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France un budget de dix-huit cent vingt-cinq millions sans pousser l'ignorance des campagnes à une révolution terri

gouvernement, arme de toutes parts la France lorsque tout semble convier à la paix! Les grands mots de fraternité que vous inscrivez sur les drapeaux de votre nouvelle République, veulent-ils donc signifier guerre à l'étranger, propagande chez nos voisins? Vos intentions sont pacifiques, dites-vous; vous le proclamez partout; mais ne savez-vous pas que les armements provoquent les armements, et que du choc, du cliquetis de tant de canons et de fusils, l'éclair de la guerre peut jaillir? Désarmez, réduisez de moitié le budget de la guerre et de la marine; au-dehors, vous aurez donué un gage de sécurité aux peuples voisins qui aujourd'hui vous voient avec défiance; au-dedans, vous aurez rassuré l'industrie et le commerce, qui ne sauraient vivre au milieu des incertitudes d'une paix armée; vous verrez la sécurité renaître rapidement, les impôts rentrer d'eux-mêmes et sans effort, et si vous en avez besoin encore, le crédit et les capitaux, à qui vous ferez appel, vous répondront avec empressement. C'est à l'Assemblée nationale à imposer au gouvernement cette conduite, la seule patriotique parce qu'elle est la seule conforme aux vrais intérêts de la France, et qu'en même temps elle est la seule digne d'un peuple libre et fort. La République de 1848 doit proclamer que la France n'a plus besoin d'armée; à l'extérieur, tous les peuples n'envieront-ils pas sa liberté, si elle sait faire de nous un peuple heureux ? à l'intérieur, la garde nationale suffira toujours pour sauver la liberté contre les violences des anarchistes; elle l'a déjà prouvé! »

BENJAMIN DELESSERT.

(1848. Quelques observations sur le rapport de M. Garnier-Pagès, présenté à l'Assemblée nationale le 7 mai 1848.)

« Si, comme il faut l'espérer, la paix peut être maintenue, elle réduira, en France et en Afrique, les charges d'un établissement militaire disproportionné avec nos ressources et nos besoins. >>

ACHILLE FOULD.

(Mai 1848. Observations sur la situation financière.)

Je désire que l'élu du peuple sorte du scrutin avec une majorité assez forte pour épargner à l'Assemblée un choix périlleux, pour décourager les tentatives violentes, et enfin pour donner à ce nouveau pouvoir assez de force pour qu'il puisse sans danger RÉDUIRE AVEC L'ARMÉE le budget qui nous écrase, nous éviter une banqueroute trop imminente. »>

ODILON BARROT.

(15 novembre 1848, lettre à M. Eugène d'Arras.)

En présence de l'état de l'Europe, il nous a paru impossible de réduire cette année l'effectif de l'armée.

» Mais ce qui était impossible pour 1848 sera, nous l'espérons, possible pour 1849, et je me hâte d'ajouter que cette réduction est impérieusement nécessaire, et qu'il y va du SALUT ou de la RUINE de nos finances.

» ... Il est nécessaire, impérieusement nécessaire que cet effectif soit promptement réduit. Il faut que, soit en vertu d'une organisation nouvelle de la nature de celle dont M. le ministre de la guerre vient de nous entretenir, soit par tout autre moyen, le gouvernement et l'Assemblée se hâtent d'opérer sur le budget de la guerre les plus larges réductions. Il y va, je le répète, du SALUT ou de la RUINE de nos finances. »>

BINEAU.

Rapport sur le budget de 1848. Moniteur du
29 novembre 1848.)

ble, sans transformer l'urne électorale du suffrage universel en urne cinéraire de la civilisation française!

Si la Sentinelle de l'Armée sait d'autres dépenses que celles de l'armée et de la marine qu'il soit possible de retrancher, qu'elle les indique!

Nous acceptons la discussion qu'elle nous offre.

Nous ne demandons pas mieux que d'aller au fond de toutes les questions qu'elle soulève.

La Sentinelle de l'Armée s'indigne de ce que nous ayons qualifié le recrutement obligatoire d'esclavage militaire! Elle s'écrie: « Nous, des esCLAVES! »>

Est-ce donc que le soldat est libre de servir ou de ne pas servir, de quitter le drapeau pour rentrer au foyer, de dépouiller l'uniforme pour reprendre la blouse? Est-ce donc que les peines les plus sévères ne punissent pas la désertion? Est-ce donc que la loi ne condamne pas le malheureux qui, pour échapper à l'obligation du service militaire, se mutile, se scie les dents, s'ampute les doigts, ou s'efforce de se rendre myope au risque de se rendre fou? Au nom de qui parlez-vous, demanderons-nous à la Sentinelle de l'Armée ?

