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16 fructidor an III; arrêté du 2 germinal an v; arrêté du 5 fructidor an ix :

Considérant que, dès la publication de l'arrêté du 7 thermidor an x1, la fabrique demanderesse a pu agir contre l'État pour obtenir l'abandon de la moitié de la forêt de Bonlieu qu'elle prétend lui avoir été restituée par ledit arrêté; que dès lors aussi la prescription a couru contre elle au profit de I'État;

Considérant qu'elle a interrompu celte prescription par la remise d'un mémoire adressé à l'autorité administrative en exécution de la loi des 28 octobre-5 nov. 1790, titre III, art. 15; mais qu'il est de toute évidence, à la seule lecture de cet article, que la présentation du mémoire ne constituait pas l'exercice de l'action; qu'elle n'était qu'un simple préalable à la poursuite judiciaire, et qu'après un mois écoulé sans réponse, il était permis de se pourvoir devant les tribunaux;

Considérant qu'il est constaté que l'administration n'a jamais statué sur la réclamation de la demanderesse dont celle-ci fait elle-même remonter la remise au 15 brumaire an xi; qu'ainsi donc un mois après celte date, c'est-à-dire le 16 frimaire an XIII ou 7 décembre 1804, le recours aux tribunaux a été ouvert et la prescription a commencé à courir, conformément aux art. 2227 et 2262 du C. civ. alors en vigueur;

Considérant que des réclamations poslérieures présentées à l'administration n'ont pu effacer ni la faculté d'agir en justice acquise par le défaut de décision sur la première demande, ni les conséquences de cette faculté, quant au cours de la prescription;

Considérant que la demanderesse soutient sans fondement que l'accès des tribunaux lui était fermé par la loi du 28 pluviose an VIII, qui attribuait aux conseils de préfecture la connaissance du contentieux des domaines nationaux; qu'en effet, sa demande ne se rattachant, sous aucun rapport, à la vente d'un bien national, n'entrait pas dans la disposition dont elle veut se couvrir; que vainement aussi elle oppose le défaut soit d'un envoi en possession, soit d'une autorisation de plaider dont elle prétend avoir eu besoin pour agir devant les tribunaux car ces octrois, que d'ailleurs elle ne justifie pas avoir jamais demandés, n'étaient pas indispensables pour faire les actes conservatoires de son droit et nommément pour interrompre la prescription au moyen d'une assignation en justice;

Considérant que la prescription, qui cou

rait depuis le 7 décembre 1804, a été suspendue par l'arrêté du 19 août 1817 qui réservait au roi, en premier ordre, l'appréciation des réclamations que les fabriques fondaient sur l'arrêté du 7 thermidor an x1; mais que le jugement dont l'arrêt attaqué adopte les motifs, jugement qui d'ailleurs admet l'existence du sursis, constate que la décision du gouvernement sur la prétention de la fabrique a été notifiée à celle-ci, le 19 septembre 1827; que cette décision, qui n'est pas produite au procès, a été interprétée en première instance comme rejetant la demande, et que l'arrêt confirmatif n'est pas attaqué de ce chef;

Considérant qu'en épuisant son office par la décision précitée, le pouvoir exécutif a laissé à la justice ordinaire son cours régulier, sans qu'il fùl besoin d'un renvoi spécial aux tribunaux; qu'il suit de là que, dès le 10 septembre 1827, la demanderesse a pu intenter son action en justice, et que dès ce moment la prescription a repris son cours;

Considérant que depuis cette dernière époque jusqu'au 11 mars 1847, date de l'assignation introductive d'instance, il s'est écoulé dix-neuf ans et cinq mois qui forment, avec les douze ans et huit mois accomplis du 7 déc. 1804 au 19 août 1817, un total qui excède trente-deux ans ; qu'en conséquence, en déclarant acquise à l'Etat la prescription établie par le Code civil, l'arrêt positions citées à l'appui des sept premiers attaqué n'a pu contrevenir à aucune des dismembres du moyen de cassation.

