Page images
PDF
EPUB

Le roi nomma M. Pasquier directeur général des ponts et chaussées de France (22 mai 1814); conseiller d'état, service extraordinaire ( 4 juillet 1814); et enfin chancelier de France (1815).

PASTORET (Claude-Emmanuel-Joseph-Pierre), né le 24 décembre 1755. Ancien membre du conseil des cinq-cents, déporté le 18 fructidor an 5.

Admis au sénat le 14 décembre 1809; admis à la chambre des pairs du roi, le 4 juin 1814; secrétaire de l'une et l'autre assemblée.

Comte d'empire; officier de la légion d'honneur, nommé par l'empereur; commandant de la même légion, nommé par le roi, le 8 janvier 1815; de plus conseiller au conseil royal de l'instruction publique. ( 17 février 1815.)

Nous allons mettre sous les yeux du lecteur deux échantillons du style de M. Pastoret.

<< Monseigneur, Sénateurs,

» Des lois fondamentales sont la première garantie d'un empire, et l'hérédité du trône est la première de ces lois. Sans elle, plus de véritable monarchie. Un ordre fixe et prévu dans la succession à la couronne et dans le gouvernement de l'état, assure seul au peuple un pouvoir toujours présent, toujours protecteur; et parmi les moyens que la législation offre pour l'obtenir, les meilleurs, sans doute, sont ceux que le temps a éprouvés et dont le souvenir inspire le désir de les voir renaître. Tel est, messieurs, le caractère du projet de sénatus-consulte soumis aujourd'hui à votre délibération. Peut-être, dans quelques lois précédentes, n'avait-on pas toujours profité, avec un soin égal, des leçons du temps et de l'histoire; en consacrant de nouveau les sages principes qu'elles établissent, il était nécessaire d'en modifier quelques autres, trop éloignés des maximes immémoriales du peuple français.

» Le premier article donne la régence à l'impératrice mère de l'empereur mineur, si feu l'empereur n'en a pas disposé, et elle la réunit de droit à la garde de son fils. Plus de vingt reines ont été régentes parmi nous; et cet usage est aussi ancien que notre monarchie. C'est au cinquième siècle qu'elle se forma, et dès le sixième, l'histoire nous offre de jeunes rois sous la tutelle de leurs mères. Nous en retrouvons des exemples sous la deuxième race; ils sont plus fréquens encore sous la troisième; et ce n'est pas uniquement le soin de la personne que l'on confie à la tendresse des mères; c'est aussi le gouvernement de l'état : regni curam, admi

nistrationem, tutelam, regimen habeat, sont les expressions les plus ordinaires de nos anciennes lois. La reine Alix fut deux fois régente, sous Louis VII son époux, et sous Philippe-Auguste son fils; la reine Blanche le fut deux fois également, par les volontés suc→ cessives du prince à qui elle était unie, et de celui à qui elle avait donné le jour, de Louis VIII et de Louis IX.

» Je n'entrerai point ici, messieurs, dans des détails historiques, qui ont été recueillis avec soin, et placés naguère sous les yeux de tous les Français. Je ne m'arrêterai pas même sur cette reine Blanche, au sujet de laquelle j'aimerais pourtant à rappeler un fait trop peu connu et bien digne de l'être; c'est que la petite-fille de son illustre fils, de saint Louis, épousa le fils du premier empereur de la maison d'Autriche, et que cette maison, par là même, remonte à la plus célèbre de toutes les régentes dont notre histoire ait conservé le souvenir. J'éprouve, je l'avoue, messieurs, quelque bon❤ heur à rappeler ce fait dans une époque où les Français doivent à la petite-fille de Marie-Thérèse le gage de tant d'affections et le modèle de tant de vertus.

» En assurant la régence à l'impératrice dans le cas de décès de l'empereur, le projet de sénatus-consulte ne fait donc que nous ra→ mener à la doctrine ancienne de la monarchie. Si le trône, comme le disaient nos ancêtres, ne pouvait tomber de lance en quenouille, cela n'empêchait point que le gouvernement ne fût laissé aux mères jusqu'à ce que la lance pâît être mise dans les mains de celui qui était déjà roi.

» La source d'une telle doctrine était dans la nature même. Quel garant plus sûr que l'amour maternel! Le premier bonheur des mères, leur plus doux devoir, c'est leur fi!s : qui veillera mieux à leur conserver un pouvoir fort et respecté! Une autre ambition ne peut les atteindre, et s'il était permis de joindre à des motifs tirés de la nature un motif qui appartient plus particulièrement à l'intérêt public, nous dirions que c'est précisément parce qu'elles ne peuvent arriver à la royauté, dans les pays où les lois leur en ferment l'entréo que leur régence a tous les avantages sans offrir aucun danger. Le plus tendre des sentimens de la nature tourne alors tout entier au profit de l'état.....

