Page images
PDF
EPUB

nations prouve ainsi son apostolat par une foule de prodiges. La simplicité de son extérieur, l'humilité de sa conduite, l'austérité de sa vie, la sagesse de ses préceptes, la pureté de sa morale, sont au-dessus de l'humanité : aussi est-il qualifié du nom saint et glorieux de Rouhh-Ullah, l'esprit de Dieu. Il reçoit du ciel le saint livre des Evangiles. Cependant les Juifs corrompus et pervers le persécutent jusqu'à demander sa mort. Trahi par Judas, et près de succomber sous la fureur de ses ennemis, il est enlevé au ciel, et cet apôtre infidèle, transfiguré en la personne de son maître, est pris pour le Messie, et essuie le supplice de la croix avec toutes les ignominies qui étaient destinées à cet homme surnaturel, à ce grand saint, à ce glorieux prophète. Ainsi Enoch, Khidir, Elie et Jésus-Christ, sont les quatre prophètes qui eurent la faveur insigne d'être enlevés au ciel vivans. Plusieurs Imans, ajoute le même auteur, croient cependant à la mort réelle de Jésus-Christ, à sa résurrection et à son ascension, comme il l'avait prédit lui-même à ses douzc apôtres, chargés de prêcher en son nom la parole de Dieu à tous les peuples de la terre. »

Ismail, fils d'Aly, raconte plus au long l'histoire de sa passion. Voici comment il s'exprime : « Comme les Juifs cherchaient avec empressement à se saisir de Jésus, un de ses disciples vint trouver Hérode, juge de la nation, et le collége des Juifs: Que me donnerez-vous, leur dit-il, si je vous montre le Christ? lls lui donnèrent trente deniers; alors il leur découvrit où était Jésus. Ibn'ol-Athir, continue l'auteur arabe, dit dans ses annales, que les docteurs sont partagés en différentes opinions au sujet de sa mort, avant qu'il montât au ciel. Les uns prétendent qu'il y fut enlevé sans mourir, d'autres soutiennent que Dieu lui ôta la vie pendant trois heures, d'autres pendant sept. Ceux qui défendent ce dernier sentiment s'appuient sur ce passage du Coran', où Dieu dit au Christ: O Jésus, je terminerai ta vie, et t'éleverai jusqu'à moi. Les Juifs ayant donc pris un homme qui ressemblait au Christ, le garottèrent, et le traînant avec des cordes, ils lui disaient: Toi qui ressuscitais les morts, ne pourras-tu te délivrer de ces liens? Et ils lui crachaient au visage.

1 Sura III, v. 54.

Ensuite ils jetèrent sur lui des épines et l'attachèrent à la croix, où il demeura pendant six heures. Un charpentier, nommé Joseph, vint demander son corps à Hérode, surnommé Pilate, qui était juge des Juifs, et il l'ensevelit dans un tombeau qu'il avait préparé pour lui-même. Alors Jésus descendit du ciel pour consoler Marie, sa mère, qui le pleurait, et lui dit : Dieu m'a pris à lui, et je jouis du souverain bonheur. Il lui commanda ensuite de faire venir ses apôtres, qu'il établit ambassadeurs de Dieu sur la terre, leur ordonnant de prêcher en son nom ce que Dieu l'avait chargé d'annoncer aux hommes. Les apôtres alors se dispersèrent dans les différentes contrées qu'il leur avait assignées. »

