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DROIT CRIMINEL

RECUEIL MENSUEL ET RAISONNÉ

DE JURISPRUDENCE, DE DOCTRINE ET DE LÉGISLATION

CONCERNANT LES ATTRIBUTIONS TANT ADMINISTRATIVES QUE JUDICIAIRES

ᎠᏌ

MINISTÈRE PUBLIC

ET CELLES DU JUGE D'INSTRUCTION

RÉDIGÉ PAR

Gustave DUTRUC

Avocat à la Cour d'Appel de Paris, Ancien Juge d'Instruction,

AVEC LE CONCOURS DE

M. Édouard SAUVEL

Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation,

ET DE PLUSIEURS MAGISTRATS

Recueil accompagné d'un Résumé chronologique des circulaires,
instructions et décisions du Ministère de la justice.

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(66a Année du Journal du Droit criminel

PRIX DE L'ABONNEMENT: 10 FRANCS

PARIS

RÉDACTION ET ADMINISTRATION
Rue de Montenotte, 21

JUN 3 1909

ART. 2688

PRESCRIPTION CRIMINELLE, SUSPENSION, CONDAMNATION PAR DÉFAUT, FUITE EN PAYS ÉTRANGER, EXTRADITION, REFUS.

La prescription de la peine prononcée par défaut contre un prévenu qui s'est réfugié en pays étranger, se trouve suspendue lorsque l'exécution de la condamnation a été, en fait ou en droit, rendue impossible, comme dans le cas, par exemple, où l'extradition du condamné a été refusée par le gouvernement étranger; mais l'impossibilité d'agir donnant lieu à celte suspension n'existe, en pareil cas, qu'à partir du jour où l'extradition demandée a été refusée; elle ne remonte pas au jour où, avant toute demande d'extradition, le condamné a été incarcéré dans le pays étranger pour délit commis dans ce pays.

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LE TRIUUNAL; Sur le moyen de prescription de la peine soutenu par le prévenu:

Attendu que Cormont a, le 3 novembre 1894, fait opposition à un jugement rendu contre lui par défaut, le 25 juillet 1887, par le tribunal correctionnel de la Seine, qui l'a condamné à deux années d'emprisonnement et à la relégation pour escroquerie, lequel jugement a été régulièrement signifié au parquet le 1er septembre 1887; que l'extradition de Cormont, qui s'était réfugié en Angleterre, a été demandée le 12 août 1892, ainsi que l'établissent les pièces de la procédure et les mentions de réception (15 août 1892) apposées sur ces pièces par la chancellerie anglaise; que le gouvernement anglais a répondu qu'il statuerait sur les demandes et ne livrerait Cormont que lorsque celui-ci, détenu depuis le 28 mai 1892 pour délit commis en Angleterre, aurait subi les peines par lui encourues; Que, malgré cette promesse, Cormont a été mis en liberté le 7 août 1894; qu'il n'a été arrêté de nouveau, en vertu, cette fois, de la demande d'extradition, que le 13 septembre; que ces points de fait, affirmés par le prévenu dans l'interrogatoire que lui a fait subir un magistrat du parquet, le 26 décembre 1894, sont tenus pour exacts par le ministère public; que Cormont soutient aujourd'hui que sa peine est prescrite;

Attendu que sa prétention est justifiée; que s'il y a lieu, en effet, d'admettre avec la jurisprudence que la prescription de la peine peut être suspendue, lorsque toute exécution a été, en fait ou en droit, ren due impossible, la comparaison des dates ci-dessus précitées démontre cependant qu'elle est actuellement acquise au prévenu malgré la sus. pension; qu'elle n'a été arrêtée dans son cours, en fixant le point de

départ le plus favorable à la prévention, que le 15 août 1892, date de la réception, en Angleterre, de la demande d'extradition; qu'elle aurait été accomplie quinze jours plus tard, puisque le 1er septembre 1892 était le terme de la période de cinq années commencée le 1er septembre 1887, jour de la signification du jugement par défaut; que, dès lors, Cormont ayant été mis en liberté lé 7 août 1894, et y étant resté jusqu'au 13 septembre, a pu compléter sa prescription par ce laps de temps, plus que suffisant, de un mois et six jours;

