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France, & des Dames de leur fuite, s'eft auffi rendue à l'Hôtel royal des Invalides, & y a été reçue par le Secrétaire d'Etat de la Guerre, les Membres du Confeil de la Guerre, le Gouverneur de l'Hôtel, & plufieurs Officiers-généraux. Sa Majefté étoit fuivie de l'Officier des Gardes-duCorps de fervice auprès de fa perfonne. Elle eft entrée par la porte royale du dôme, où le Curé des Invalides a également eu l'honneur d'haranguer Sa Majefté. Les Soldats mutilés étoient rangés ainfi qu'ils l'avoient été lors de la vifite que le Roi á faite de cet établiffement.

Après avoir entendu la Meffe, Sa Majefté a vifité les différens réfectoires, les infirmeries, les cuifines & la paneterie ; Elle a goûté le pain & la foupe, & l'a fait goûter à Madame, Fille du Roi. Sa Majefté, en fortant de la chambre du Confeil pour fe rendre chez le Gouver neur, où Elle s'eft repofée un quartd'heure, a trouvé fur fon paffage les Orphelins militaires au nombre de près de 200, dont plufieurs avoient exécuté pendant la Meffe, & dans tous les lieux. qu'Elle a vifités, des fymphonies guerrières. Sa Majefté, après avoir fait à M. le Marquis de Sombreuil, l'éloge de l'ordre qu'Elle a trouvé établi par-tout, a daigné y joindre fon portrait. Sa Majefté a auffi

remis à l'Adminiftration de l'Hôtel, une fomme d'argent pour être diftribuée aux bas-Officiers & Soldats, & a chargé le Secrétaire d'Etat de la Guerre, de demander au Roi l'ordre de faire payer un mois de gratificatien aux Officiers; Elle a fait efpérer encore qu'Elle s'occuperoit des moyens de procurer des fecours durables aux pauvres filles des Invalides, auxquelles Elle a bien voulu en accorder de momentanés, en ajoutant s'il m'étoit poffible de l'oublier, ma fille m'en rappelleroit, fans doute, le fouvenir.

par

Les Ambaffadeurs de Tippoo Saëb, attendus depuis fi long-temps, font enfin arrivés à Toulon, le io de ce mois, à bord de la corvette du Roi l'Aurore, commandée M. de Monneron, Capitaine de vaiffeau Portugais, & Lieutenant de vaiffeau de France pour la campagne. Ces Envoyés ont été reçus dans le plus grand appareil, ainfi qu'on le verra par la relation fuivante.

« Le 10 juin, dès le plus grand matin, il fut préparé dans l'Arfenal, 10 Canots deftinés pour aller prendre les Ambaffadeurs à bord; trois étoientrichement décorés de tendelets de damas cramoifi ornés de galons & franges d'or. »

A midi les tambours des Troupes de la Ma rine, ainfi que ceux des Troupes de la Garnifon, battirent dans toute l'étendue de la ville, & au même inftant tous les Bâtimens de la rade furent pa

voilés de la manière la plus brillante; les grands pavillons flottèrent fur le vaiffeau Ainira! & fur tous les autres qui font mouillés dans le Port; les Galères arbórèrent également leurs éte.dards bleus & blancs. »

« Vers les trois heures & demie de l'aprèsmidi, tous les Canots partirent pour aller prendre les Ambaffadeurs, qui defcendirent dans ces Chaloupes; fur les quatre heures, tous les Bâtimens de la rade les faluèrent de 15 coups de canon chacun; & à mefure que le premier Canot en-. troit dans le Port par la chaîne vieille, le vaisseau Amira les falua auffi de 15 coups de canon. »

A quatre heures & quart, les Envoyés mirent pied à terre; M. le Marquis de Caftelet, Directeur général de l'Arfena!, les reçut & les com-; plimenta. Neuf carroffes fe trouvoient préparés pour les conduire, ainfi que tous les gens de leur fuite, à l'Hôtel de M. le Commandant. M. de Caftelle donna la main aux Ambaffadeurs, & les fit entrer dans le premier & le plus beau, où il prit place lui-même fur le devant; tous les Officiers de la fuite des Ambaffadeurs, M. de Moaneron & tous les Officiers de la Marine qui étoient dans les Canots, prirent place dans les autres carroffes. Au moment où les carroffes marchèrent vers la porte de l'Arfenal, les tambours battirent au champ. Etant arrivés à la porte de l'Arfenal, 6 Archers de la Prévôté de la Marine, poftés en dedans la grille, ayant à leur tête l'Exempt de Prévôt, leur préfentèrent les armes; lorfqu'ils furent vis-à-vis du Corps-de-Garde, le détachement de la Marine, de garde, préfenta également les armes, le tambour battit au champ. Deux Suiffes à la grande livrée du Roi, étoient à la porte de l'Arsenal, & ouvrirent les deux battans à l'arrivée des carroffes; le premier carroffe étoit