» Le sacre et le couronnement de l'impératrice et du prince impé rial, roi de Rome, sont l'objet des deux titres suivans. Des lettrespatentes qui vous seront adressées et publiées dans les formes ordinaires, accorderont cette prérogative à l'impératrice. Le roi de Rome pourra aussi, en sa qualité d'hériter de l'empire, être sacré et couronné du vivant de son père; et dès ce moment, la date du couronnement de ce prince sera jointe dans toutes les lois à celle de l'avenue de l'empereur. Cette disposition est encore conforme aux institutions les plus antiques de notre monarchie. Les fils et les petits-fils de

Charlemagne reçurent de leurs pères ce témoignage de confiance et de bonté, et les deux premiers siècles de la troisième race en virena autant d'exemples qu'ils eurent de rois. Quel acte en effet peut être tout à la fois plus auguste et plus touchant! quel jour que celui où, sous les auspices de la religion et de la patrie, se mêlent aux expressions de la reconnaissance d'une génération entière pour des bienfaits déjà reçus, les espérances d'un bonheur qu'elle pourra transmettre à sa postérité !....

>> Tels sont, messieurs, les principaux objets du sénatus-consulte à jamais mémorable dont le projet vous est soumis aujourd'hui. Heu➡ reux de pouvoir, comme l'a si bien dit l'orateur du conseil d'état, Préparer une telle loi dans le calme de la réflexion, dans l'absence » de tous les intérêts, dans le silence de toutes les passions, dans >> l'éloignement de toutes les douleurs! » Heureux aussi, comme magistrats du premier corps de l'empire, de pouvoir admirer et bénir cette prévoyance qui ajoute à la stabilité des constitutions de l'état, par des institutions sages et fortes qui deviennent un bienfait de plus pour les Français ! Les institutions sont les colonnes du pouvoir. C'est par les institutions que le génie des plus grands rois est présent encore à la postérité la plus reculée; c'est le défaut des institutions qui peut amener successivement les efforts de l'ambition, les troubles civils, et enfin le plus épouvantable fléau dont la colère céleste puisse frapper les hommes, l'anarchie. Charlemagne avait répandu sur la - France, pendant près d'un demi-siècle, la gloire et les bienfaits : à la mort de son petit-fils, le trône commence à chanceler; neuf rois y passent avec une étonnante rapidité. Ils y montent, ils en descendent, ils y remontent pour en redescendre encore; des ambitieux s'en emparent sous le prétexte de le protéger; ils exercent tout le pouvoir au nom du prince légitime qui n'en a plus aucun.

» La France a, durant un siècle, des règnes sans rois, et des rois vivant sous un autre règne; et au milieu de ces dissensions, le peuple est entraîné et avili par la tyrannie féodale, pour offrir un nouveau témoignage de cette vérité que l'histoire a toujours et partout consacrée, que le plus grand intérêt des peuples est nécessairement lié à la plus grande force du trône, à sa plus grande solidité.

̧» Et c'est surtout dans cette enceinte, messieurs, que doivent être constamment rappelés ces principes tutélaires du bonheur des nations; c'est ici que doit briller sans cesse, dans son plus grand éclat, le flambeau de l'expérience; par combien de maux la France n'a-t-elle pas expié le malheur de l'avoir laissé éteindre! »

(Extrait du rapport fait au sénat par M. le comte Pastoret, au nom de la commission. (Février 1813. )

<< SIRE,

» Vos fidèles sujets composant la chambre des pairs de France pportent au pied du trône de V. M. leurs respectueux remerciemens our la communication qu'elle leur a fait donner de l'exposé de la ituation actuelle du royaume. Ils reconnaissent, avec les ministres e V. M., que la plus grande partie des maux qui ont pesé sur la Trance avaient leur source dans le despotisme du dernier gouverneent, dans la passion effrénée de la guerre, dans le mépris de la onstitution, des lois, des traités, des droits même de chaque citoyen; fin dans l'abus désastreux de forces que ce gouvernement n'avait as créées, et de ressources qui n'étaient pas son ouvrage.