Sur le huitième paragraphe, consistant en ce que la possession de l'Etat était fondée sur la violence, et qu'en l'admettant comme base de la prescription, l'arrêt allaqué a contrevenu à l'art: 2253 du C. civ.:

Considérant qu'il n'a jamais été méconnu devant les juges du fond que le domaine a pris possession du bois de Bonlieu en vertu de la loi et dans les formes qu'elle détermine; qu'au surplus, dans le calcul du temps de la prescription, il a été tenu compte à la demanderesse des empêchements d'agir résultant des dispositions applicables à la cause, en sorte que le moyen de cassation, dans sa dernière partie, n'est ni recevable ni fondé;

Par ces motifs, rejette le pourvoi, condamne la demanderesse à l'amende de 150 francs, à une indemnité de pareille somme et aux dépens envers la partie défenderesse,etc.

Du 7 novembre 1851. - 1re Ch. — Prés. M. De Gerlache, 1er prés. Rapp. M. Defacqz. Conclusions conformes M. Leclercq, proc. général. Pl. MM. Bosquet, Botlin, Maubach et Allard.

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Que le prévenu est Belge, qu'il avoue d'avoir procédé en Belgique, le 24 décembre 1850, en qualité de desservant de

même entre étrangers soumis à une législa- l'église de la Sarthe, et dans ladite église, tion qui reconnaîtrait comme valable le mariage contracté devant le prêtre seul, sans qu'il leur ait été justifié d'un acte de mariage préalablement reçu par l'officier de l'état civil (*). (Loi du 10 germinal an x, art. 54; C. pénal, 199; C. civ., 1 et 3; Constitution, 16, 109.)

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Poursuivi devant le tribunal correctionnel de Huy, pour avoir procédé aux cérémonies religieuses du mariage entre Pierre Slossig, né en Bavière, et fils d'un sujet de la Prusse saxonne, et Catherine Zanfretta, domiciliée en Lombardie, le défendeur, curé de la Sarthe, commune de Huy, y fut condamné, le 24 déc. 1850, à 16 francs d'amende par application de l'article 199 du Code pénal,

attendu que l'article 199 du Code pénal punit d'une amende de 16 fr. à 100 francs lout ministre d'un culte qui procède aux cérémonies religieuses d'un mariage sans qu'il lui ait été justifié d'un acte de mariage préalablement reçu par l'officier de l'état civil;

«Que cette disposition est toute de police, qu'elle est formelle, absolue, qu'elle n'autorise aucune exception, et qu'ainsi elle doit atteindre le prêtre belge dans tous les cas où il procède, en Belgique, à un ma

(') Jurisprudence constante. Voyez, pour les motifs et les autorités, le réquisitoire du minislère public, l'arrêt que nous recueillons s'étant borné à rejeter implicitement le moyen soulevé d'office par M. le rapporteur.

aux cérémonies religieuses du mariage de Pierre Slossig et de Catherine - Charlotte Zanfretta; qu'il avoue également qu'il ne lui a pas été justifié d'un acte de mariage préalablement reçu par l'officier de l'état civil; qu'il est donc prouvé qu'il s'est rendu coupable de la contravention prévue par ledit art. 199 du C. pénal, et que par suite il doit lui être fait application de la pénalité qu'il commine. »

Appel par Grenier qui, devant la Cour de Liége, invoque sa bonne foi, les instructions reçues de ses supérieurs et la loi du domicile des époux, laquelle confie aux ministres du culte la célébration des mariages, et, le 7 août 1851, arrêt qui infirme:

<< Attendu que les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les étrangers qui résident en Belgique, comme elles régissent les Belges résidant en pays étranger;

<< Attendu que les deux personnes dont le prévenu a célébré le mariage religieux dont il s'agit sont : l'une née en Bavière, fils d'un sujet de la Prusse saxonne, l'autre domiciliée en Lombardie, pays autrichien;

