Page images
PDF
EPUB

de ses conseils. En ce cas, il lui sera lu et notifié par le greffier, qui en dressera procès-verbal.

« Donné à notre château des Tuileries, le 12 novembre. »

Signé LOUIS.

Dans le même tems on faisait des dispositions dans l'intérieur de la salle qui devait bientôt être transformée en un tribunal.

On avait annoncé que les séances seraient publiques, et on distribua un assez grand nombre de billets d'entrée. Les inconvéniens qu'on trouva à amener le maréchal tous les jours de la Conciergerie où il était détenu au Luxembourg où il devait être jugé, déterminèrent les pairs à lui faire disposer une pièce dans l'intérieur de leur palais il l'occupa pendant la durée de la première instruction. Sur ces entrefaites, le maréchal, ses conseils et quelques-uns de ses amis répandaient des mémoires imprimés, dans lesquels on posait des questions qui toutes tendaient à l'écarter d'une forme de jugement que lui-même avait sollicitée. Dans un de ces mémoires, intitulé Quelques Questions sur le procès du maréchal Ney, une plume, qui paraissait exercée, présentait un tableau hardi de l'abandon général que le Roi avait éprouvé

dans les derniers jours de mars. Ce mémoire reposait presqu'entièrement sur cette question: Était-ce le moment de commencer la guerre civile le 14 mars, à Lons-le-Saulnier, avec quatre régimens, plutôt que le 19 à Melun, avec une armée de volontaires royaux et des troupes choisies? En s'adressant à ceux que le Roi devait compter parmi ses serviteurs les plus fidèles, on mettait en doute s'ils avaient fait quelque chose pour lui dans cette circonstance, et on leur demandait s'il était généreux de faire peser sur un seul homme la responsabilité d'un événement que chacun d'eux devait entreprendre de détourner. En même tems on répandait la lettre écrite par le maréchal, à Fouché, dans le mois de juin, presque immédiatement après la bataille de Waterloo.

Toujours guidé par la même hésitation, le maréchal faisait publier ou souffrait qu'on publiât en son nom des articles de la capitulation de Paris dans lesquels il semblait cher cher un asile. Par d'autres écrits, on rappelait quelques circonstances glorieuses de sa vie; mais des souvenirs que la France conservait encore perdaient de leur prix dans le inoment où le maréchal les retraçait. On voyait avec peine un guerrier fameux sollicitant en quelque sorte l'intérêt du public

par des moyens indignes de sa gloire. Nous le verrons plus tard, rendu à lui-même, n'écoutant que ses propres pensées, effacer par une conduite pleine de grandeur les impressions défavorables qu'avaient fait naître les moyens timides et tortueux de ses défenseurs.

Cependant une instruction préparatoire se⚫ faisait dans le sein de la chambre des pairs. M. Séguier, long-tems premier président de la cour impériale de Paris, élevé par le roi à la dignité de la pairie, fut chargé de recevoir les déclarations des témoins et de faire subir de nouveaux interrogatoires au maréchal. Le zèle que ce magistrat déploya dans sa mission avança de plusieurs jours l'ouverture des débats publics.

Le 21 novembre, jour indiqué pour la première séance, arriva. Dès le point du jour, de nombreux détachemens de la garde nationale et des troupes de la garnison étaient placés autour du palais. Un grand nombre d'étrangers de marque occupait les tribunes; dans les places réservées au public, on remarquait plusieurs membres de la chambre des députés revêtus de leur costume.

A onze heures la séance s'ouvrit. Le chancelier de France occupait le fauteuil; à ses côtés étaient les secrétaires de la chambre, MM. Pastoret, de Choiseul, de Sèze, et de

Chateaubriant. Trois ministres étaient présens. M. Bellart, procureur - général, commissaire du Roi, représentant le ministère public, avait un bureau au-dessous et à la droite du président. Le secrétaire-rédacteur de la chambre faisant les fonctions de greffier, était assis à la gauche ; entre eux étaient placés les témoins, au nombre de vingt, dont seize mandés pour soutenir l'acte d'accusation, et les autres pour déposer sur divers faits que le maréchal avait allégués à sa jus

tification.

Les avenues de la salle étaient gardées par des postes de la garde nationale parisienne, chargée du service d'honneur.

Le chancelier ouvrit la séance en ces termes :

« Messieurs, le maréchal Ney, accusé de haute trahison et d'attentat contre la sûreté de l'État, va être amené devant la chambre des pairs je fais observer au public, pour la première fois témoin de nos séances, qu'il ne doit se permettre aucun signe d'approbation ou d'improbation. Les témoins doivent être écoutés, les réponses de l'accusé religieusement entendues : j'ordonne à la force publique d'arrêter quiconque violerait le silence qui doit être observé dans cette enceinte, quiconque s'écarterait du respect dû

à cette auguste assemblée, et des égards que réclame le malheur.

« Les témoins vont être introduits; on fera comparaître ensuite l'accusé. »

Les seize témoins à charge se présentent. A la gauche du président, et dans le parquet, • on avait disposé deux tables et trois siéges pour le maréchal et ses deux avocats, MM. Berryer et Dupin.

Le chancelier ordonna de faire entrer l'accusé. Il parut escorté par quatre grenadiers royaux, qui, à ce qu'on assure, étaient des officiers de confiance pris dans la maison du Roi. Le maréchal avait un habit bleu militaire sans broderie; il portait les épaulettes de son grade, la plaque de la Légion-d'Honneur; le grand-cordon de cet ordre, passé sous l'habit,. n'avait que le noeud d'apparent. On remarquait à sa boutonnière le ruban sans croix de l'ordre de Saint-Louis. Après avoir salué l'assemblée, il s'assit entre ses deux défen

seurs..

On commença par l'appel nominal de tous les pairs, suivant l'ordre du chancelier.

Le chancelier demanda ensuite au maréchal ses noms, prénoms, etc., et après que celui-ci eut répondu, le chancelier lui adressa ces paroles :

« Accusé, prêtez à ce qui va vous être lu.

« PreviousContinue »