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devenant des preuves irrécusables en faveur des prévisions de l'auteur, sont toutefois des événements qui ont marché plus vite que sa plume. Nous livrons donc ce premier volume à la publicité avant que le second soit entièrement terminé.

D'ailleurs, ces deux volumes peuvent très-bien se lire séparément et ne sont pas étroitement liés l'un à l'autre.

Le premier volume est une discussion de principes appuyée sur les faits de l'histoire contemporaine.

Il se compose de trois parties distinctes:

La première est un aperçu général des causes des révolutions de l'année 1848, mais plus spécialement le tableau de la révolution de l'empire d'Autriche; elle en explique l'origine, et a pour objet principal de montrer que l'affaiblissement de cet empire a contribué à donner à la politique de lord Palmerston la fausse direction qu'il a suivie.

La seconde partie traite de l'influence qu'exerce l'Angleterre. Cette influence a pour double base les théories politiques et les intérêts matériels; c'est particulièrement au moyen des derniers que l'Angleterre pèse sur le monde. Or, il faut examiner la question si la direction qui est donnée aux intérêts matériels par l'ascendant de l'Angleterre, peut conduire les peuples à la liberté qu'on demande aux formes politiques. Cette discussion montre la con

tradiction qui se manifeste entre les promesses que fait la politique anglaise et les résultats qu'elle produit.

La troisième est une discussion approfondie des principales questions de l'époque : les législations sur la presse, les théories de la liberté, de l'égalité, de la souveraineté et de la légitimité, ainsi que de l'attitude que le cabinet britannique a prise relativement aux questions qui s'y rapportent. Après cette discussion théorique vient l'exposé historique de l'introduction des idées anglaises en France et des résultats qu'elles ont produits; une appréciation motivée des formes parlementaires anglaises. Il ressort de cet examen la preuve que, s'il y a quelque similitude dans les formes extérieures des deux gouvernements de France et d'Angleterre, l'esprit constitutionnel de ces deux gouvernements est entièrement différent. Cette discussion, appuyée sur des faits, conduit jusqu'à l'époque du congrès de

Vienne.

Le second volume qui paraîtra très-prochainement, est une revue des principales affaires qui ont occupé l'Europe et la diplomatie depuis le congrès de Vienne jusqu'à l'année 1848. Cette revue a pour objet de montrer quelle est l'influence qu'a exercée l'Angleterre sur cette époque, et combien la prépondérance de sa politique a servi à donner aux événements la direction qu'ils ont prise. Ce second

volume démontre d'une manière irréfragable que l'Angleterre n'a pas atteint les objets qu'elle disait avoir en vue; elle se trouve donc placée dans le dilemme de s'être trompée, ou si elle prétend ne s'être pas trompée, elle ne peut alors échapper à l'accusation d'avoir suivi une marche qui avait pour but de faire faire fausse route aux autres.

Paris, ce 20 janvier 1852.

LORD PALMERSTON,

L'ANGLETERRE

ET LE CONTINENT.

1.

Les annales de l'Europe n'auront jamais eu à enregistrer des événements d'une nature aussi générale, aussi violente et aussi extraordinaire que l'ont été ceux de l'année 1848. Il y avait un pressentiment presque universel que des événements graves se préparaient. On voyait l'agitation, on en connaissait les causes, les moyens, on en signalait le but; et cependant tout le monde fut pris comme à l'improviste. Il n'y a pas eu d'imprévoyance, mais il y a eu irrésolution. Il y a eu ce manque d'appréciation du danger qui fait que, sans le méconnaître, on ne sait cependant pas se préparer à le combattre.

Je ne ferai pas l'honneur aux partis qui se proclament hautement révolutionnaires de leur attri

buer exclusivement les bouleversements qui menacent d'une destruction totale l'ancienne organisation politique et sociale de l'Europe. C'est un ennemi qui, depuis longtemps, avait fait sa déclaration de guerre et s'était mis en campagne. S'il a eu des succès aussi décisifs que l'ont été ceux de l'année 1848, n'est-ce pas parce qu'on lui avait laissé choisir son champ de bataille tel qu'il voulait l'avoir; qu'on lui avait laissé prendre tous les ouvrages avancés des positions qu'il fallait défendre; qu'on avait laissé ses agents, les uns secrets, les autres connus, s'introduire dans toutes les places? N'est-ce pas parce qu'on n'a su opposer à la hardiesse, à la vivacité et à la persévérance de ses attaques qu'une résistance passive; au déluge de ses paroles que le silence d'une dignité mal comprise; ou bien à ses sophismes que des armes émoussées par le temps? Les théories de l'erreur peuvent sans doute varier à l'infini; tandis que la vérité a des limites nécessaires : mais les moyens de faire valoir et de défendre les droits de la vérité ne sont pas enfermés dans ces limites. L'intelligence doit savoir prendre et varier les formes qui la feront pénétrer plus avant dans l'esprit et dans la conscience de ceux à qui elle s'adresse: mais ce n'est que dans la vérité seule que doivent être prises ces formes. Peut-on désarmer l'erreur, quand soi-même on emploie des armes qui lui sont empruntées ? Il est difficile d'entrer dans notre époque la plume à la main. Elle est si agitée, si confuse, qu'il faut craindre de ne pas en parler avec clarté ou avec justice. Quand les événements sont plus forts que

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