<< Attendu que, dans ces pays, le mariage des catholiques ne se célèbre pas devant un officier civil; que le mariage en présence de l'église est seul prescrit ; que c'est ce qui résulte des pièces du procès, des art. 70 à 74 du titre du Mariage du Code autrichien; des art. 5 et 7 du même titre du Code bavarois et de l'art. 156 du même titre du Code prussien; qu'ainsi rien n'empêchait que ces deux personnes, se trouvant en Belgique,

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fissent, en vertu du statul personnel, cėlėbrer leur mariage par un prêtre investi des mêmes pouvoirs à cet effet que les prêtres de leur pays;

«Que c'est ainsi que s'interprétait, en France, en 1810, trois mois après la publication de l'art. 199 du C. pén., la loi relative aux mariages entre étrangers, ainsi que l'atteste une circulaire du grand juge ministre de la justice, en date du 16 mai 1810, portant in terminis: que « des étrangers « qui désirent se marier en France ne sont << pas tenus de se conformer aux lois fran«çaises, mais qu'ils peuvent se marier sui<< vant celles de leurs pays, et qu'en ce cas << rien n'empêche le ministre du culte de « leur donner la bénédiction nuptiale;

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Que cette décision est confirmée par une lettre du garde des sceaux, en date du 13 octobre 1815, portant « qu'un étranger et << une Française, cette dernière déclarant « vouloir suivre la condition de son mari, « peuvent se marier conformément aux rè«gles usitées dans le lieu du domicile du « futur, et que ces personnes ne sont as<< treintes à se soumettre aux formalités << voulues par les lois françaises; »

Que la première de ces instructions, surtout, est d'autant plus propre à faire connaltre l'esprit de la loi à cet égard, que le jurisconsulte dont elle émane avail naguères, en sa qualité de ministre de la justice, assisté aux discussions qui avaient précédé l'émission de cette loi;

« Attendu que les faits de la cause ne laissent aucun doute que c'est sous l'influence de ces idées que le prévenu a procédé aux cérémonies religieuses du mariage de Pierre Slossig et de Catherine-Charlotte Zanfretta, sans qu'il lui ait été justifié d'un acte de mariage préalablement reçu par l'officier de l'état civil; qu'il a, en effet, affirmé à l'audience qu'il croyait que l'art. 199 du C. pén. était sans application aux étrangers et surtout aux étrangers régis par des lois qui ne prescrivent, pour la validité de l'union conjugale, que sa célébration suivant les rites de l'Eglise;

«Que si l'on considère en effet que cette disposition a eu pour objet de donner une sanction à la loi qui veut que le mariage, pour être valable, soit célébré devant l'officier de l'état civil, d'empêcher, ainsi, comme l'a dit l'orateur du gouvernement, que les ministres du culte ne procèdent aux cérémonies religieuses avant la conclusion du mariage légal, ne compromettent l'état civil des personnes peu éclairées et de prévenir

le concubinage et l'illégitimité des enfants, on peut facilement admettre que le prévenu a cru, ainsi qu'il l'a affirmé, que l'art. 199 n'était pas applicable à des étrangers régis par des lois qui reconnaissent comme valide le mariage célébré in facie Ecclesiæ, dont par suite l'union contractée de cette manière ne pouvait produire ces fâcheux résultats; qu'il a pu raisonnablement croire qu'il ne devait pas exiger des époux Slossig la justification d'un acte de mariage qui n'était pas obligatoire ni d'aucune utilité pour

eux;

<< Attendu que ces considérations, jointes au défaut d'intérêt du prévenu qui d'ailleurs a procédé en vertu d'une délégation de son supérieur, ne laissent aucun doute sur l'absence d'intention;

