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moyens qu'a le débiteur légalement incarcéré d'obtenir son élargissement, au nombre des ordinatoria litis cette observation répond à l'objection de M. le procureur-général Merlin, qu'en thèse générale (*) le code de procédure ne peut pas être censé déroger au code civil, parce qu'il n'est, à l'égard du code civil, qu'une loi organique, destiné seulement à le faire marcher: or, le code civil avait dit, art. 2070, qu'il ne dérogeait pas aux lois particulières qui autorisaient la contrainte par corps en matière de commerce.

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On voit que la dérogation n'est pas réelle : le septuagénaire négociant, ou le simple particulier septuagénaire, signataire des effets de commerce, sera légalement incarcéré en vertu du titre 2 de la loi du 15 germinal, mais il obtiendra son élargissement en vertu de l'art. 800 du code de procédure, modificatif de l'art. 18 du titre 3 de la même loi, lequel titre est entièrement abrogé par celui de l'emprisonnement au code procédure.

C'est ainsi que cet article 18 établissait six causes d'élargissement le code de procédure n'en a que cinq; la sixième de l'ancienne loi était le laps de cinq an. nées consécutives de détention. Croit on qu'un détenu, dout l'emprisonnement daterait de 1807 ou d'une année postérieure pourrait s'étayer de cet article pour réclamer sa liberté après cinq ans? Non sans doute.

Les défenseurs de l'élargissement des septuagénaires répondaient encore par d'autres observations à l'argument de M. le procureur général Merlin qui a déter

(*) Répert, tome 3, page 72, 1.re colonne.

miné l'arrêt de la cour suprême du 10 juin 1807, puisqu'elle ne donne pas d'autre motif.

Ils les présentaient toutefois avec la circonspection et le ton de doute dont on ne doit pas s'écarter en combattant une décision de la cour régulatrice et l'opinion d'un magistrat, auteur et jurisconsulte éminent, dout les réquisitoires instruisent le barreau, même dans les cas infiniment rares où il a pu tomber dans quelque erreur.

L'objection de M. le procureur général, disaient-ils, est fondée sur une présomption; mais toute présomption cède à la vérité; et il est démontré que les auteurs du code judiciaire ont considéré comme étant dans leurs attributions l'affranchissement par l'âge de la contrainte par corps ordonnée par des jugemens quelconques, autres que les jugemens criminels ou correctionnels. S'il paraît évident qu'ils ont généralement disposé, sans excepter les matières de commerce, nous n'avons pas à nous enquérir s'ils ont pu le faire. Les tribunaux ne sont que les organes des lois; ils ne les jugent pas.

On voit du projet du code de procédure que le bénéfice de l'àge en matière de dettes commerciales était écarté; que les étrangers en étaient également privés, avec les stellionataires et les banqueroutiers frauduleux.

Les observations imprimées des cours sur le projet ont fait connaître que plusieurs d'entr'elles, et M. Michel, procureur général de celle de Douai, ont tenté de ramener l'esprit du législateur à des sentimens d'humanité pour les vieillards, toujours accablés d'in

firmités, et pour qui l'emprisonnement est une peine de mort.

La commission du conseil d'état a sans doute adopté ces observations; car le second projet converti en loi supprime toutes les restrictions du premier, autres que le cas du stellionat qui est exprimé, et celui de la banqueroute frauduleuse, reconnu pour être du ressort du code pénal.

Ainsi les législateurs du code de procédure ont eu sous les yeux les motifs pour et contre l'affranchissement du septuagénairé négociant, relativement à la contrainte par corps: ils ont donc prononcé par une locution générale cet affranchissement, avec pleine connaissance de cause.

A observer encore qu'aucune cour, aucun orateur, n'a pensé alors qu'en disposant en matière d'exécution sur des affaires de commerce, le code de procédure dérangeait les dispositions décisoires du code civil.

Au surplus, le code judiciaire établit quelquefois des principes législatifs, tels que l'article 581, le titre de la péremption et l'article 469: il n'est pas borné à des régles sur la forme de procéder.

M. Merlin cite l'article 834 comme l'unique qui déroge au code civil: on peut y ajouter l'article 126, dérogatoire à l'article 2063 du Code-Napoléon. (*)

(*) Voyez les questions transitoires par M. Chabot, tome premier, page 70.

Il dit que l'article 800 est conçu en forme suppositive; mais l'énonciation au futur est naturellement dispositive les mots le débiteur . . . . obtiendra son élargissement équipollent à ceux-ci : nous ordonnons le débiteur, etc., obtienne son élargissement.

que

Voici dans quelle espèce l'arrêt a été rendu :

Le sieur Schelfhout était porteur de plusieurs lettres de change, créées au profit du sieur Stevens, par les sieurs Romberg, père et fils elles se moutent à 49,972 francs.

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Ces derniers sont condamnés par corps envers Schelfhout à les payer.

Le 22 mars 1809, celui ci les cède à Vanmalder.

Le 23 juin 1809; arrêté de compte entre Romberg, père, et Stevens; les lettres de change dont il s'agit sont portées au crédit de Stevens.

En 1811, Romberg père intente action en redressement de compte à charge de Stevens et conclut au paiement d'une soinme d'environ 600,000 francs.

Peu de temps après Vanmalder met à exécution les jugemens obtenus par Schelfhout, et fait emprisonner Romberg, père. Opposition et demande en nullité de l'emprisonnement, avec dommages inté rêts subsidiairement celui-ci conclut à l'élargissement.

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Au fond, Romberg pose en fait que Vanmalder n'est que le prête nom de Stévens ; que les effets lui ont été portés en compte par ce dernier et qu'ils sont acquittés par compensation.

Subsidiairement il soutient qu'étant octogénaire; il est affranchi par l'âge de la contrainte par corps; il dépeint le scandale de l'arrestation d'un créancier de son âge par le manège de son débiteur, caché derrière le rideau qui veut se débarasser de ses poursuites en avançant le terme de sa carrière.

La notoriété des services par lui rendus au commerce de la Belgique; le souvenir de ses cent vaisseaux voguant sur l'océan, son élevation à la dignité de baron par l'empereur Joseph II, organe de la reconnaissance publique, tant de circonstances donnaient une teinte sombre à l'exécution.

Vanmalder nie d'être le prête - nom de Stévens et prétend qu'il est demeuré propriétaire des traites depuis la cession.

Le procès se poursuit d'abord sur les conclusions subsidiaires.

Jugement du tribunal civil de Bruxelles, qui déclare Romberg non-fondé à obtenir son élargissement.

Appel à la cour impériale. Romberg y fait valoir les moyens que nous avons tracés et ceux de l'arrêt ci-après.

Vanmalder reproduit les principes de l'arrêt rendu au profit de Devos - Bauwens, qui se trouvent rapportés pages 247 et 254 de notre 19. volume, et la grande objection sur les effets du systême de l'appelant, dans les rélations commerciales, puisque l'abolition virtuelle de la contrainte par corps pour fait de commerce en résulte.

Nous avons déjà mentionné les conclusions de M. le premier avocat général, favorables à l'appelant.

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