Est-ce au nom de l'officier?

Est-ce au nom du soldat?

Oui, l'officier est libre, car il peut donner sa démission. Non, le soldat n'est pas libre, car il a été tiré au sort et enlevé de force à sa famille, à sa commune, à sa profession, à sa vocation.

Sans doute, si l'armée française était réduite au chiffre de 180,000 hommes, cette réduction de l'effectif aurait pour conséquence une réduction équivalente dans les cadres; mais est-ce notre faute, à nous, si la situation désastreuse de nos finances rend impérieusement nécessaire cette double réduction de l'effectif et des cadres de notre armée ? Est-ce nous qui avons créé, étendu, aggravé cette situation? Est-ce nous qui avons doublé le chiffre des contingents annuels, qui de 40,000 hommes se sont élevés à 80,000 recrues? Un jour ou l'autre, le moins qu'on devra faire ne

sera-t-il pas de revenir au chiffre de l'armée tel qu'il existait dans les premières années de la Restauration? Eh bien! si cette nécessité est inévitable, pourquoi ne pas l'accepter tout de suite, pourquoi creuser et élargir l'abîme?

Le système que nous avons exposé est-il faux? Combattez-le, mais trouvez-en un qui réduise à deux cent millions la dépense de la force armée en France, car il faut absolument réduire le budget des dépenses à douze cent millions; et comment le réduire à cette somme, lorsque la dette publique et la force publique prélèvent déjà, à elles seules, plus de 940 millions?

Répondez !

1849.

LA GARDE NATIONALE ET L'ARMÉE.

4 septembre 1849.

Plus de fusils! plus de fusils! c'est le cri que nous n'avons cessé de faire entendre en février, mars et avril 1848, alors que le gouvernement provisoire, qui avait proclamé le droit universel du suffrage, au lieu de faire rentrer dans les arsenaux tous les fusils et tous les sabres, les en faisait, au contraire, sortir pour armer inconsidérément toute la poputation.

Jamais contre-sens ne fut à la fois plus stupide et plus funeste.

C'était semer la guerre civile.

Ce qu'on avait semé en mars et en avril 1848, on n'a pas tardé, en effet, à le récolter deux mois après les 23, 24, 25 et 26 juin.

Rien n'était plus facile à prévoir et à prédire; ce qui est arrivé était aussi manifeste qu'il est clair que l'excès d'un budget de 1,800,000,000 fr. de dépense nous prépare de toutes les révolutions la plus terrible : la révolution de l'igno

rance.

Hélas! hélas! notre voix sinistre sera-t-elle encore étouffée cette fois par l'imprévoyance qui ne veut pas être avertie, qui ne veut pas être éveillée et qui se venge des conseils qu'on lui donne par les calomnies qu'elle prodigue?

Si nous avons insisté exclusivement sur la transformation

de l'armée sans rien dire de l'abolition de la garde nationale, cela tient uniquement au point de départ de notre discussion, lequel était le Budget des dépenses.

Qu'on le croie bien! ce n'est pas à plaisir, ce n'est pas inconsidérément que nous nous efforçons d'agiter la question de la transformation de l'armée, et de faire sortir le pouvoir de cette léthargie fatale qui s'appelle l'ajournement. Il ne faut rien moins qu'une nécessité absolue et qu'un péril immense pour nous donner le courage d'entreprendre et de poursuivre une tâche aussi ingrate et qui nous expose à tant d'attaques perfides et d'interprétations insensées. Un déficit de 45 millions a suffi pour amener la révolution de 1793; que ne doit-on pas craindre de déficits annuels de 250 à 500 millions s'accumulant l'un sur l'autre (1)?

La garde nationale est le contre-poids nécessaire de l'armée soldée, lorsque le commandement de cette armée est entre les mains d'un pouvoir monarchique enclin à considérer comme son ennemi naturel la liberté populaire; mais là où la royauté a cessé de régner, la garde nationale n'a plus de motif de subsister. La garde nationale est une institution qui avait, en 1789, sa raison d'être, mais qui maintenant ne saurait plus servir qu'à perpétuer la funeste habi

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1839 10,623,593

1847 Pleine paix. 143 millions.

1847
265 millions.

L'augmentation des recettes, en huit années, n'a donné qu'une plus-value de 212 millions. Les trois services précédents ont augmenté seuls de près de 226 millions les dépenses. Si on y ajoute les exigences des autres services, la cause de ces continuels déficits s'expliquera d'elle-même.

H. PASSY.

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