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officiers municipaux, du peuple et du clergé, le serment solennel de veiller avec soin sur les fidèles qui allaient lui être confiés, d'être fidèle à la nation, à la loi et au Roi et de maintenir de tout son pouvoir la constitution décrétée par l'assemblée nationale et acceptée par le Roi.

Les curés élus et institués devaient prêter le même serment que les évêques.

Telles sont les réformes qui sous le nom de Constitution civile du clergé furent apportées dans la police et la discipline ecclésiastique

Ces réformes frappaient de graves abus; mais elles ne touchaient nullement au dogme. Ce n'étaient point des institutions nouvelles, mais le renouvellement d'une ancienne discipline que la mobilité des choses humaines et une longue suite d'empiétements, de concessions ou d'erreurs avaient fait négliger.

La démarcation des diocèses est l'ouvrage des circonstances, du temps et des hommes. En fait et en droit l'Eglise n'a point de territoire. La puissance épiscopale, absolue, illimitée comme celle des apôtres ne se peut ni restreindre ni circonscrire. C'est un caractère divin que la division de l'Eglise universelle en sections et en diocèses n'a pu rendre ni précaire, ni local.

Les élections sont pour ainsi dire de droit commun dans l'Eglise et remontent aux premiers jours du Christianisme.

I Note 16.

L'institution canonique fut long-temps, en France, donnée aux évêques par les métropolitains. Les métropolitains la recevaient du concile provincial. Jusqu'au huitième siècle, les pontifes romains n'exercèrent point chez nous les droits d'exarque ou de patriarche. Ils ne convoquaient pas les conciles nationaux. Les droits actuellement attachés à leur siège s'établirent insensiblement par un concours de circonstances que nous nous abstenons de rapporter.

Ainsi l'autorité que l'Eglise a reçue de Dieu même, d'étendre et de maintenir la religion chrétienne, d'instruire les fidèles sur la foi et les mœurs, de lier et de délier les consciences, n'a souffert aucune atteinte des décrets de l'assemblée nationale. Le dogme divin et immuable restait intact; l'unité de l'Eglise était respectée '.

Cependant ceux qui des états généraux n'avaient voulu que la déconvocation et qui n'étaient venus s'asseoir dans l'assemblée nationale que sur l'invitation du Roi, refusaient d'obéir aux décrets de la nation sanctionnés par le Roi. La résistance se manifestait au sein même de l'assemblée. Elle s'organisait au-dehors au nom sacré de la religion qui avait bien plus à gémir des abus que des réformes.

Quelques consciences prenant ces réformes pour des nouveautés, s'alarmaient. Elles se seraient calmées en s'éclairant. On ne leur en laissa point

■ Note 17.

le temps. Leurs craintes plus respectables que fondées furent entretenues, exagérées. Les passions terrestres les tournant à leur profit s'en firent les organes pour les exalter; les intérêts humains s'emparèrent de ce prétexte saint et poussèrent des clameurs dont la violence trahissait la véritable cause. L'aveuglement des partisans des abus ne connut plus de bornes. On cria à l'incompétence, à l'impiété, à l'irréligion, à l'athéisme, à la persécution. Les législateurs de la France furent comparés aux empereurs païens, premiers persécuteurs des chrétiens.

L'assemblée nationale ne se contenta point de repousser éloquemment ces indignes attaques, de les réduire à leur juste valeur, d'en dévoiler les motifs secrets. Elle décréta, pour prévenir les effets funestes de publications incendiaires et de prédications séditieuses ' , que tous les ecclésiastiques conservés dans leurs fonctions prêteraient immédiatement le serment auquel ils étaient assujétis, comme fonctionnaires publics, par la constitution civile du clergé.

Ce nouveau décret fat sanctionné par le Roi 3. Les députés ecclésiastiques devaient prêter serment au sein de l'assemblée nationale. Le premier jour soixante d'entr'eux, presque tous curés, se pressent à la tribune. Tour-à-tour ils proclament

Note 18.

2 Note 19.

3 Note 20.

leur inviolable attachement aux lois de la religion et à celles de la patrie.

Revêtus du sacerdoce, soumis à cette religion divine, ils continueront de l'honorer par leurs mœurs; ils en seront constamment les missionnaires; ils en seraient, s'il le fallait, les martyrs. Mais convaincus, après le plus mûr, le plus sérieux examen, que la constitution française n'est pas incompatible avec le Catholicisme; et rendant hommage aux intentions de l'assemblée nationale, qui, à la face de la France, de l'univers, a manifesté solennellement son profond respect pour la religion catholique, apostolique et romaine; et qui n'a voulu priver les fidèles d'aucun moyen de salut, ni porter la moindre atteinte au dogme, à la hiérarchie, à l'autorité spirituelle du chef de l'Eglise; ils se déclarent prêts à remplir un devoir de patriotisme propre à porter la paix dans le royaume et à cimenter l'union entre les ouailles et les pasteurs. Chacun termine sa profession de foi religieuse et civique par ce serment :

«Je jure de veiller avec soin aux fidèles dont » la direction m'est confiée. Je jure d'être fidèle » à la nation, à la loi et au Roi. Je jure de main>> tenir de tout mon pouvoir la constitution fran»çaise et notamment les décrets relatifs à la >> constitution civile du clergé. »

Les paroles solennelles du premier orateur sont accueillies par les applaudissements réitérés des représentants de la nation. Chaque fois que la

formule du serment est prononcée, ces applaudissements se renouvellent dans toute la salle et dans les tribunes, au milieu de l'émotion générale. C'était en effet un beau moment que celui où tant d'hommes recommandables par leurs talents et leurs vertus, pleins de foi, de patriotisme et de prévoyance, venaient tour-à-tour, proclamer à la tribune nationale, l'alliance de la religion et de la liberté ; alliance sainte, dont l'heureuse influence pouvait dissiper le nuage menaçant que les abus avaient amassé sur l'Eglise de France, et que de nouvelles fautes grossissaient tous les jours!

I

Dans les séances suivantes, un assez grand nombre d'autres députés ecclésiastiques, parmi lesquels on comptait quelques prélats, prêtèrent aussi le serment civique.

Sur la liste de ces hommes respectables qui distinguaient avec tant de sagesse les droits de l'Eglise et ceux de l'Empire, qui savaient obéir avec une égale soumission à Dieu et à César, et unir au sacerdoce l'indépendance du citoyen, nos annales parlementaires auraient enregistré un nom de plus pour la postérité si Louis avait fait partie de cette assemblée nationale où ses lumières et son caractère le rendaient digne d'occuper une place. Mais il était à Carlypa. Ses actes ne devaient avoir ni retentissement, ni éclat, ni s'élever aux proportions d'un salutaire exemple. Dans l'obscurité de sa position et l'incertitude des événements qu'il

• Note 21.

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