Ahmed, fils de Mohammed, un des principaux commentateurs du Coran, témoigne comme les précédens que c'était uniquement par haine que les Juifs cherchaient à faire mourir le Christ, et qu'ils attribuaient ses miracles à la magie. « Les Juifs, dit-il, ayant rencontré Jésus, s'écrièrent: Voici le magicien fils de la magicienne; voici l'enchanteur fils de l'enchanteresse; et se répandirent en injures et en blasphêmes contre lui et contre Dieu. Jésus les ayant entendus fit contre eux cette imprécation: O Dieu, vous êtes mon Seigneur; je procède de votre esprit, et vous m'avez créé par votre parole. Ce n'est point de mon propre mouvement que je suis venu vers eux; maudissez donc ceux qui m'ont outragé, moi et ma mère. Dieu l'exauça et changea en pourceaux ces blasphémateurs. Ce qu'ayant vu, Judas, qui était leur chef, fut saisi de crainte. Alors les principaux de la nation s'assemblèrent pour faire périr Jésus, et dirent au peuple : C'est la présence de cet homme qui attire sur vous la malédiction du Seigneur. Aussitôt les Juifs se lèvent transportés de fureur, et courent fondre sur Jésus pour le mettre à mort. Mais Dieu envoie Gabriel, qui le transporte par une fenêtre dans une maison, d'où le Seigneur l'enlève au ciel par une ouverture pratiquée sous le toit pour livrer passage à la lumière. Judas ordonne à un de ses satellites, nommé Titianus, d'entrer par cette fenêtre pour tuer Jésus ; le soldat pénètre dans la maison, et ne l'y trouvant pas, Dieu le transfigure en la personne du Christ; ainsi les Juifs le mettent à mort et le crucifient. »

On voit par ces passages et par les autres écrivains arabes, que les Makométans admettent la réalité des miracles de JésusChrist, et qu'ils les attribuent à une vertu surnaturelle qui était en lui. S'ils ne reconnaissent pas sa nature divine, ils le croient cependant supérieur aux autres hommes. Nous avons vu plus haut qu'ils avouent sa naissance miraculeuse produite par le souffle de Dieu dans le sein d'une Vierge, et même sa conception immaculée. Il y a plus, nous avons des savans qui regardent Mahomet comme le premier auteur qui ait parlé positivement de l'immaculée conception de sa mère. Voici le passage du Coran qui a donné lieu à ce sentiment singulier ".

1

« L'épouse d'Amram dit à Dieu; lorsqu'elle eut donné le » jour à sa fille : Mon Seigneur, c'est une fille que j'ai enfantée » (or le Seigneur connaissait seul ce qu'était cette enfant): mais » nul homme ne lui sera comparable. Je l'ai nommée Mariam, » Marie; je vous la recommande, elle et sa race future, contre » Satan, qui a été lapidé 3. »

Les commentateurs arabes favorisent encore davantage les théologiens catholiques. Djélal-ed-Din dit sur ce verset, que l'histoire nous apprend qu'aucun enfant ne vient au monde sans éprouver à sa naissance l'attouchement de Satan; et que

1 L'Alcoran ou le Coran est le livre sacré des Mahometans, qui le croient incréé. Il est divisé en 114 sections qu'on appelle soras ou suras, el que Mahomet prétend avoir reçues par révélation de l'ange Gabriel. Il est l'objet de la vénération la plus profonde de la part des musulmans. Le téméraire chrétien qui oserait y porter la main, doit payer ce crime par sa mort, à moins qu'il ne professe aussitôt l'islamisme. Ce livre est loin de mériter tous les éloges que plusieurs orientalistes lui ont donnés, même sous le rapport du style. Il est rempli d'anachronismes, de contradictions, de puérilités ; et son style est si coupé et si obscur, que les Arabes eux-mêmes n'en sauraient comprendre le seus littéral sans commentaire.

Sura III, v. 36.

3 Les musulmans croient que Satan fut chassé à coups de pierres par Abraham, lorsqu'il le tentait, en voulant l'empêcher d'immoler son fils, selon l'ordre que ce patriarche en avait reçu de Dieu. Ils prétendent aussi que les démons qui habitaient dans les airs en furent précipités par les bons anges qui leur lancèrent des globes enflammés à l'époque de la naissance de Mahomet.

