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refpire que l'avantage de la Marine : j'ai dû vous offrir celui de ma Traduction. Vous avez, MONSEIGNEUR daigné l'accepter; agréez-en cette expreffion de ma vive reconnoiffance.

Je fuis avec refpe&t,

MONSEIGNEUR;

Votre très-humble & très-obéiffant Serviteur, VIAL DU CLAIRBOIS.

M. DE CHAPMAN, Conftructeur des Armées Navales de Suede, publia en 1768 un Ouvrage en planches fur l'Architecture Navale, intitulé: Architectura Navalis Mercatoria, &c.

Il m'avoit paru, par plufieurs Constructions ponctuées fur les plans qui le compofent, que l'Auteur étoit un homme inftruit, un véritable Ingénieur. Il m'eft tombé entre les mains, l'hyver dernier, un Traité de Conftruction en langue Suédoife, qu'il a depuis mis au jour (en 1775): dans la prévention avantageufe où je me trouvois, des talens diftingués de ce Constructeur, j'ai jugé que ce nouvel Ouvrage pourroit être utile à la Marine: je formai le deffein d'en faire la traduction. J'y ai trouvé des facilités bien au-delà de mes espérances. M. de Löwenörn, Officier de la Marine Danoise, servant dans notre Armée, jeune homme plein d'efprit, de connoiffances, a eu la complaifance de vouloir bien employer les intervalles que lui laiffoit le fervice, à travailler avec moi pour mettre cet Ouvrage dans un état tel que je puffe l'entendre. A fur & à mefure que nous allions de l'avant, je reconnoiffois de plus en plus que nous ne perdions pas nos peines.

Ce Traité eft plein de chofes neuves; quelques-unes très-bien vues: d'autres ne préfentent que des apperçues. Mais fi l'Auteur n'eft pas toujours parvenu au but, au moins paroît-il être dans la carriere, & nous lui devons de nous mettre dans le cas de partir du point où il eft arrivé par fes propres forces. On entend que je veux parler de la question de la réfiitance du fluide fur les corps en mouvement.

par

Il en eft de même de tous les problêmes fameux dans les arts & fciences. Les connoiffances ne vont pas par faut & bond, fi je puis m'exprimer ainfi ; elles s'avancent par degrés. Il y a beaucoup de mérite à bien engréner & à parcourir des intervalles fenfibles dans la carriere des Sciences; c'eft le feul qu'aient jamais eu la plupart des grands hommes: peu de perfonnes peuvent revendiquer abfolument une découverte importante.

J'avois quelqu'inquiétude fur une liaison que M. de Chapman fembloit vouloir établir entre fon Traité & l'Ouvrage en planches, publié sept ans avant. Ce dernier ne fe trouve pas en France, & coûte 180 livres en Hollande, en feuilles. Il eft de nature à occuper dignement une place dans le cabinet des curieux fur cette ma

tiere, mais il n'eft pas d'un prix à la portée de tout le monde: ainfi, fi ces deux Ouvrages s'étoient trouvés liés d'une façon inféparable, il n'y eut eu guere que le Gouvernement qui auroit pu hafarder la dépenfe de la publication. Mais, comme je l'avois efpéré, ils n'ont qu'un rapport éloigné, & fi l'on en excepte le douzieme chapitre du Traité qui n'eft qu'une répétition de l'écrit qui accompagne l'Ouvrage en planches, tout ce Traité peut s'entendre parfaitement, en ajoutant aux figures du livre trois plans de Vaiffeaux pris dans les grandes planches : & c'est ce que j'ai fait.

Un célebre Aftronome *, grand Obfervateur, mais point du tout Constructeur, ni homme de mer, a auffi entrepris, m'a-t-on dir cette traduction. Son zele eft louable: mais il eft inconcevable qu'il puiffe remplir cette tâche d'une maniere tant foit peu fatiffaifante. Comment, au milieu de Paris, aura-t-il pu comprendre un livre plein de termes techniques qui lui font, & à tout ce qui l'entoure, à tous égards, parfaitement étrangers! Cette concur rence ne m'a point arrêté. Il y a ici à entendre, indépendamment du langage Suédois, celui du Géometre, de la Marine, & du Conftructeur.

M. de Chapman, pour les chofes de géométrie, fuit un certain Auteur Anglais, peu connu en France. Quant à moi, j'ai recherché les mêmes propofitions dans le Cours de M. Bezout, & je les y ai prefque toujours trouvées. J'y renvoie, comme je l'ai fait dans mon Effai fur l'Architecture Navale.

* Ceci a été écrit, & mon manufcrit a été envoyé au Ministre en Août 1779. Il la renvoyé à l'examen de l'Académie de Marine le 4 Septembre fuivant.

PRÉFACE

PRÉFACE

DE

L'AUTEUR.

SI, confidérant la quantité de Vaiffeaux qui ont été

conftruits depuis que les hommes ont entrepris de naviguer, & de traverser l'Océan, on remarque tous les pas que l'on a faits vers la perfection dans l'art de la Construction, on fera d'abord tenté de croire qu'on en a enfin atteint le dernier dégré. Ce qui pourroit encore donner de la force à cette opinion, feroit une obfervation fur le peu de changemens confidérables qu'ont, de notre fiecle, éprouvés les Vaiffeaux, foit dans leur forme, foit dans leur gréement.

Mais que d'un autre côté on envisage le grand nombre de différentes especes de Bâtimens dont on se sert seulement en Europe; cette variété infinie semblera prouver au contraire que tant ceux qui conftruisent les Vaiffeaux, que ceux qui les gréent, n'ont pu encore trouver leur vraie forme, ni la meilleure maniere de les gréer, & en général, & pour chaque efpece de Bâtiment en particulier.

Pour pouvoir fe décider fur le dégré de perfection auquel les Navires, en général, peuvent être parvenus, divifons en deux claffes les Vaiffeaux de toutes les Nations

b

;

dans l'une nous comprendrons les moindres Bâtimens, ou ceux dont on fe fert pour le cabotage & les petites navigations ; dans l'autre les plus grands, ou ceux qu'on emploie aux voyages de long cours & qui font propres à naviguer fur l'Océan.

En examinant la premiere claffe, on voit les Bâtimens dont fe fervent les différens Peuples pour le transport dans leur cabotage, ou leur commerce avec leur plus proche voifin. Mais comme les climats, l'étendue & la profondeur des mers, les pofitions des pays par rapport à la mer & entr'eux, auffi leurs productions, font très-différens de nation à nation, les Bâtimens ne peuvent être de la même espece; ils doivent néceffairement être affujettis à ces circonftances, tant dans leur proportion & leur forme, que dans leur maniere d'être gréés, de façon qu'on trouve une forte de perfection même dans leur différence, relativement à leur deftination.

Si enfuite on observe les Bâtimens compris dans la feconde claffe, on reconnoîtra que, conftruits pour le même but, ils font, quoique de nations différentes, reffemblans dans les parties effentielles; qu'on remarque leur proportion, on trouvera que les bornes pour la largeur font entre le tiers & le quart de la longueur, que les moindres ont ordinairement plus de largeur par rapport à la longueur, que les plus grands, que le tirant-d'eau eft quelque chofe de plus ou de moins que la demi-largeur ; la hauteur au-deffus de l'eau a auffi fes bornes qui fe reglent d'après la deftination particuliere du Vaiffeau. Pour ce qui regarde les emménagemens, ils ont une grande reffemblance dans ces

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