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» à Dieu parce qu'il m'a créé, que lui » rendrai-je pour m'avoir régénéré & » réparé, mais régénéré & réparé d'une „ maniere fi étonnante, par l'Incarna» tion & la mort de fon Fils (a) ? Que rendrai-je à Dieu pour lui ? pour s'être livré lui-même pour moi? Quand » je pourrois me donner mille fois à lui, » me facrifier mille fois en représailles de cette grace, que fuis-je au prix de Dieu (b)? Que rendrai-je au Seigneur » pour tous les biens qu'il m'a faits, dit » encore faint Bernard ? N'est-il pas cer"tain que quand on me donneroit tou

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tes les vies des enfans d'Adam, tous » les jours du fiecle préfent, tous les tra» vaux de tous les hommes qui font, qui » ont été, & qui feront, pour les facri» fier à Dieu, ce ne feroit rien en com» paraifon de Jefus-Chrift fait homme (c) ? » Quand donc, conclut-il, je lui don» nerai tout ce que je fuis, n'eft ce pas » comme une étoile au prix du foleil » une goutte d'eau comparée à la pluie, une pierre à une tour, de la pouffiere

(a) Si totum me debeo pro me facto, quid reddam pro refecto & refecto hoc modo? Serm. 22 de Diverf. n. 6.

(b) Quid Deo retribuam pro fe? Nam etfi me millies rependere poffem, quid fum ego ad Deum? Ibil.

(c) Nonne fi conferrentur mihi omnes vitæ filiorum Adam, & omnes dies fæculi, & labores omnium hominum, quí. fuerunt, qui funt, & qui erunt, nihil effet ad comparationem Corporis Christi-incarnati ? Ibid,

à une

à une montagne, un grain de fable au prix d'un monceau (a)?

En effet, qu'avons-nous à donner à Dieu en reconnoiffance de ce qu'il a donné fon Fils unique pour nous racheter, en lui donnant même tout ce que nous avons ? » Je n'ai, dit faint Bernard, que deux » petites pieces d'argent, & même trèspetites, favoir, mon corps & mon ame; » ou même je n'en ai qu'une qui eft ma » volonté, que je dois facrifier à l'accompliffement de fes loix & à l'obfervation » de fes Commandemens. Quoi donc ! re» fuserai-je de la facrifier à celui qui étant » fi grand, m'a comblé de fi grands biens, » moi qui fuis fi petit & fi vil, & qui pour » m'acheter & me pofféder tout entier » s'est sacrifié lui-même tout entier (b)?

Puis donc qu'il eft indubitable qu'en nous donnant tout entiers à Dieu, nous ne reconnoîtrons que très-foiblement ce qu'il a fait pour nous; qu'en l'aimant uniquement & de tout notre cœur, nous ne reconnoîtrons que très-imparfaitement l'amour qu'il a pour nous : « Si nous re

(a) Cùm ergo donavero ei quicquid fum, quicquid poffum, nonne iftud fic eft ficut ftella ad folem, gutta ad pluviam, lapis ad turrim, pulvis ad montem acervum? Ibid.

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granum

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(b) Non habeo nifi minuta duo, immo minutissima, corpus & animam, vel potius unum minutum, voluntatem meam: & non dabo illam ad voluntatem illius qui tantus tantillum tantis beneficiis prævenit, qui toto fe me totum comparavit? Ibid.

Tome I.

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» tenons cette volonté que nous pouvons » lui immoler en fuivant exactement fes »préceptes, avec quels yeux, avec quel» le confiance pourrons-nous recourir » aux entrailles de la miféricorde de no» tre Dieu, dit saint Bernard (a)? O la » dureté, dit ailleurs ce Pere! ô l'in» fenfibilité ô l'endurciffement des en» fans d'Adam, qui ne font point tou» chés d'une telle bonté, que de telles » flammes n'échauffent pas, qu'un amour » fi ardent n'embrafe pas, qu'un torrent » fi impétueux n'entraîne pas (b)! O race perverfe & corrompue, enfans ingrats » & perfides, que ferez-vous dans le jour » de la calamité qui doit venir de loin ?? fondre fur vous? à qui aurez-vous re» cours? de qui implorerez-vous le fe» cours (c)? La feule expofition de l'amour » de Dieu envers les hommes fera com» me un poids terrible qui accablera les pécheurs & les ingrats au jour du ju

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»gement.

Ce que nous avons dit de notre obligation d'aimer Dieu au fujet du Mystere de l'Incarnation doit s'étendre auffi à

(a) Alioquin fi illam retinuero, quâ fronte, quibus oculis, quâ mente vado ad vifcera mifericordiæ Dei noftri? Ibid. (b) O duri & indurati, & obdurati filii Adam, quos non emollit tanta benignitas, tanta flamma, tam ingens ardor amoris! Serm. 2, in Pentec. n. 8.

(c) O generatio perverfa & infideles filii, quid facietis in die calamitatis de longe venientis ? ad cujus fugietis auxi Jium? Serm. 22, de Divers. n. 6,

notre Sauveur Jefus-Chrift. Car fi en fe faifant homme, il ne nous a pas donné des preuves moins éclatantes de fa tendreffe que Dieu fon Pere; il est visible que nous ne devons pas moins l'aimer & que tout notre amour toute notre vie, doit lui être également confacré. Auffi faint Auguftin dit-il que Jefus-Chrift eft venu nourrir & fomenter notre amour: Nutriens amorem.

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C'est en ces faints jours qu'il faut faire retentir aux oreilles des Chrétiens ce terrible anathême fulminé par l'Apôtre faint Paul (a): Si quelqu'un n'aime pas notre Seigneur Jefus-Chrift, qu'il foit anathême. Que notre amour pour lui nous faffe tout faire & tout fouffrir pour fa gloire, pluτότ que de l'offenfer. Nous ne faurions y manquer, fans nous rendre coupables de la plus horrible ingratitude.

Renouvellons-nous donc en ce faint

temps dans l'ardeur de la charité & la fer veur de la piété; & fupplions notre Sauveur d'allumer dans nos cœurs le feu du divin amour qu'il eft venu répandre fur la terre, & dont il déclare qu'il veut qu'il brûle & qu'il foit ardent.

(a) 1. Cor. 16.

CHAPITRE VI.

Humilité du Fils de Dieu dans le Myftere de l'Incarnation.

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NE des chofes qu'il faut considérer le plus attentivement dans le Myftere de l'Incarnation, c'eft l'humilité profonde que le Fils de Dieu y fait paroître. C'eft auffi ce que faint Paul veut que nous y fentions particulièrement, quand il dit; Soyez dans la même difpofition & dans le même fentiment où a été JesusChrift, qui ayant la forme & la nature de Dieu, n'a pas cru que ce fût pour lui une ufurpation d'être égal à Dieu; mais il s'eft anéanti lui-même, en prenant la forme & la nature de ferviteur, en fe rendant semblable aux hommes par tout ce qui a paru de lui au dehors (a). Jesus-Christ ne s'eft donc pas prévalu de fa qualité de Fils de Dieu pour fe difpenfer de s'abaiffer; mais il s'eft anéanti en fe rendant femblable à l'homme; il eft entré dans la fervitude & l'esclavage, renonçant ainfi en quelque forte à fa propre gloire & à fa grandeur, pour pouvoir fouffrir & mourir.

(a) Hoc fentite in vobis quod & in Chrifto Jefu, qui cùm in forma Dei effet, non rapinam arbitratus eft effe fe æqualem Deo, fed femetipfum exinanivit, formam fervi accipiens, in fimilitudinem hominum factus, & habitu inventus ut homo. Philipp. 2.