Que si, en général, la bonne foi, qui n'a pour appui que l'erreur de droit, n'excuse pas, cette règle, qui d'ailleurs n'est pas une disposition législative, n'est pas absolue; qu'il appartient au juge d'apprécier les limites que la raison doit apporter dans son application, et que l'équité exige qu'elle fléchisse devant les motifs graves qui ont pu donner lieu à l'erreur du prévenu et notamment le doute sérieux que présente l'applicabilité de la loi au cas actuel;

«Par ces motifs, réforme, etc.>>

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L'arrêt de la Cour de Liége constate, 1o que le mariage religieux auquel a procédé, à Huy, M. le curé de la Sarthe, a été célébré suivant les rites et les formes du diocèse de Liége, en vertu de pouvoirs spėciaux attribuant qualité au desservant pour bénir l'union de Godefroid Slossig et de Marietta Zanfretta; 2o que les deux personnes dont le prévenu Grenier a célébré le mariage sont l'une née en Bavière, fils d'un sujet de la Prusse saxonne, l'autre fille d'un Lombard, domiciliée en Lombardie, pays autrichien; 3° que dans ces pays le mariage des catholiques ne se célèbre pas devant un officier civil; que le mariage en présence du ministre de l'Eglise est seul prescrit; que c'est ce qui résulte des pièces du procès, des articles 70 à 74 du titre du Mariage du

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Code autrichien, des articles 5 et 7 même titre du Code bavarois et de l'article 136 du même titre du Code prussien ; qu'ainsi rien n'empêchait que ces deux personnes, se trouvant en Belgique, fissent, en vertu du statut personnel, célébrer leur mariage par un prêtre investi des mêmes pouvoirs à cet effet que les prêtres de leur pays. Cette appréciation est souveraine; car en statuant ainsi, la Cour de Liége a jugé des faits, décidé sur des documents constatant des fails, et dans cette qualification de faits doivent nécessairement rentrer l'examen et la décision par la Cour de Liége des points de législation étrangère sur lesquels elle a motivé son arrêt. « Quand les tribu«naux (dit Fœlix, Droit international, n° 16) sont tenus de prononcer suivant « les lois étrangères, ils décident plutôt une « question de fait qu'une question de droit. «En effet, les lois étrangères sont des faits par rapport aux juges français. C'est pour« quoi (porte la note de la Revue des Revues, t. 3, p. 332), la fausse application ou mème « la violation d'une loi étrangère par les tri« bunaux français ne constitue qu'un mal « jugé et n'autorise point un pourvoi en cas«sation. » L'avocat citait encore l'opinion de Pardessus et la jurisprudence de la Cour de cassation de France. Ces faits constants, la Cour remarquera que le pourvoi ne contient aucune indication de textes de lois prétendùment violės, aucune indication de motifs sur lesquels ce recours serait fondé. Le pourvoi formé le 7 août 1851 n'a été notifié au prévenu que le 16 du même mois; celle absence d'énonciation, ce retard dans la signification sont-ils choses indifférentes; la loi n'a-t-elle rien exigé de plus pour rendre le pourvoi recevable? Sans insister sur cette contravention, examinons le pourvoi. Le curé de la Sarthe est-il passible de la peine prononcée par l'article 199 du C.pen.? Oui, dit le rédacteur des notes à l'appui du pourvoi, cela résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation. Nous soutenons la négative et nous repoussons l'applicabilité de l'arrêt du 10 avril 1835, parce que la question soumise alors à la Cour suprême n'est pas celle que présente la cause actuelle, puisqu'en 1835 il s'agissait uniquement de savoir si l'arrêté du gouvernement provisoire avait abrogé l'article 199 du C. pén., tandis qu'aujourd'hui il s'agit, l'article 199 du C. pén. admis comme obligatoire, de rechercher s'il est applicable aux faits de l'espèce. Pour résoudre cette dernière question il faut poser quelques principes. En règle générale l'effet des lois ne s'étend pas

