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POUR SERVIR A L'HISTOIRE

DE LA

RÉVOLUTION D'ESPAGNE.

CHAPITRE PREMIER.

Commencement de la révolution d'Espagne.

PEU de temps après le mariage de Ferdinand de Bourbon, prince des Asturies, avec sa cousine germaine, Marie-Antoinette de Bourbon, fille du roi de Naples, il commença à s'élever des dissensions dans l'intérieur de la famille royale d'Espagne. Le roi Charles IV et la reine en imputèrent la cause à la reine de Naples (1). La princesse des Asturies morte en 1806, un paquet rempli de lettres et de papiers secrets, qui lui avaient appartenus,

(1) Lettre de Charles IV à Napoléon, du 29 octobre 1807, insérée dans le Moniteur du 5 février 1810.

demeura au pouvoir de son confesseur don Andres Garcia Hernandez. On les enleva à ce dernier, par ordre du roi, pour être remis à l'inquisiteur-général, d'où, après plusieurs évènemens, ils passèrent aux mains de Napolèon, ayant été trouvés par ses agens, renfermés dans deux cassettes dans la maison du duc de l'Infantado, le 9 décembre 1808 (1).

La désunion continua à régner entre Ferdinand et ses parens, après la mort de la princesse, comme auparavant; elle ne fit qu'augmenter à mesure qu'on éloignait le prince du maniement et même de la connaissance des affaires du royaume, et à mesure aussi qu'on voyait augmenter l'influence et le pouvoir de don Manuel Godoy, prince de la Paix, époux de dona Louise de Bourbon, comtesse de Chinchon, fille légitime de l'infant don Louis, frère du roi Charles III, et cousine-germaine de Charles IV.

Le prince des Asturies avait en sa faveur tous ceux qui ne participaient pas de celle de Godoy. Ses principaux confidens étaient les ducs de l'Infantado et de San-Carlos, don Juan Escoiquiz, dignitaire et chanoine de Tolède, ancien instituteur de son altesse royale, et enfin le comte d'Orgaz et le marquis d'Ayerbe.

(1) Moniteur du jeudi 22 décembre 1808.

De concert avec Escoiquiz, et par son secours, Ferdinand se détermina à écrire à l'empereur Na poléon, le 11 octobre 1807, une lettre secrète, qui est devenue depuis publique dans toutes les gazettes de l'Europe (1).

Cette lettre avait eu pour objet de demander en mariage telle personne de la famille impériale qu'il plairait à sa majesté d'adopter pour fille, l'assurant que cette union était l'objet des vœux de toute la nation espagnole. Le prince ajoutait qu'il écrivait secrètement et à l'insçu du roi, son père, parce que ce dernier se trouvait environné d'hommes méchans, qui, pour des motifs particuliers, désapprouvaient le projet; qu'il suppliait également sa majesté d'ajouter à la faveur celle de faire elle-même la première ouverture de cette négociation par les moyens les plus propres à atteindre le but proposé, en protestant que si de la part de ses parens on lui proposait quelqu'autre mariage, il n'y consentirait jamais. Enfin, il finissait par demander le secret, afin que sa conduite ne donnât pas lieu de l'accuser d'avoir manqué au respect filial (2).

(1) Moniteur du 5 février 1810.

(2) Lettre imprimée, no Ier du Moniteur du 5 février 1810.

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La résolution d'écrire cette lettre est trèsremarquable par la circonstance d'avoir été prise par Ferdinand, après avoir promis à son père, il y avait peu de temps, qu'il se marierait avec mademoiselle Bourbon, fille cadette de l'infant don Louis, sœur du cardinal de Bourbou, archevêque de Tolède, et de la princesse de la Paix. Ferdinand avait changé d'intention, en vertu des persuasions faites par Escoiquiz; mais il n'en avait pas donné communication au roi son père, quand il écrivit la lettre en question.

L'empereur la laissa sans réponse. On ignore s'il a jamais eu l'idée d'en faire une; on serait porté à croire le contraire, en lisant ce que sa majesté impériale et royale écrivit le 16 avril suivant, et la publication officielle faite dans le Moniteur universel du 5 février 1810. Quoiqu'il en soit, à peine aurait-il eu le temps de le faire, lorsque le prince de Masserano, ambassadeur d'Espagne, lui présenta une lettre de Charles IV, datée de l'Escurial, du 29 octobre 1807, par laquelle il faisait connaître à l'empereur, comme à son fidèle allié, que Ferdinand avait conspiré contre la souveraineté de son père et contre la vie de sa mère; qu'ainsi il était résolu de l'exclure de la suc

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