, et Jurisprudence universelle, tom. 2, pag. 64 et suivantes; voyez aussi notre Cours de droit commercial_maritime, tom. 3, pag. 528).

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L'assurance est nulle, si, connaissant l'époque du départ du navire, l'assuré ne l'à claré. L'assureur est recevable à exercer l'action en répétition, après avoir payé la perte, si le paiement est le fruit de l'erreur. (Arrêt de la Cour d'Aix, du 14 janvier 1826, rapporté dans le Journal de Marseille, tom. 7, pag. 18, an 1826).

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SECTION IV.

La Prime doit-elle être augmentée ou diminuée par la survenance de la guerre ou de la paix ?

La guerre ou la paix survenue depuis la signature de la police, n'est un motif ni d'augmenter ni de diminuer la prime stipulée, à moins qu'il n'y eût pacte spécial sur ce point.

Par les clauses imprimées de nos polices, les assureurs se soumettent à

$ 1.

Guerre de 1744.

$ 2. Paix de 1748.

tout risque, tant divin qu'humain, d'amis, d'ennemis, connus ou inconnus, prises et détentions de seigneurie, représailles justes ou injustes, etc. Ils ne peuvent donc point prétendre une augmentation de prime, sous prétexte de la guerre survenue, s'ils n'ont pas stipulé cette augmentation, et l'assuré ne peut demander la diminution de la prime, sous prétexte de la paix déclarée; car, comme dit Vattel, la seule possibilité de l'événement suffit pour empêcher toute exception. Lors de la guerre de 1744, des assureurs prétendirent ne devoir point etre garans des prises faites par les Anglais, parce que c'était là, disaient-ils, un cas insolite et non prévu. Ils furent condamnés à payer les pertes, et à se contenter des modiques primes stipulées avant la déclaration de la guerre. On ne crut pas qu'il fût permis de s'écarter de la teneur du contrat. Infrà, ch. 12, sect. 1.

Par réciprocité de raison, lors de la publication de la paix, il semblait que les primes dussent être payées telles qu'elles avaient été stipulées.

Cependant, par un arrêt du Conseil d'état, du 12 juillet 1748, le roi déclara nulles et de nul effet toutes les polices d'assurance passées avant la signature des préliminaires de la paix, pour raison des navires qui ne s'étaient pas encore mis en risque. Il fut simplement accordé aux assureurs, pour les indemniser des risques qu'ils auraient pu courir, une prime de huit jusqu'à quinze pour cent, suivant la distance des lieux.

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Comme cet arrêt ne parlait que des navires qui, lors des préliminaires de la paix, se trouvaient dans les ports du royaume, ou dans les ports et rades des colonies de l'Amérique, il en fut rendu un second le 18 janvier 1749, par laquelle Sa Majesté ordonna que le précédent arrêt serait exécuté par rapport aux navires qui avaient été employés au commerce des Echelles du › Levant. En conséquence, est-il dit, ordonne Sa Majesté qu'au lieu des fortes primes stipulées à cause des risques de la guerre, par les polices d'assurance passées avant que l'on ait eu connaissance de la signature des préli» minaires de la paix, pour raison de ceux desdits navires qui ne sont partis » des Echelles du Levant que depuis l'expiration des délais fixés par l'ordon› nance du 26 mai de la même année 1748, les négocians assurés ne seront » tenus de payer aux assureurs qu'une prime proportionnée aux seuls risques » ordinaires de la mer qu'ils ont courus, et qui sera réglée conformément > aux polices d'assurance faites pour semblables retours du Levant, depuis » que lesdits préliminaires de la paix ont été connus. Veut Sa Majesté que » lesdits assureurs ne puissent exiger aucune indemnité pour raison du séjour * que lesdits navires ont pu faire dans les ports et rades desdites Echelles,

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» et qu'à l'égard des vaisseaux qui, avant l'expiration des délais fixés par › ladite ordonnance, et dans un tems de risque de guerre, ont fait escale » d'une Echelle à une autre, il soit de plus payé aux assureurs une indem» nité proportionnée à l'éloignement où elles se trouvent les unes des autres, laquelle sera fixée sur les assurances qui ont pu se faire pendant la guerre, » à l'occasion du cabotage de l'une de ces Echelles à l'autre, et que, dans » le cas qu'il n'en aurait pas été fait pour raison dudit cabotage, ladite in› demnité soit arbitrée par les échevins et députés de la chambre du com› merce de Marseille, que Sa Majesté a commis et autorisés à cet effet, lorsque › les parties intéressées n'en conviendront à l'amiable. Ordonne au surplus, Sa Majesté, conformément à la disposition de l'art. 27 de l'Ordonnance de la » marine, de 1681, titre des assurances, que les polices faites sur ceux desdits › navires dont le voyage a été commencé avant l'expiration des délais fixés par la› dite ordonnance du 26 mai 1748, et qui sont arrivés à l'île de Malte, seront > exécutées; en conséquence, que les assureurs seront payés en entier de la prime stipulée par chacune desdites polices. Veut néanmoins Sa Majesté que • les dispositions du présent arrêt ne puissent avoir d'effet rétroactif, ni rien changer » aux arrangemens qui, lors de la publication d'icelui, se trouveront avoir été faits » à l'amiable entre les assureurs et les assurés, pour raison de ce que dessus. » Ce défaut d'effet rétroactif, et la confirmation des arrangemens intermédiaires pris par les parties intéressées, font assez connaître que ces deux arrêts du Conseil eurent pour motif des raisons d'Etat, et qu'ils ne doivent pas être tirés à conséquence.

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On se souviendra long-tems des hostilités commises par les Anglais en 1755. Nos navires marchands furent la proie de leurs pirateries. Les assureurs marseillais payèrent des pertes ruineuses, sans avoir eu l'idée de demander une augmentation de prime, parce qu'ils sentaient qu'il ne leur en était dû aucune, à moins qu'elle n'eût été stipulée dans la police.

Pothier, no. 83, nous apprend que « les assureurs anglais qui, avant les > hostilités de 1755, avaient assuré pour une prime modique plusieurs de nos › navires et plusieurs effets de nos commerçans, ne firent aucune difficulté de » payer le prix de leur assurance, pour les navires et effets qui, depuis les › hostilités, furent pris par les corsaires de leur nation, et ils ne demandèrent › aucune augmentation de prime.

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Cependant le même auteur parle tout de suite de diverses sentences de l'amirauté de Paris, confirmées par arrêts, qui accordèrent aux assureurs une augmentation de prime proportionnée à l'augmentation des risques causés par les

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Hostilités de 1755.

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