au delà des limites du territoire de la société politique qui les décrète; ces lois n'obligent que les nationaux pour qui elles sont faites. L'usage général des nations (dit Fœlix, no 24) a fait admettre quelques modifications utiles et nécessaires. La première est relative aux lois du statut personnel. Ces lois suivent la personne partout où elle se trouve, leur force et leurs effets s'étendent sur tous les territoires. Les lois personnelles d'un Etat ne s'appliquent qu'aux nationaux et n'exercent aucun effet sur les étrangers qui se trouvent momentanément sur le territoire. Boullenois, Portalis, Pardessus, Merlin, expriment la même opinion, que nous trouvons consacrée par la discussion du Code civil (Locré, t. 1er, p. 398).

Ainsi l'étranger en Belgique est protégé, régi par la loi du statut personnel de son pays; la loi française n'est pas la loi des étrangers, par conséquent c'est la loi étrangère, et non la loi française, qu'il faut consulter pour déterminer la capacité des époux et les formalités relatives à la célébration de leur mariage; car, ainsi que nous l'enseigne encore Fœlix, dans son résumé sur la doctrine si controversée des statuts, « est statut << personnel la loi qui détermine les forma«lités relatives à la célébration des ma

riages. Le consentement est de l'essence du mariage, il se rattache à la capacité de la personne. Mais les lois politiques des divers Etats ont déterminé de manières différentes le ministre ou l'officier qui devait recevoir le consentement. La loi des époux investit de cet office le ministre du culte, le Code civil français ne reconnaît que l'officier de l'état civil. La loi étrangère, en déléguant le ministre du culte, contient une prescriplion, un commandement pour tous ceux qui y sont soumis. Donc en contractant mariage en Belgique devant un ministre du culte, les étrangers observent la prescription de la loi qui les régit. Vainement dit-on que ces questions doivent être écartées du débat, c'est une erreur, car pour apprécier la contestation sous son véritable point de vue, il faut nécessairement aborder ces questions; en effet, pour savoir s'il y a contravention à la loi, il faut d'abord qu'on ait déterminé quelle est la loi qui doit régir la contestation. Vainement encore prétend-on que le mariage n'aurait aucun effet en Belgique; c'est là résoudre la question par la question. Le statul matrimonial des époux n'est pas la loi belge, c'est la loi étrangère, leurs droits seront donc réglés par celle-ci et non par la loi belge. Ce n'est pas, nous dit-on, au point de vue du statut personnel qu'il faut discu

ter, il s'agit d'une contravention à une loi de police et de sûreté qui oblige les étran gers comme les nationaux. D'abord le fait n'est pas de nature à compromettre la sûreté. publique; il ne s'agit pas non plus d'une loi de police dans le sens que l'article 3 du C. civ. attache à ce mot. Il s'agirait, si le fait était une contravention, d'une atteinte à une loi étrangère, mais la loi belge ne réprime pas les atteintes à l'autorité étrangère, ainsi que la Cour de cassation vient de le décider (Bulletin, 1851, 1, 456). Lorsqu'il s'agit de mariage entre étrangers, le ministre du culte a mission de la loi étrangère, il ne peut donc être soumis à la loi belge, puisqu'il n'est que le ministre d'un acte qui concerne uniquement les étrangers. L'article 199 du C. pén. est la sanction de la loi belge, cette disposition n'est donc pas applicable lorsqu'il n'y a que contravention à la loi étrangère. La loi du 20 septembre 1792 a introduit des règles nouvelles sur les actes de l'état civil. La loi du 7 vendémiaire an iv a ensuite défendu aux juges d'avoir égard aux attestations que les ministres du culte pourraient donner relativement à l'état civil des citoyens (art. 20). Cette expression citoyens indique qu'il ne s'agit pas du mariage des étrangers. La loi du 18 germinal an x a statué ensuite que les curés ne donneront la bénédiction nuptiale qu'à ceux qui justifieront en bonne et due forme d'avoir contracté mariage devant l'officier civil, mais cette disposition, édictée sous l'empire des lois que nous venons de citer, n'a pas plus d'étendue que celle-ci. Le Code civil, ainsi que l'ont exprimé les orateurs du gouvernement, n'est fait que pour les nationaux. L'établissement d'officiers d'état civil n'est fait que pour unir les Belges. Le Code ne contient aucune disposition sur les mariages et l'aptitude des officiers investis du pouvoir d'unir les étrangers. En unissant deux étrangers, le curé de la Sarthe n'a contrevenu à aucun texte de la loi civile belge. Or, l'article 199 est édicté pour réprimer les contraventions à la loi belge sur l'état civil des citoyens, pour faire cesser des abus, ainsi que le porte l'arrêt de cassation de 1855; l'article 199 du C. pén. n'est donc pas applica ble aux faits de la cause. « D'autres dispositions (dit M. Noailles, Locré, Mot. du C. pén., p. 536), se trouvent dans le § 1er, « même section, elles sont plus particuliè«<rement destinées à garantir l'état des citoyens. Elles prononcent un juste châti<«ment contre les ministres de la religion qui, par une criminelle usurpation, vou«draient substituer leur ministère à celui