» C'est aux lumières du siècle, Sire, c'est au patriotisme des eilleurs citoyens que la nation a dû le premier germe des bienfaits ont on a tant abusé. L'agriculture, soulagée du fardeau de la dîme de celui des droits féodaux; la législation politique et civile, admistrative et financière ramenée à l'uniformité; les corporations, les lles, les provinces, faisant à la loi commune le sacrifice de leurs iviléges; l'accroissement du nombre des propriétaires, la création e nouveaux produits et de nouvelles richesses, l'accélération du ouvement de capitaux, voilà ce que l'on a vu naître au milieu des ages de la révolution. Les richesses que vingt-cinq années de calaités n'ont pu entièrement épuiser, suffisent encore pour placer la rance au rang des états où les finances offrent le plus de ressources. » Elles n'étaient pas détruites ces richesses au moment où s'éleva gouvernement dont le principal talent consistait à placer toujours nation dans ces positions critiques où un effort appelait un autre fort, où le patriotisme était contraint de seconder la tyrannie, où onneur national n'avait à choisir qu'entre l'oppression étrangère l'oppression domestique.

» Qu'a-t-il fait de l'autorité suprême, celui qui ne s'est pas con›té de la part qu'il avait à la gloire nationale? De tous côtés, il va quérir la haine, amasser des vengeances, prodiguer le sang et les sors, et contraindre les puissances rivales à découvrir dans leur opre sein des forces qu'elles nè se connaissaient pas. Dès lors le stin des combats est abandonné à la puissance du nombre: on voit › multitudes s'entre-choquer, les peuples tout entiers précipités uns sur les autres : et lorsqu'enfin l'Europe désespérée conjure tre son oppresseur et le nôtre, ses ennemis l'accablent à son tour is le poids énorme des masses qu'il leur apprit à soulever.

▸ A cette époque mémorable, il a été donné au monde un specle jusqu'à présent sans exemple dans l'histoire des nations : l'ast, Sire, de vos longs malheurs, supportés avec tant de courage; inion de vos grandes lumières, qui se sont perfectionnées dans la

retraite, le respect qui suit les vertus constamment pratiquées, ont rendu les ennemis d'un gouvernement qui n'est plus, les alliés de V. M. C'est à ce titre, Sire, qu'ils ont traité avec vous; et l'on a vu V. M., encore entourée de leurs nombreuses armées, imprimer aux négociations le double caractère de la modération et de la fermeté.

» Vous êtes rendu à la nation, Sire, et la nation vous est rendue; qui pourrait douter désormais du salut de la patrie? Dès que V. M. a saisi les rênes du gouvernement qui venait de succomber sous l'excès de son despotisme, elle a sagement organisé le contrepoids des pouvoirs; et lorsque, consultant l'esprit des peuples, l'état actuel des sociétés, le vœu des hommes éclairés, V. M. se lie à ses sujets par une constitution dont les principes étaient déjà dans toutes les bouches et dans tous les cœurs, la nation entière se presse autour de cette charte sacrée, et vous jure amour et fidélité. C'est dans cette éharte, Sire, qu'est votre force et la nôtre; elle rend à l'esprit public son énergie; elle réalise pour nous cette salutaire division des pouvoirs qui les modère l'un par l'autre, qui prévient les imprudences, qui pèse les mesures, et juge avec maturitě les moyens. Là sont les germes réparateurs de toutes les infortunes passées, et toutes les sources de la prospérité future.

» Le prompt développement des principes constitutionnels par des lois nécessaires, la marche régulière des autorités, le raffermissement de la religion et de la morale, rallieront tous les intérêts, feront taire toutes les passions, et fonderont la confiance publi que sur des bases inébranlables.

» La nation, instruite par les plus grands événemens, est digne de s'associer à vos hautes pensées, et de concourir à l'œuvre de son bonheur.

» Les révolutions qu'elle a subies n'ont pas altéré son caractère Un peuple agricole, actif et industrieux; un peuple qui a reçu de la nature une vive sensibilité, un haut courage, qui s'enflamme pour la gloire, et préfère la mort à la honte, sera toujours respecté des autres nations, et toujours digne de vous.

affai

» Aux derniers jours d'une lutte terrible, nos braves armées, blies et dispersées, combattaient encore avec un courage héroïque pour l'honneur et pour la patrie.

» Sire, un peuple qui a déployé tant de grandeur dans l'adversité, saura, pour assurer les premiers bienfaits que nous devons à V. M., faire de grands efforts et de généreux sacrifices. Votre cœur ne les ordonnerait point, la seule autorité royale ne suffirait pas à les effectuer; mais votre peuple va au-devant de ses sacrifices; il inspirera à ses représentans les sentimens d'amour, de respect de fidélité qui l'animent. V. M. imprimera à ses conseils le sceau de son caractère. Vos ministres seront responsables devant vos peuples du dépôt d'autorité

« PreviousContinue »