Que vainement on prétend que la prescription a été suspendue de plein droit le jour même où, avant toute demande d'extradition et à l'insu du procureur de la République du tribunal de la Seine, Cormont a été incarcéré en Angleterre pour délits commis dans ce pays, soit le 18 'mai 1892; qu'un pareil système est inadmissible et conduirait, dans son application, à d'étranges résultats; Que la suspension de la prescription ne peut se produire que lorsque le ministère public ayant manifesté l'intention de faire exécuter une peine, s'en est trouvé emrêché par une impossibilité de fait ou de droit; - Que, dans l'espèce, il n'y a eu pour lui impossibilité d'agir qu'au moment où le gouvernement anglais, saisi de la demande d'extradition, a répondu qu'il livrerait son prisonnier seulement à l'expiration des peines subies par celui-ci ; que le ministère public eût pu réclamer plus tôt l'extradition de Cormont, son ignorance du lieu où se trouvait celui-ci ne devant pas être considérée comme une impossibilité; que, d'autre part, le gouvernement anglais avait la faculté, en vertu de sa convention avec la France, de faire droit immédiatement à cette demande, s'il eût pensé que ce fût nécessaire, soit à raison de la gravité du délit commis en France, soit pour rendre plus facile la preuve de ce déli ; que, par conséquent, la maxime Contrà non valentem agere currit præscriptio ne peut être invoquée par le ministère public qu'à partir du jour où le refus fait par le gouvernement anglais de livrer immédiatement Cormont, l'a mis dans l'impossibilité d'agir contre ce dernier ; - Que, dans ces conditions, la peine prononcée contre le prévenu est prescrite et l'opposition doit être déclarée non recevable; Que toutefois, en ce qui concerne les dépens de cette opposition, il n'y a pas lieu de les mettre à la charge de Cormont, celui-ci n'ayant pas eu d'autre moyen d'établir la prescription de la peine qu'on voulait lui faire exécuter;

-

Par ces motifs, déclare prescrite la peine prononcée contre Cormont par jugement de défaut, en date du 25 juillet 1887, du tribunal correctionnel de la Seine; dit, en conséquence, l'opposition de Cormont non recevable et l'en déboute sans dépens; Ordonne qu'il sera mis en liberte, s'il n'est retenu pour autre cause, etc. DU 7 JANVIER 1895. - Trib. corr. de la Seine. 10e ch. Servin, subst. du proc. de la Rép.; Aliès, av.

pr.;

---

- MM. Fabre,

OBSERVATIONS. -La prescription qui court contre le ministère. public, lorsque le prévenu a été condamné par défaut, n'est plus la prescription de l'action publique, mais bien celle de la peine, ainsi que je l'ai établi, avec l'appui de la jurisprudence, dans mon Mémorial du Ministèrė public, vo Prescription criminelle, n. 79 et suiv. Or, la règle Contrà non valentem agere non currit præscriptio, applicable en matière criminelle comme en matière civile (ibid., n. 46), s'oppose nécessairement à ce que le condamné défaillant prescrive sa peine dans le pays étranger où il s'est réfugié, lorsque le ministère public qui a fait tout ce qui était en son pouvoir pour parvenir à l'exécution de la condamnation en requérant du gouvernenement étranger l'extradition de ce condamné, a vu repousser sa demande. A partir du jour de ce refus, il a été véritablement, en fait et en droit, dans l'impossibilité de faire subir au condamné sa peine, qui, dès lors, n'a pu continuer à se prescrire.

Mais ce jour-là seulement commence pour le ministère public l'impossibilité d'agir; on ne saurait voir un obstacle légal à son action dans la détention du condamné à l'étranger, pour des délits qu'il y a commis. - Compar. Mémor. du Min. publ., verb. cit., n. 42

et suiv.

A annoter au Mémor., eod. verb., n. 84 bis.

ART. 2689

ÉVASION DE DÉTENUS, CONTRAVENTION.

L'art. 245, Cod. pen., qui reprime l'évasion de détenus accomplie par bris de prison ou par violence, ne, s'applique pas à l'évadé qui n'était détenu que pour une contravention de police.

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LA COUR;

-

Sur le moyen unique du pourvoi pris de la violation des art. 238 et 245, Cod. pén. :

Attendu que Perrette, trouvé en état d'ivresse manifeste dans un lieu public, a eté conduit au poste municipal de Segré, par application de l'art. 11 de la loi du 23 janvier 1873; qu'il s'est évadé dudit poste en détachant la serrure de la porte à l'aide d'une pierre; que, condamné à 5 francs d'amende pour ivresse, il a été acquitté du chef d'évasion avec bris de prison, par le motif que l'art. 245, Cod. pén, n'est pas applicable

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