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« des seuls officiers reconnus par l'autorile publique, et remplacer par des cérémo«nies religieuses des actes qui, aux yeux de «la loi. sont des actes purement civils. » Appliquer cette disposition au mariage de deux étrangers dont la loi du statut personnel ne reconnaît pas l'acte civil, ce serait étendre la loi au delà de son texte, de son esprit, du but que le législateur s'est proposé. C'est une loi pénale, donc de stricte interprétation. Le législateur a voulu, dit la Cour de cassation en 1835, prévenir les abus résultant de la longue confusion entre les mains du clergé des fonctions d'officier de l'état civil et de ministre du culte'; faire disparaître une cause de concubinage public, la procréation d'enfants naturels. Mais alors la loi n'est pas faite pour ceux dont la loi du statut personnel a maintenu la confusion entre les mains du prêtre des pouvoirs que la loi a séparés. Elle n'est pas faite pour ceux qui ne peuvent contracter mariage que devant un prêtre seul qui, par la bénédiction clericale, sont légitimes époux et procréent des enfants légitimes. L'avocat argumentait du réquisitoire de M. Delebecque dans l'affaire jugée, le 29 juillet 1851, par la Cour de cassation: Appliquer l'article 199 aux faits de la cause, c'est, dit-il, dépasser le but du législateur, c'est retourner en odieuse pénalité un texte de lọi bienfaisante. Generalia statuta restringenda sunt ad id quod est rationis. Il ne serait ni rationnel ni équitable que le ministre d'un culte fut passible d'une peine pour avoir, dans un but que la loi avoue, procédé aux cérémonies religieuses d'un mariage entre étrangers, parce qu'il n'a pas exigé l'acte civil qui pour eux n'était ni obligatoire, ni utile, ni nécessaire, ni licite. D'ailleurs le titre sous lequel est placé l'art. 199, C. pén., est formel, § 1er, des Contraventions propres à compromettre l'état civil des personnes. La rubrique de ce paragraphe détermine clairement l'étendue et l'objet des dispositions placées sous cette rubrique. L'article 199 du C. pén. est général, dit-on; cela est vrai en ce sens qu'il frappe tous ceux dont les actes sont de nature à compromettre l'état civil des personnes, sinon, non. La disposi tion est encore générale en ce sens qu'elle frappe ceux qui, usurpant des pouvoirs attribués aux officiers de l'état civil, marient religieusement des personnes qui ne peuvent légalement s'unir que devant l'officier de l'état civil, sinon non.

Mais, dit-on, il y a contravention à la loi belge, puisque l'acte a été passé en Belgique, et que d'après la maxime locus regit

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