408 HISTOIRE DE JÉSUS-CHRIST, D'après les MAHOMÉTANS. telle est la cause des cris qu'il pousse en naissant. Exceptons pourtant, ajoute-t-il, Marie et son fils.-Cottada n'est pas moins clair; Tout descendant d'Adam, du moment qu'il vient au monde, est touché au côté par Satan; il faut en excepter toutefois Jésus et sa mère, car Dieu interposa entre eux et Satan un voile qui les préserva de son fatal attouchement, de sorte que le démon ne toucha que le voile 1.» En outre il est rapporté que ni l'un ni l'autre ne tomba dans les péchés que commettent le reste des enfans d'Adam.

Quoique Mahomet nie la divinité du Christ, il lui donne cependant les éloges les plus pompeux dans le Coran; il annonce qu'il reviendra avant la fin des tems pour régner sur la terre; il appuie sa mission sur l'autorité de l'Evangile, qu'il préconise sans cesse, et qu'il cite presque à chaque page, mais étrangement défiguré.

Malgré leur animosité contre les chrétiens, les Musulmans respectent les saints lieux, témoins des mystères de notre rédemption; ils ne donnent à Jérusalem que le nom de El-Qods, la sainte ; ils y vont même en pélérinage; ils admirent nos cérémonies religieuses : ils regardent notre doctrine comme la plus excellente après l'Islamisme. Bien plus, Mahomet va jusqu'à promettre le paradis à ceux des chrétiens qui vivront saintement et qui pratiqueront les bonnes œuvres !

Espérons qu'à la faveur des lumières qui se répandent actuel lement en Orient, et du mouvement qui s'y opère, ces immenses populations, plongées jusqu'à présent dans les ténèbres de l'erreur, seront enfin éclairées, et viendront grossir le bercail du bon pasteur, dont elles paraissent moins éloignées que les autres nations infidèles, quoiqu'elles y aient porté plus qu'aucune autre secte le ravage et la terreur.

› Sura III, v. 113, 114.

CH. BERTRAND,

Direct. du grand séminaire de Versailles.

[ocr errors][merged small]

ACTION DU SACERDOCE CATHOLIQUE

SUR LA CIVILISATION DES PEUPLES.

État du monde à l'origine du christianisme.

Les martyrs.

[ocr errors]

Conversion de l'Empire. — Grandeur de ses évêques. Ils arrêtent les barbares, réparent les malheurs qu'ils ont causés. — Les convertissent.-Institution des monastères. Ils sauvent les lettres et les arts. - Ils constituent les états modernes. S'opposent au joug de la féodalite. Saint Bernard,

[ocr errors]

- De la papauté. Les croisades.

Suger.

Ordres militaires. — Universités.

Prenant en main les annales du monde, et suivant de siècle en siècle la chaîne des événemens depuis l'Evangile jusqu'à nous, il nous sera facile de démontrer par les historiens de tous les âges, par l'aveu des plus grands hommes, par l'aveu même des incrédules, des ennemis de la religion et de l'Eglise, que le genre humain est redevable au Sacerdoce des plus grands bienfaits qu'il ait reçus; mais comme la matière est immense, nous n'embrasserons dans cet article que les tems écoulés depuis Jésus-Christ jusqu'au seizième siècle.

Lorsque la croix s'élançait du haut du calvaire à la conquête de l'univers, qu'étaient-elles, ces nations qu'il fallait convertir à la foi? Lisez les historiens de ces tems déplorables; le livre tombe des mains en voyant les atrocités de tout genre souiller un siècle aussi grand que le siècle d'Auguste. Et à la mort de cet empereur, la corruption, l'infamie, avaient gagné tous les rangs de la société et la dévoraient insensiblement; semblables à un cancer hideux, la dépravation, la cruauté s'étaient assises sur les marches du trône. elles tenaient le sceptre : Rome contenait dans son sein un peuple sans mœurs; l'Orient, des Asiatiques affadis par le plaisir et l'oisiveté; le Nord, des nations profondément corrompues ou atrocement barbares, et réunissant quelquefois la barbarie à la corruption. Les aigles indomp

« PreviousContinue »