également efcorté par 4 autres Suiffes à la grande livrée du Roi, deux aux portières, & deux portant un ponton. Lorfqu'ils furent fortis de l'Arfenal, le détachement de Troupes de terre qui bordoit la haye, leur préfenta les armes, le Drapeau les falua, & les tambours battirent au champ ; en même-temps ce détachement les accompagna jufqu'à l'Hôtel de M. le Commandant, précédé de toute la mufique du Régiment de Dauphiné. qui exécuta différentes marches; ils pafsèrent ainfi au milieu de la 6me, divifion de la Marine qui bordoit la haie au champ de bataille, & qui leur préfenta les armes. »

« Les Ambaffadeurs defcendirent de carroffe dans la cour de l'Hôtel qui leur étoit deftiné, & dans cet inftant les Remparts de la Porte Royale les faluèrent de quinze coups de canon, & un moment après la Batterie Royale, fituée à côté de la mâture, en fit autant. »

« Leurs Excellences étant entrées dans l'Hôtel où M. le Comte d'Albert de Rions, accompagné de beaucoup d'Officiers de la Marine en grand nuiforme les attendoient, vint les recevoir à la porte de la Salle de réception qui étoit richement décorée. Etant couvert, il porta la main au front, & leur donna l'accolade, ainfi que deux jeunes Officiers qui fe préfentèrent pour la recevoir; ce Général, qui dans ce moment représentoit le Roi, leur donna la main, & les conduifit prendre place à fa droite, où ils s'affirent fur trois fauteuils plus bas que celui de ce Commandant, qui avoit à fa gauche M. le Directeur Général. »

« Ce Général, toujours couvert, témoigna alors à ces Ambaffadeurs que le Roi lui avoit ordonné de les recevoir avec la plus grande magnificence, qu'ils n'avoient qu'à demander, que tout étoit à Feurs ordres, qu'on leur ccorderoit tout ce qui

pourroit leur être utile & agréable. Dans cet intervalle un Officier de la Garnison vint offrir aux! Ambassadeurs une Garde d'honneur, qu'ils ne voulurent point accepter; ce même Officier leur demanda de la part de MM. les Lieutenans du Roi, & commandant la place en l'abfence de M. de Coincy, le temps où il plairoit à leurs Excellences de leur donner audience. Elles répondirent qu'étant très-fatiguées, elles ne pouvoient point encore déterminer le jour; enfin, après une très-courte converfation avec M. d'Albert de Rions, elles fe retirèrent dans leurs appartemens pour se repofer. " « Le premier de ces Ambaffadeurs s'appelle Mahom t Durvesh-Kan; le fecond, Achirolly& le troifième, Mahomet Olchman. »

Kan;

« Les Officiers & autres gens de la fuite de ces Ambaffadeurs font partis de l'Inde au nombre de 41; il en eft mort trois en route, & ils font arrivés au nombre de 38, faifant celui de 44 perfonnes, les Ambaffadeurs compris. »

« Comme la nourriture des Afiatiques est effentiellement du Riz, on avoit eu foin ici de s'en procurer de plufieurs fortes du plus fin & du plus blanc; & attendu qu'ils ne mangent de viandes que celles des animaux tués par eux, on avoit également eu la précaution de s'approvifionner de Moutons, de Gibier & de Volailles de différentes espèces, comme Pigeons, Perdrix, &c. »

La route de ces Ambaffadeurs jufqu'ici fera une fête continuelle: l'hôtel qui doit les recevoir dans cette capitale, rue Bergère, étoit préparé depuis long temps. Ils font Mufulmans, comme leur Maître Tippoo Saëb, & non Indous leur langue eft probablement le Perfan; nous

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